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13/10/2006
Immigration : lAfrique du Sud face au continent

(MFI) Depuis la fin de lapartheid en 1994, lAfrique du Sud a renou avec le reste du continent : son isolement a pris fin avec lavnement de la dmocratie sud-africaine, et les autorits nationales ont dverrouill les frontires. Lafflux brutal de migrants suscit par cette ouverture pose aujourdhui une question : quelle politique dimmigration sud-sud mener ?

Avec la fin de lapartheid en 1994, lAfrique du Sud a clbr non seulement sa rconciliation interraciale mais aussi sa rconciliation avec le reste du continent. Durant lapartheid, le gouvernement de Pretoria faisait figure de paria et tait boycott par les autres gouvernements africains. Cet isolement a pris fin avec lavnement de la dmocratie sud-africaine et, en mme temps quelles raffirmaient leur africanit (le clbre discours I am African ! du prsident Thabo Mbeki), les autorits nationales ont dverrouill les frontires.
La richesse et la rputation du pays ont conduit un afflux brutal de migrants venus de la sous-rgion mais aussi du reste de lAfrique : les entres dtrangers enregistres, donc lgales, sont passes de 3,7 millions en 1992 9,9 millions en 1999 et, ct de limmigration traditionnelle des Zimbabwens, Mozambicains, Botswanais, Swazis et Basothos, des communauts de Somalis, Congolais, Nigrians, Sngalais se sont constitues dans la plupart des mtropoles. Comme dans la plupart des pays, le comptage des trangers fait lobjet de controverses chiffres : les calculs voluent entre 2,5 et 12 millions dtrangers, soit entre 5 % et 25 % de la population sud-africaine ! Rien quentre la police et le ministre des Home Affairs, la fourchette est large : la premire estime quil y a entre 2 et 3,5 millions dtrangers dans le pays tandis que le second penche pour un chiffre proche de 5 millions. Trs vite, cette immigration intra-africaine qui tait le signe de la normalisation diplomatique est devenue un problme.

Toute la gamme habituelle des strotypes xnophobes

Lopinion publique sud-africaine adhre, en effet, toute la gamme habituelle des strotypes xnophobes : les trangers sont ainsi dnoncs comme des job stealers , des voleurs demploi pour 58 % des Sud-Africains, sinon des criminels ayant des spcialisations nationales (le trafic de drogue pour les Nigrians, le braquage pour les Zimbabwens, le vol de btail pour les Basothos, etc.) Les principaux problmes du pays (le chmage et la criminalit) sont ainsi imputs aux trangers africains et, dans une moindre mesure, la nouvelle immigration chinoise.
Des vagues de violence populaire localise clatent donc rgulirement contre les autres Africains dans les townships : leurs logements sont brls pour les faire partir comme Zandspruit en 2000 ou Pretoria en 2006, ou ils sont tout simplement assassins (dans les townships du Cap, une vingtaine de Somalis ont t tus entre aot et septembre 2006 !). En outre, comme ailleurs, la politique dexpulsion en masse des immigrs clandestins est la fois inefficace et contestable. Inefficace car les clandestins des pays voisins qui constituent la majorit des migrants (Zimbabwens et Mozambicains) reviennent presque immdiatement et contestable car les conditions de mise en uvre de la politique dexpulsion sont drastiques (les centres de dtention sont saturs, les procdures juridiques ne sont pas respectes et les cas de corruption et de mauvais traitements par la police sont frquents, selon Human Rights Watch, qui a dailleurs consacr un rapport* ce problme). Perue comme une terre de cocagne, lAfrique du Sud attire les candidats limmigration : sa situation migratoire vis--vis du reste du continent est similaire celle de lEurope vis--vis de lAfrique, ceci prs que la politique de rapatriement en masse quelle mne ne suscite dopposition ni en interne, dans lespace national, ni en externe dans les pays dorigine des migrants.

* Human Rights Watch : Southern African Migration Report (1998).

Thierry Vircoulon

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