| |||
27/10/2006 | |||
Questions internationales : les Etats-Unis (2) Barthlmy Courmont : Laprs-Bush a dj commenc | |||
(MFI) Spcialiste des Etats-Unis auprs de lInstitut des relations internationales et stratgiques, Barthlmy Courmont relativise les chances des dmocrates aux scrutins de mi-mandat. Selon lui, rpublicains comme dmocrates pensent dj et surtout llection prsidentielle de 2008. | |||
MFI : La dfaite des rpublicains est-elle crite ? Barthlmy Courmont : Cest difficile affirmer. Il est certain que le taux de sympathie pour les dmocrates est largement suprieur celui en faveur des rpublicains. On pourrait mme parler douragan dmocrate. Cependant, les lections au Congrs sont des lections locales et les enjeux locaux priment parfois sur les enjeux nationaux. En outre, on ne vote pas partout pour les snatoriales. Une personne qui se dit favorable aux dmocrates dans un sondage nhabite peut-tre pas une circonscription o lon vote. Les sondages sont donc manier avec prcaution. La certitude est que les rpublicains vont perdre du terrain et que les dmocrates vont simposer comme le premier parti au niveau national. Mais cela ne signifie pas quils vont lemporter dans les deux chambres. Sur quels critres les lecteurs vont-ils se prononcer, les questions intrieures ou la politique trangre ? Dune manire gnrale, les habitants des grandes villes se prononcent en fonction des questions nationales et internationales, alors que les lecteurs des zones rurales sont plus sensibles aux enjeux locaux. Lconomie, la rforme du systme de sant, limmigration restent des questions intrieures essentielles pour les lecteurs. Ce quon appelle les affaires, comme les scandales de corruption qui touchent des lus rpublicains ou laffaire Mark Foley, nauront de consquences que dans les circonscriptions des intresss. La seule affaire qui regarde toute lAmrique est la mauvaise gestion de louragan Katrina. La particularit de ces lections de mi-mandat est limportance quy occupe la guerre en Irak, alors quhabituellement les lecteurs sintressent peu la politique trangre. Mais aujourdhui, chaque Amricain se sent concern par le sort des troupes en Irak. Les blogs de soldats sont lus par des millions dinternautes. Les dclarations contradictoires des autorits sur la suite du conflit irritent les lecteurs. Les propos de George Bush comparant les guerres en Irak et au Vietnam ont eu un retentissement considrable. Cela renforce le camp des anti-guerre. Cest pourquoi la Maison blanche a cherch corriger le tir, en disant que George Bush navait jamais envisag de dfaite comme au Vietnam, mais quil avait juste compar le rejet de la guerre par les populations irakienne et vietnamienne. On sent depuis quelques mois que les rpublicains veulent se dmarquer de George Bush. Ils critiquent de plus en plus le conflit irakien, surtout son cot financier et humain. Mais cette stratgie ne marche gure. Les rpublicains restent associs George Bush et font les frais de son impopularit. Dune manire plus gnrale, on peut se demander si rpublicains comme dmocrates ne sont pas tents par la stratgie de la dfaite pour ces lections de mi-mandat, par lide quil vaut peut-tre mieux perdre les lgislatives de novembre 2006 afin de navoir aucun bilan prsenter donc aucune critique potentielle essuyer , et ainsi mieux envisager la prsidentielle de 2008. Cela signifie-t-il que laprs-Bush a dj commenc ? Certainement. Les hommes politiques amricains sont dj dans la logique de laprs-Bush. La campagne pour 2008 va commencer au lendemain de ces lections au Congrs. Le rsultat va conditionner le choix du candidat dmocrate. Sera-t-il trs gauche comme Howard Dean ou plus centriste comme Hillary Clinton ? De mme, une large dfaite des rpublicains imposera une stratgie de rupture complte par rapport George Bush, donc un candidat plus modr. Au contraire, si les rpublicains limitent la casse, un candidat conservateur pourrait simposer. George Bush lui-mme apparat libr des contingences partisanes. Il sait que cest son dernier mandat et dit plus facilement ce quil pense. Ainsi il reste trs radical sur la lutte contre le terrorisme, plus progressiste en ce qui concerne limmigration, et assez lucide sur lIrak lorsquil ose cette comparaison avec le Vietnam. Si les dmocrates remportent la majorit dans les deux chambres, quelles seront les consquences sur la politique trangre des Etats-Unis ? On va se retrouver dans un scnario de cohabitation o les deux acteurs le prsident rpublicain et le Congrs dmocrate vont sans cesse se renvoyer la responsabilit des problmes et des dcisions impopulaires. A deux ans de llection prsidentielle, personne ne va vouloir prendre dinitiative. Cest donc limmobilisme qui risque de lemporter. En outre, les dmocrates nont pas normment dides en politique trangre. Ils sont certes moins favorable lunilatralisme que George Bush, mais que cela va-t-il signifier concrtement ? Concernant lIrak, ils ne vont pas assumer la responsabilit dune dfaite en retirant les troupes immdiatement. Ils ne vont pas non plus relancer la guerre. Ils ne prendront donc aucune dcision majeure. | |||
Propos recueillis par Jean Piel | |||
|