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| 16/04/2007 | |||
| Questions internationales (3) A. Van Genderen : Un exode comme le Moyen-Orient nen a jamais connu | |||
| (MFI) Astrid Van Genderen est porte-parole du HCR, en charge de la confrence des 17 et 18 avril 2007 sur les rfugis irakiens. Elle dresse un tableau trs sombre de la situation et appelle la mobilisation internationale pour rsoudre un drame qui, selon elle, va saggraver et durer encore des annes. | |||
| MFI : Quesprez-vous comme rsultat de cette confrence sur les rfugis irakiens ? Astrid Van Genderen : Notre objectif est une meilleure prise de conscience de la communaut internationale sur le drame des rfugis irakiens. Il ne sagit pas daborder des questions politiques, diplomatiques, encore moins militaires ; nous ne sommes pas l pour nous prononcer sur la lgitimit ou non de lintervention amricaine. Notre seule proccupation est humanitaire. On compte aujourdhui 4 millions de rfugis irakiens, soit ltranger soit dans leur propre pays. Leur situation est souvent dramatique. Or cest un drame qui risque de durer longtemps car on ne voit aucune pacification lhorizon en Irak. Certains de ces rfugis ne retourneront jamais dans leur pays. En ralit, la communaut internationale est consciente du problme, mais sa raction est trop prudente. Nous-mmes, au HCR, avons tard intervenir car nous pensions que cet exil serait temporaire, que les gens allaient revenir chez eux. Nous ralisons aujourdhui quil nen est rien. Nous faisons face un exode de millions de personnes, comme le Moyen-Orient nen a jamais connu, qui va probablement saccentuer et durer des annes et des annes. Il faut donc prvoir des structures daccueil sur le long terme. Cest pourquoi le deuxime objectif de cette confrence est ladoption dun plan daction en faveur des rfugis irakiens. Quel sera ce plan ? Il est trop tt pour le dire. Tout dpend de lengagement des Etats, mais aussi des principales ONG et des institutions internationales. Tout ne peut pas reposer sur les gouvernements. Il faut une bonne coordination des actions, une synergie entre ce que peuvent faire les associations humanitaires et les Etats. La certitude est que cela va se chiffrer en centaines de millions de dollars. MFI : Le HCR souhaite-t-il que les Etats-Unis et lUnion europenne accueillent plus de rfugis irakiens ? AVG : Evidemment. Il est choquant quune grande puissance nouvre ses portes qu quelques centaines de rfugis tandis que la Syrie, pays aux ressources limites, en hberge plus dun million. Mais il ne faut pas se faire dillusion ; jamais les Etats-Unis ni lUnion europenne naccueilleront plusieurs centaines de milliers dIrakiens. Mais ils doivent ouvrir plus largement leurs frontires. Il est essentiel que la communaut internationale partage le fardeau de cet exode. On ne peut pas laisser la Syrie et la Jordanie en assumer tout le poids. Cela serait injuste. Cest en outre impossible et mme risqu humainement, financirement et politiquement puisquil en va de lquilibre de ces deux pays. Cest aussi contre lintrt des Irakiens eux-mmes. Damas et Amman en effet namliorent pas leurs structures daccueil par crainte que cela ne cre un appel dair vers plus de rfugis. Cependant, linstallation dans cette rgion est prfrable ; pour des raisons linguistiques et culturelles, pour des raisons de proximit favorables la scurit de lexode et un ventuel retour. Outre la Syrie et la Jordanie, lEgypte, le Liban et les Emirats devraient se montrer plus accueillants. Partager le fardeau signifie que lhbergement de rfugis irakiens en Syrie par exemple pourrait tre financ par un pays europen, que des ONG pourraient ouvrir des cliniques mobiles ou des coles sous tentes en Jordanie, que des institutions internationales pourraient envoyer sur place des mdecins ou organiser des formations professionnelles. La logique est encore une fois celle de la synergie entre tous les acteurs Etats et ONG , de la conjonction des actions. Il ne faut pas oublier que, si les premiers rfugis irakiens taient plutt aiss, on voit arriver aujourdhui des personnes beaucoup plus modestes et qui ont tout perdu. MFI : Quen est-il des Irakiens exils dans leur propre pays ? AVG : Ce sont eux qui connaissent la situation la plus prcaire et la plus dangereuse. Pour des raisons de scurit, les quipes du HCR prsentes en Irak ne peuvent pas tous les atteindre pour leur porter assistance. Beaucoup de ces rfugis de lintrieur ont tout perdu ; leur maison a t brle, leur argent et leurs objets personnels vols Souvent, un des membres de la famille a t tu. On rencontre ainsi beaucoup de veuves avec de jeunes enfants. Des groupes extrmistes les ont chasss de chez eux pour unifier religieusement les villes et les quartiers. Leur fuite a souvent t traumatisante ; chaque check-point est une menace. En gnral, ces personnes se rfugient chez des proches. Mais la solidarit a des limites. Les capacits daccueil de nombreuses familles sont dpasses, faute dargent pour nourrir tout le monde, faute de pices pour hberger chacun. Le gouvernement irakien offre 200 dollars chaque famille qui reviendrait chez elle et il a adopt un plan de scurit renforc Bagdad le 14 fvrier. Mais cela na pas tari lexode ni fait revenir les familles. Comme me le confiait un Irakien : Je crois aux miracles et aux contes de fes, pas en la capacit du gouvernement dassurer la scurit Bagdad. Selon les statistiques du HCR, on compte 1,8 million de rfugis lintrieur de lIrak dont 80 % sont originaires de Bagdad ; 4 millions de personnes en Irak dpendent de laide alimentaire internationale ; 70 % nont pas accs leau et 23 % des enfants souffrent de malnutrition. On croise de plus en plus denfants des rues, et la moiti des enfants rfugis ne vont pas lcole. On assiste actuellement au sacrifice dune gnration entire. | |||
| Propos recueillis par Jean Piel | |||
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