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10/02/2009
Lor en Afrique : le bonheur des uns et le malheur des autres

(MFI) Valeur refuge traditionnelle, surtout en temps de crise, lor reprend des couleurs travers le monde avec la multiplication des prospections, y compris en Afrique, la remise en exploitation danciennes mines, comme aux Etats-Unis, et la fabrication tour de bras de lingots, notamment en Suisse.

Si le record historique remonte au printemps 2008, avec un cours de lor de plus de 1 000 dollars lonce, les experts, bien que partags, estiment aujourdhui que ce cours restera voisin ou dpassera 900 dollars. Mais le bonheur des uns Etats producteurs et multinationales fait aussi le malheur des autres les populations locales, qui perdent leur terre et subissent les consquences de la pollution des nappes phratiques et de la destruction de lenvironnement, en particulier pour les mines ciel ouvert.

La Chine et lAfrique du Sud se disputent la place de premier producteur mondial

Premier producteur mondial et africain (suivi du Ghana, du Mali et de la Tanzanie), lAfrique du Sud est talonne et mme dpasse par la Chine qui, comme lInde, est avide de bijoux en or. Selon des statistiques rendues publiques dbut fvrier par lAssociation chinoise de lor, la production a dpass les 282 tonnes en 2008, celle de trois provinces Shandong, Henan et Jiangxi ayant reprsent 46 % de la production totale. Les transactions ont galement t dynamiques sur ce march : la bourse de Shanghai, elles ont dpass les 86 millions de yuans, soit 1,75 fois plus que lanne prcdente.
En fait, la production de lor a connu une croissance continue ces dernires annes en Chine, dpassant celle de lAfrique du Sud en 2007. Pkin devrait conserver sa place en 2008 si la production en Afrique du Sud, qui possde les plus importantes rserves du monde, naugmente pas trop. Les autres producteurs importants sont les Etats-Unis, lAustralie, la Russie et le Prou. Au cours des 120 dernires annes, la production sud-africaine a toujours reprsent plus de 30 % du total mondial. En 1970, elle a mme dpass les 1 000 tonnes, un record jamais encore gal par aucun autre pays.

La mine de Tongon devrait rapporter 500 millions de dollars lEtat ivoirien

Au Ghana, lor reprsente prs de 95 % des revenus tirs des minerais ; le pays, qui a aussi dcouvert rcemment de lor noir, est en train de se relever de la crise nergtique qui la frapp, y compris dans ce secteur, lextraction de lor ncessitant beaucoup dnergie.
Comme la Tanzanie, le Mali est un producteur rcent qui tire dsormais dimportants revenus de lor. Louverture en 2009 de trois nouveaux sites, Kara Koto dans la rgion de Kayes (ouest), Syama et Kodaira dans la rgion de Sikasso (sud), va encore augmenter la production aurifre, qui reprsente 70 % des recettes dexportation et 15 % du PIB du pays. Les rserves sont estimes environ 350 tonnes sans compter le reste du territoire national, susceptible dtre riche en or et en bauxite non encore exploite.
Autre futur producteur, la Cte dIvoire o la socit dexploration minire Randgold Resources a dcouvert un gisement dont elle entamera lexploitation dici la fin 2010. Situ dans la localit de Tongon, 630 km au nord dAbidjan, ce gisement reprsente la plus importante unit minire de la Cte dIvoire avec plus de quatre millions donces (environ 120 tonnes) , a affirm le directeur gnral de Randgold Resources, Dennis Marc Bristow. La mine de Tongon, dont la dure de vie est estime prs de dix ans , devrait tre exploite par les mthodes ciel ouvert normales en recourant un entrepreneur minier sous-traitant , est-il prcis. La quantit totale de matire exploitable est estime 38,72 millions de tonnes dune teneur de 2,24 grammes par tonne. La recherche, lexploration et linvestissement ont ncessit 140 milliards FCFA (213 millions deuros) et lEtat ivoirien, qui dtient 10 % des parts de la socit dexploitation Tongon SA, devrait encaisser un bnfice net de 500 millions de dollars travers les taxes.
Si dautres pays africains comme le Niger, le Burkina Faso, la Guine ou la Rpublique dmocratique du Congo produisent aussi de lor, de nombreux experts et ONG pointent les dangers pour les populations.

Perte des terres cultivables, pollution des nappes phratiques

LONG Fian, dont le secrtariat se trouve Heidelberg, en Allemagne, affirme par exemple que 700 personnes ont t prives du droit la terre et leau la suite de lexploitation, par la sud-africaine AngloGold Ashanti, du site minier dIduapriem, au Ghana et que cest loin dtre un cas unique. Dans un livre publi fin 2007 sur lor africain , le journaliste suisse Gilles Labarthe crivait que lexploitation dor lchelle industrielle apporte son lot de nuisances, parfois mortelles , auxquelles sajoute la perte des terres cultivables et des sites dorpaillage . De plus, selon plusieurs experts, lexploitation de lor par les multinationales est un vecteur important de pollution. Lutilisation du cyanure et du mercure a ainsi provoqu une pollution trs inquitante des nappes phratiques, notamment au Mali.
Selon Gilles Labarthe 80 % des plus gros gisements africains sont aux mains des multinationales . Il dnonce lexploitation des gisements par une poigne de firmes occidentales soutenues par la Banque mondiale qui ne se privent gure dexploiter lor africain et de bouleverser le mode de vie des populations locales : cadences infernales, normes de scurit inexistantes, mouvements syndicaux rprims, pollution catastrophique, etc. , sans parler des conflits aliments par le trafic de lor, notamment en RDC. Mme son de cloche dans un documentaire canadien intitul Le silence est dor . Sa ralisatrice, Alexandra Sicotte-Lvesque, co-fondatrice de Journalists for Human Rights, affirme que lexploitation de lor au Ghana par les multinationales canadiennes est un scandale financier, environnemental et politique.

Marie Joannidis

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