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28/04/2006 | |||
Protection des civils : une priorit depuis toujours pour les humanitaires | |||
(MFI) Pour le Comit international de la Croix rouge (CICR) comme pour Mdecins sans frontires (MSF), les civils ne sont pas mieux protgs quavant et cela malgr des avances formelles au plan du droit international et une rapidit accrue de larrive des secours. Une apprciation verser au dbat en cours sur la Scurit humaine tant lONU quau sein de lOrganisation internationale de la Francophonie (OIF). | |||
En premire ligne sur les champs de bataille et lors des catastrophes naturelles, le CICR et MSF jugent dangereuse la rcupration actuelle par les politiques et les militaires de laction humanitaire. Pour les acteurs de ces organisations, il nest pas question dattendre un cessez-le-feu humanitaire qui na dailleurs jamais vraiment march pour intervenir. Il faut donc accepter les risques du mtier mme si, dans lactuel Afghanistan ou dans lIrak de laprs Saddam Hussein, la vie des humanitaires, comme celle des journalistes, est menace par des belligrants qui ont une fcheuse tendance les prendre pour cible. Pour Christophe Harnisch, responsable Afrique au CICR, la scurit des populations civiles est une priorit : Ce sont eux qui souffrent le plus alors que les soldats ont peu de morts et de blesss. Pour une plus grande efficacit, poursuit-il, il faut que les organisations humanitaires soient proches des victimes dans les zones de conflits. Cest essentiel . Et il ajoute : Cela passe par un dialogue indispensable avec les porteurs darmes, les responsables de la violation des rgles du droit international humanitaire et de la conduite des hostilits. Pour le reprsentant du CICR, les moyens dploys en Afrique manquent defficacit. Les populations de lest de la RDC, du Darfour ou de la Somalie, par exemple, nont pas le sentiment dtre protges. Le meilleur cadre, cest certainement une intervention dans la dure et plusieurs niveaux, des actions diplomatique, politique, militaire sil le faut, ainsi quhumanitaire, dans le respect des uns pour les autres . Mettre laccent sur la protection des personnes dtenues Christophe Harnisch rfute la notion de droit dingrence humanitaire, lestimant slectif et marquant la politisation des interventions. En Afrique, les acteurs sont de plus en plus nombreux ; des humanitaires, en concurrence avec des contingents militaires qui font de lhumanitaire. Cela amne parfois une confusion des genres , affirme-t-il. Son organisation essaie de dvelopper les capacits de ses partenaires locaux en terme dassistance humanitaire et met prsent laccent sur son mandat de protection des personnes dtenues, et celle des civils l o les problmes sont les plus aigus . Il souligne enfin que le respect du droit peut se produire condition que les personnes en connaissent les rgles, mais aussi quelles sachent que leur non respect a des consquences. A cette fin, lorganisation internationale a entrepris depuis le dbut des annes 1990 des formations de militaires et de policiers au droit international humanitaire (DIH), notamment pour lAfrique. Pour le Dr Jean-Herv Bradol, prsident de MSF France, alors que la communaut internationale sattaque la dfinition du concept large de scurit humaine, cest la protection des non-combattants qui est le principal souci des humanitaires. Il dplore les dispositions illusoires sur la protection des civils, apparues la fin de la Guerre froide travers laction de la communaut internationale, et dmentie par la suite avec les drames de Bosnie (Srebrenica) et du Rwanda. Nous avons commenc dans loptimisme la fin des annes 1980. Puis nous nous sommes rendus compte que nous nous tions fabriqu des illusions qui pouvaient tre trs cruelles. Les promesses denclaves humanitaires protges ou de corridors humanitaires ont bien souvent t des piges pour les civils , rappelle-t-il. Si la cration de la Cour pnale internationale (CPI) peut tre considre comme un lment positif, tout comme les pressions exerces contre les criminels de guerre qui dsormais se cachent au lieu de parader , en revanche le conflit du Darfour a montr, selon lui, quun gouvernement pouvait se livrer des tueries de grande ampleur contre sa propre population tout en continuant recevoir une aide conomique. En Europe galement, le conflit de dix ans en Tchtchnie qui aurait entran la disparition de 10 20 % de la population na fait lobjet daucune runion du Conseil de scurit de lONU ces dernires annes. Le prsident de MSF France dplore la rcupration politique de laide Lorganisation humanitaire regrette aussi que la coalition dirige par les Etats-Unis ait intgr laction humanitaire dans les objectifs stratgiques de ses offensives militaires en Irak et en Afghanistan. Mme si nous prenons nos distances, cela nous met quand mme en pril , souligne Jean-Herv Bradol, qui critique encore ce quil estime tre une rcupration politique de laide. Il est trs important que les humanitaires continuent se distinguer des acteurs politico-militaires. Il y a trop de confusion des rles. Nous voulons, explique-t-il, que les puissances militaires et politiques arrtent leur rcupration permanente sous le label humanitaire. Cela rend mme parfois difficile la coopration entre ONG en raison de ladhsion politique de certaines . MSF estime quil ny a pas de changements majeurs dans la protection des civils, si ce nest laugmentation du nombre dorganisations humanitaires et de leur matriel, ce qui peut dailleurs les rendre plus vulnrables aux attaques dans certaines circonstances. Les secours arrivent plus vite et laccs est plus facile sauf dans des conflits svres, morcels, et dans des pays comme la Core du Nord et la Birmanie o il ny a aucun espace de travail. Mais ils restent de qualit moyenne, mme si cela sest amlior et que le nombre total de conflits a diminu , ajoute le prsident de MSF, pour qui lavenir de lhumanitaire passe par une amlioration des secours. | |||
Marie Joannidis | |||
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