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13/05/2008
Au Mali, lor ne fait pas le bonheur

(MFI) Le 19 mai prochain, le tribunal du travail de Bamako va tudier les plaintes dposes par des ex-salaris de la mine dor de Morila, qui rclament leurs droits. Car si lexploitation industrielle de lor, dveloppe dans le milieu des annes quatre-vingt-dix, a hiss le Mali au troisime rang des producteurs africains dor jaune, derrire le Ghana et lAfrique du Sud, ce succs qui a lamin lorpaillage traditionnel ne profite pas tous.

Ici, lor enrichit les multinationales, pas lEtat malien , sexclame Brahima Kon. Prsident de lUnion interafricaine des droits de lhomme, organisation panafricaine non gouvernementale uvrant la promotion et la dfense des droits de lhomme, il veut que cela se sache. Pour lui, lexploitation aurifre a peu deffet dentranement sur lconomie du pays. Le secteur nemploie que quelques dizaines de milliers de travailleurs, alors que la culture du coton, elle, fait vivre plus de trois millions de personnes. Au niveau local, il y a eu quelques crations demplois qui ont permis de rduire la pauvret, explique Brahima Kon. Pour le reste, les multinationales exportent lor ltat brut. Le traitement du minerai se fait en Suisse, au Canada ou en Afrique du Sud. La part revenant au Mali est drisoire. Une part dautant plus maigre que lEtat est priv de recettes pendant les cinq premires annes dexploitation. En effet, pendant cette priode, le code minier malien de 1991 octroie aux entreprises minires des exonrations fiscales. Un cadeau qui pousse ces entreprises surexploiter les gisements au dbut.

Prime de rendement impaye

Situe 280 kilomtres au sud-est de Bamako, dans la rgion de Sikasso, tout prs des frontires du Burkina et de la Cte dIvoire, la mine dor de Morila est reprsentative des paradoxes du secteur aurifre malien. Cest une mine ciel ouvert dtenue par deux gants miniers qui se partagent 80 % du capital (40 % pour Randgold Ressource et 40 % pour Anglogold Ashanti), lEtat malien possdant les 20 % restants, explique Brahima Kon. Cest la Socit malienne dexploitation (Somadex), une filiale de la franaise Bouygues, qui assure lexploitation depuis louverture de la mine en juillet 2000. Le cot de lextraction est trs faible. En 2005, elle tait la plus comptitive du continent. Mais les salaris se sont plaints, au vu des rsultats raliss, de ne pas recevoir la gratification pourtant prvue par les textes.
Prsident de lassociation Avocats sans frontires du Mali, Hamadi Karamb soutient les ex-salaris de la Somadex qui veulent faire valoir leurs droits. Leur revendication principale concerne le versement dune prime de rendement, prvue par la convention collective en cas de dpassement des objectifs dexploitation, souligne-t-il. Des objectifs largement atteints. En effet, les travailleurs estiment quenviron 80 tonnes dor ont t extraites entre 2001 et 2003, alors que lEtat malien et la Somadex avaient tabl sur 11 tonnes dor par an. En 2003, une juridiction malienne ad hoc a reconnu le droit des salaris la prime de rendement. En vain. La Somadex refuse de payer , affirme lavocat. Face cette situation, une grve gnrale a t vote en 2005. Pour avoir refus de reprendre le travail aprs 72 heures, 300 dentre eux, sur les 1500 employs par la Somadex, ont t licencis. Ils sont 218 se retrouver aujourdhui devant la justice pour un procs emblmatique (initialement appele devant le tribunal du travail de Bamako le 21 avril dernier, laffaire a t reporte au 19 mai). Seuls manquent lappel ceux qui nous ont quitts , souligne Hamadi Karamb.

De nouveaux gisements surveiller de prs

Morila nest pas la seule mine dor mise en cause au Mali. Sbastien Godinot, membre de la section franaise des Amis de la Terre, organisation non gouvernementale de protection des droits de lhomme et de lenvironnement, a ralis une mission dinvestigation dans la mine dor de Sadiola en 2004. Pour lui, lexploitation de lor a provoqu dimportants problmes de sant. LEtat manque de moyens pour faire respecter les normes sociales et environnementales, explique-t-il. Des travailleurs de la mine, qui avaient tent de former un syndicat, ont t licencis. Sadiola a ferm ses portes fin 2006, le gisement tant puis. A Morila, lexploitation est prvue pour durer jusquen 2011. Pour lheure, de nouvelles mines dor ont ouvert. Cest le cas de celle de Loulo, inaugure en novembre 2005 et considre comme lune des plus importantes en Afrique de lOuest. Face la dcouverte de nouveaux gisements dor jaune, les associations de dfense de lenvironnement et des droits des travailleurs sont sur le qui-vive. Le gouvernement malien promet, quant lui, quil planche sur un nouveau code minier.

Martin Courcier

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