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01/09/2006 | |||
Promotion de la diversit culturelle : Europe et Francophonie, mme combat ! | |||
(MFI) Ladoption par 148 pays, le 25 octobre 2005, dune convention sur la diversit des expressions culturelles est un vritable manifeste en faveur dune mondialisation qui refuse luniformisation. Cette victoire est le fruit, au sein de lOrganisation des Nations unies pour lducation, la science et la culture (Unesco), dune longue bataille politique marque par les efforts conjoints de la Francophonie et de lUnion europenne et une forte mobilisation des pays dEurope centrale et orientale. Le dfi est dsormais de convaincre le plus grand nombre dEtats de ratifier au plus vite la convention. | |||
La Francophonie a jou un rle prcurseur dans le combat pour affranchir la culture des rgles du commerce international. Ds 2002, au sommet de Beyrouth, elle prconise ladoption dun instrument juridique international sur la diversit culturelle. En amont des travaux lUnesco, elle entreprend tout un travail de sensibilisation des pays francophones avec le soutien actif de la France et du Canada. Elle dfend les enjeux de la diversit culturelle dans les sphres conomiques, au plus haut niveau diplomatique et au sein de la socit civile, soutenant lmergence de coalitions nationales runissant associations et artistes. Vritable moteur pendant les travaux de prparation de la convention, la Francophonie met des experts juridiques disposition des dlgations francophones lUnesco et veille encourager une coopration active avec les autres aires linguistiques hispanophones, lusophones et arabophones. LUnion europenne (UE), autre ple dinfluence dans les ngociations, russit rallier la Grande-Bretagne et sexprime dune seule voix en faveur de la diversit culturelle. Beaucoup denthousiasme et de volont se sont dgags de ce travail dans le cadre de la prparation dune position commune , se souvient Irena Moozova, dlgu permanent de la Rpublique tchque lUnesco. Et cest vrai quil a fallu faire bloc avec tnacit pour que la Commission europenne puisse obtenir, le temps de ces ngociations, un rle plus actif que celui de simple observateur. Un enjeu majeur pour lquilibre des PECO Pour que la convention entre en vigueur, il faut maintenant que 30 pays au moins la ratifient. Trois pays membres de lOrganisation internationale de la Francophonie (OIF) ont, au 1er aot 2006, fait aboutir le processus : le Canada, lle Maurice et la Roumanie. La Croatie, Djibouti, le Burkina Faso, le Mali et le Cambodge ont ratifi la convention mais nont pas encore dpos les instruments de ratification lUnesco. Le processus devrait aboutir prochainement dans dautres pays dEurope centrale et orientale (PECO), notamment en Bulgarie. Pour les pays membres de lUnion europenne, lide initialement envisage dun dpt simultan des instruments de ratification semble difficilement ralisable. La France, qui a dj fait aboutir son processus interne de ratification, hsite entre un dpt avant le sommet de Bucarest et la solidarit europenne. Dautant que le processus est plus long dans dautres pays de lUE comme la Belgique, qui compte plusieurs parlements. Lessentiel reste cependant de faire vite afin dviter que les Etats-Unis, opposs la convention, ne signent davantage daccords bilatraux neutralisant le texte. Lenjeu pour les PECO est majeur, compte tenu de lexprience historique de ces pays et face linvasion culturelle amricaine menaant leurs marchs. La convention peut nous aider promouvoir des produits culturels de qualit, trouver un quilibre entre une culture subventionne 100% par "lEtat miracle" et une culture entirement lie lconomie de march , affirme Andrei Magheru, ambassadeur de Roumanie lUnesco, prsident du groupe des ambassadeurs francophones. Dans les Balkans, soutenir la diversit culturelle est galement fondamental pour promouvoir une culture de paix. Il est important que la diversit culturelle apparaisse au grand jour et quun travail de catharsis de la guerre et des massacres soit fait en favorisant les rencontres entre artistes , plaide Nicolas Petrovitch, directeur de lassociation ditrice du Courrier des Balkans. Le plurilinguisme, passeport pour lautre Reconnue dans la convention comme lment fondamental de la diversit culturelle , la diversit linguistique est inscrite au cur des politiques de lUnion Europenne et de lOIF. Depuis llargissement du 1er mai 2004, lUE compte 20 langues officielles ; or cest la seule organisation au monde o sapplique le principe dgalit des langues. Selon le trait dAmsterdam (1997), tout citoyen peut sadresser aux institutions de lUnion dans sa propre langue et recevoir une rponse dans la mme langue. Les services de traduction doivent grer plus de 400 combinaisons linguistiques. Comment travailler ensemble dans ces conditions ? Le rglement du Conseil du 15 avril 1958, qui pose lgalit des langues officielles et de travail sans tablir de distinction entre les deux catgories, confie chaque institution le soin de prvoir les modalits de mise en uvre du principe dgalit. La Commission et le Parlement ont gnralis le recours trois langues de travail : le franais, langlais et lallemand. Le Conseil assure une traduction dans les 20 langues officielles pour les runions politiques, favorise lutilisation de langues relais le franais et langlais pour les runions de travail, et a galement mis en place un systme de traductions " la demande", laissant chaque pays le soin dtablir ses priorits de traduction dans la limite dune enveloppe financire gale pour tous. Dans la pratique, langlais simpose souvent comme lunique langue de communication. Face ce constat, la Francophonie sest engage activement dans lapplication dun plan pluriannuel en faveur du franais au sein des institutions europennes, sign le 11 janvier 2002 (voir article n505). Au sein de lespace francophone, la dfense du plurilinguisme est galement devenue depuis quelques annes une priorit. En Afrique o le franais cohabite avec de nombreuses autres langues maternelles, promouvoir le franais lcole sans sappuyer sur une alphabtisation dans les langues nationales utilises la maison a finalement paru non seulement incohrent mais aussi inefficace. Depuis 1994, une exprimentation dcoles bilingues franais-langue nationale conduite au Burkina Faso sest ainsi avre trs heureuse en termes de russite scolaire. La Francophonie se range galement de plus en plus lide que le plurilinguisme est une cl daccs un meilleur dveloppement aussi bien conomique que dmocratique. Ce combat pour le respect de la diversit men par la Francophonie comme par lUnion europenne parle tous les hommes. Ce que lcrivain Edouard Glissant souligne ainsi : Le divers du monde a besoin des langues du monde. * Laetitia Lefaure * In Trait du Tout-Monde, Paris, Gallimard, 1997, p.121. | |||
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