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| 12/05/2006 | |||
| Immigration/Etats-Unis Lmergence du pouvoir des Latinos | |||
| (MFI) Les Hispaniques sont dsormais la premire minorit visible aux Etats-Unis. Au-del de leur rle conomique, ils revendiquent des droits politiques. Le dbat sur limmigration divise la socit amricaine alors que jamais le pays na accueilli autant dmigrs, lgaux ou clandestins. | |||
| Cela devait tre une journe sans immigrant. On nen a pourtant jamais vu autant dans les grandes villes amricaines. Le 1er mai, des centaines de milliers dmigrs, principalement hispaniques, ont manifest dans les principales villes des Etats-Unis. Leur cri de ralliement : Si, se puede (oui, cest possible) ou Nosotros somos America (nous sommes lAmrique). Ce 1er mai constituait la troisime journe de protestation des travailleurs immigrs aux Etats-Unis depuis le dbut de lanne. Objet de leur courroux : une loi adopte le 16 dcembre dernier par la Chambre des reprsentants et qui durcit larsenal anti-immigration. Elle prvoit de criminaliser tout sjour illgal aux Etats-Unis (cest un dlit actuellement) et de criminaliser aussi laide aux clandestins, qui nest quune infraction jusqu prsent. En outre, la loi approuve la construction dune barrire de 1 130 kilomtres le long de la frontire mexicaine (sur 3 100 km de frontire), avec barbels, projecteurs, camras de surveillance et dtecteurs de mouvement. Au plan lgislatif, cest limpasse. Le Snat a en effet refus de ratifier le texte. Aprs des semaines de dbats houleux, il avait trouv, en avril, un compromis qui prvoyait de rgulariser les cinq six millions de clandestins qui vivent dans le pays depuis plus de cinq ans ( condition quils prsentent un contrat de travail et sacquittent dune amende symbolique), daccorder des visas temporaires 1,5 million de salaris agricoles, et dexpulser tous les illgaux installs aux Etats-Unis depuis moins de deux ans. Certains lus rpublicains sont opposs tout compromis, synonyme pour eux damnistie. Ils savent que limmigration sera le principal enjeu des lections lgislatives de novembre prochain. Le dbat traverse en ralit les partis politiques. Les Rpublicains sont diviss entre une droite nationaliste, farouchement hostile aux immigrs, et les milieux daffaires favorables la rgularisation des clandestins. Dans une moindre mesure, les Dmocrates sopposent entre ceux qui rappellent la tradition douverture des Etats-Unis et une minorit proche des syndicats qui dplore que le recours limmigration tire les salaires vers le bas. Pour une fois, George Bush ne fait pas figure de faucon. Le locataire de la Maison-Blanche a propos, il y a quelques mois, un systme de guest workers, de travailleurs invits, qui prvoit daccorder un visa de trois ans, renouvelable une fois, tous les clandestins qui travaillent. Au terme de ces six annes, les intresss devraient repartir dans leur pays et attendre un an avant de pouvoir dposer une nouvelle demande de visa. Ce plan aurait permis de rgulariser huit des onze millions de clandestins aux Etats-Unis, essentiellement les Mexicains. Patriotes contre Eglises et associations humanitaires Ce dbat sur limmigration qui en ralit est essentiellement un dbat sur la place des Hispaniques dans la socit amricaine divise aussi lopinion publique. Depuis les attentats du 11 septembre 2001, les thmes de la scurit et du contrle des trangers sont sensibles aux Etats-Unis, indpendamment de la bonne sant conomique du pays. Ainsi, selon un rcent sondage, 75 % des Amricains pensent que le gouvernement ne lutte pas assez contre limmigration illgale, mais 70 % sont favorables ce que les clandestins qui ont un emploi soient autoriss rester aux Etats-Unis. En aot 2005, Chris Simcox, un ancien instituteur, a fond en Arizona les Patriot Minutemen , un mouvement compos dex-militaires, mais aussi de bons citoyens WASP (white anglo-saxon protestant) qui patrouillent le dsert pour arrter ceux qui cherchent franchir illgalement la frontire et les remettre la police. Dans un autre registre, le jeu vido la mode aux Etats-Unis sappelle Border Patrol. Il consiste tirer sur des Mexicains entrant illgalement dans le pays. De faon plus lgaliste, plusieurs Etats du sud, jugeant Washington trop laxiste, ont adopt des lgislations plus rpressives contre limmigration illgale, infligeant notamment de fortes amendes aux employeurs de clandestins. A lautre extrmit de lchiquier, des ONG, des associations anti-racistes et des mouvements religieux - trs influents aux Etats-Unis- prennent fait et cause pour les Latinos . La presse aussi qui a publi plusieurs dessins o lon voit des Indiens plumes sur la tte, arc autour du torse sexclamant, en voyant arriver le Mayflower en 1620 : Avec ces nouveaux colons, il va falloir adopter une lgislation contre limmigration . Comme le souligne Jeff Passel, du Center for American Progress : Chaque anne, des dizaines de milliers de Mexicains prennent le risque de traverser les 110 kilomtres du dsert de Sonora, en Arizona [] Construire une barrire est inutile ; ils trouveront dautres moyens pour entrer dans le pays . LEglise catholique est particulirement en pointe dans ce combat. Nous assistons aujourdhui la cration dun pouvoir hispanique et dune revendication politique. Cest un mouvement aussi fort que le combat des Noirs pour leurs droits civiques dans les annes 60 , analyse Warner Glenn, un porte-parole de lpiscopat. Un nombre record dimmigrs Cette premire tentative depuis 1990 de rformer la loi sur limmigration tient certainement un facteur nombre. Jamais les Etats-Unis nont accueilli autant dimmigrs, lgaux ou clandestins : environ trente millions depuis le dbut des annes 70. Entre tudiants, salaris, familles reconstitues et rfugis politiques, les Etats-Unis dlivrent chaque anne 680 000 visas de longue dure (voir encadr). Dans le mme temps, 750 000 sans-papiers sinstallent chez lOncle Sam, dont 78 % de Sud-Amricains (50 % de Mexicains), 13 % dAsiatiques, 6 % dEuropens et 3 % venant du reste du monde. Ce chiffre de 750 000 clandestins par an (depuis 2000) est cinq fois plus important que celui enregistr chaque anne entre 1980 et 1990. Et il pourrait tre encore plus lev, puisquun million de Sud-Amricains sont arrts chaque anne en tentant de franchir la frontire. Onze millions de clandestins, en 2005, constitue un record dans lhistoire du pays. Quel que soit leur statut lgal, voire leur nationalit, les Latinos reprsentent aujourdhui 12,5 % de la population amricaine, soit 40,7 millions de personnes (36,2 millions dAfro-Amricains en comparaison). Ils taient 22,4 millions en 2000 ; ils seront 60 millions en 2020. On comprend alors quils revendiquent des droits politiques. Pour leur part, les autorits mexicaines ne tiennent pas voir revenir tous ceux dont la fuite constitue une faon de lutter contre le chmage. En outre, les Mexicains des Etats-Unis envoient chaque anne dans leur pays prs de 15 milliards de dollars, soit plus que les revenus du tourisme. Pour le journaliste Michael Baronne, auteur de The new America : how the melting-pot can work again : Les blancs amricains ne conoivent plus limmigration de la mme faon que par le pass. Autrefois, quiconque travaillait tait le bienvenu, peu importe quil ne parle pas anglais. Lconomie tait le seul facteur dintgration. Aujourdhui, un nombre croissant de personnes estime que les immigrants doivent savoir parler anglais et partager un certain nombre de valeurs communes la dmocratie, les droits des femmes, etc. Dconomique, le facteur dintgration devient culturel, comme cest le cas en Europe. Cela va terriblement compliquer les choses . Jean Piel Etudiant, salari ou retrait : les diffrents types de visas pour les Etats-Unis (MFI) A chaque situation son visa. La rglementation amricaine en matire dimmigration est trs stricte et assez complexe. Mais les Etats-Unis sont, en chiffre absolu comme en pourcentage de leur population, le pays le plus accueillant de la plante, puisquenviron 680 000 visas de longue dure sont accords chaque anne. En raison du droit du sol, tout enfant n sur le territoire des Etats-Unis peut tre dclar citoyen amricain. Par contre, pouser un(e) Amricain(e) ne confre pas automatiquement la nationalit. Selon le pays dont vous tes ressortissant, vous devez ou non obtenir un visa de tourisme (B2) ou daffaires (B1). Sa validit est de trois ans maximum. Les visas F, M et J sont destins aux tudiants : dix-huit mois renouvelables. Prs de 400 000 sont dlivrs chaque anne. Le visa L-1 est rserv aux salaris de socits qui vont travailler pour leur filiale aux Etats-Unis. Le visa E dune dure maximum de cinq ans est prvu pour les trangers qui investissent dans une firme amricaine. Les visas O et P sont destins aux sportifs, scientifiques et artistes de haut niveau qui viennent travailler aux Etats-Unis ou participer un vnement particulier (confrence, championnat, concert). Le visa H-1B est un visa de travail qui prsuppose davoir sign un contrat avec un employeur amricain. Ce visa est valable trois ans, renouvelable une seule fois : 65 000 sont accords chaque anne. Le visa H-2B est rserv aux travailleurs saisonniers, dans lagriculture notamment. Il faut aussi avoir un contrat de travail. Les Etats-Unis en dlivrent environ 60 000 par an. Washington a accueilli 70 000 rfugis politiques en 2005, contre 53 000 lanne prcdente. Les conditions doctroi dun tel statut sont trs difficiles, dpendent des annes et des pays et sont laisses la seule apprciation de lUS Bureau of Immigration. Mais la voie royale pour qui veut sinstaller aux Etats-Unis reste la fameuse Carte verte, la Greencard. Il sagit dun visa permanent qui offre son titulaire (et son conjoint) les mmes droits quun citoyen amricain, except le droit de vote puisque la carte verte ne confre pas la nationalit amricaine. Seule contrainte : son dtenteur na pas le droit de quitter les Etats-Unis plus de six mois daffile. Ne peuvent lobtenir les personnes atteintes dune maladie contagieuse ou ayant t condamnes une peine de prison. Pour dcrocher ce ssame, la solution la plus simple est la loterie quorganisent les autorits amricaines dans le cadre du Programme de diversification des flux migratoires. Chaque anne, 55 000 demandeurs sont tirs au sort par informatique. On compte en moyenne 10 millions de candidatures. Soit un gagnant sur 182 candidats. Lautre possibilit dobtenir la Greencard est le regroupement familial, savoir tre le conjoint, lenfant mineur ou le frre (ou sur) dun citoyen amricain. La procdure dure alors environ deux ans. Toute personne qui investit au moins 150 000 dollars dans une firme amricaine peut galement demander la carte verte. Enfin les dtenteurs dun permis de travail peuvent obtenir le prcieux parchemin condition de prouver quils ne prennent pas un poste quun ressortissant amricain pourrait occuper. Dans ces trois derniers cas, la procdure est longue, complique et son rsultat incertain. J. P. | |||
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