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| 15/05/2007 | |||
| Questions internationales (2) Hati, un pays gangren par la violence | |||
| (MFI) Assassinats et kidnappings sont monnaie courante en Hati. Fruit de la misre et de linstabilit politique, la criminalit affole les habitants et menace les efforts de la communaut internationale et des nouvelles autorits hatiennes. Ces dernires semaines cependant, les Casques bleus de la Minustah ont renforc leur rpression contre les gangs qui terrorisent Port-au-Prince. | |||
| Scne de rue Port-au-Prince : une femme qui sort de la banque o elle est alle retirer de largent est abattue de deux balles dans la tte par des voleurs qui senfuient sans tre inquits. Au mme moment, un colier, fils dun mdecin de la capitale, est enlev devant sa classe ; il sera libr moyennant ranon deux jours plus tard, non sans avoir t tortur. Enlvements et impunit pnale Mme si certains la disent en baisse, la criminalit bat des records en Hati ; une criminalit la fois cause et consquence de tous les maux de lle. Des quartiers entiers de Port-au-Prince sont des zones de non-droit o des gangs font rgner la terreur. Des meurtres, souvent lis au trafic de drogue, ont lieu en plein jour sans que personne nintervienne. Les enlvements sont devenus une industrie nationale. Entre dbut janvier et fin avril, 424 personnes ont t kidnappes : des trangers membres dONG, de riches Hatiens, des prtres, mais de plus en plus souvent des fonctionnaires, des jeunes cadres Tous ceux dont la famille et les amis pourront payer une ranon de quelques centaines ou milliers de dollars. Le nombre de kidnappings est bien plus lev, mais les gens nosent pas porter plainte. Tant de policiers sont lis au crime organis. Les habitants de Port-au-Prince vivent dans la peur de se faire tuer, cambrioler, de voir leurs enfants enlevs. Les plus riches peuvent soffrir des gardes du corps, pas les petites gens qui souffrent le plus. Il sera difficile de rsoudre rapidement cette inscurit , salarme Rose-Marie Auguste, la responsable dun centre de soins communautaire. Edmond Mulet, le patron de la Minustah, le reconnat aussi : La criminalit est proccupante. Elle met en pril les efforts de la communaut internationale et des autorits hatiennes pour stabiliser le pays. Jamais le pays ne pourra sortir de ses difficults avec une telle dlinquance. Cette criminalit est lie au chmage et la misre. Elle sexplique aussi par la certitude de limpunit dans un pays o policiers et magistrats sont corrompus. Elle tient enfin la culture de la violence qui gangrne la vie politique depuis des dcennies. De nombreux leaders politiques autoproclams disposent de leur propre milice arme qui glisse vite du coup de main pour leur patron au banditisme pur et simple. Le traitement social de la criminalit Le gouvernement de Ren Prval a initi diffrentes actions pour lutter contre ce flau. Prvu initialement pour rintgrer la vie civile les ex-militaires, son Programme dapaisement social dot dun budget de 120 millions de dollars a t tendu la cration demploi et des formations dans les bidonvilles o svissent les gangs les plus violents. Paralllement, le projet Dsarmement Dmobilisation Rintgration, inaugur en octobre 2006, offre en change du dpt des armes par les milices et les gangs criminels des micro-crdits pour la cration dentreprises et des programmes de formation. Quelques semaines aprs, plusieurs membres dun gang du bidonville de Bel-Air ont remis leurs armes aux forces de lordre. Mais ce succs initial ne doit pas masquer lchec du projet DDR. Les armes dposes taient hors dusage. Elles taient si vieilles quelles en taient dangereuses pour leurs utilisateurs , raconte Daniel Ladouceur, un officier canadien de la Minustah. La stratgie du gouvernement a chou, ajoute Serge Gilles, prsident du Parti social-dmocrate, pourtant membre de la coalition au pouvoir. Il y a trop de carotte et pas assez de bton. Des tueurs suivent un apprentissage pendant la journe et, le soir, retrouvent leur gang pour commettre attaques et kidnappings. Ce programme, en outre, donne un sentiment dimpunit. Des personnes qui ont du sang sur les mains reoivent des crdits alors que leurs victimes nont droit rien. Cest insupportable. Renforcer la rpression Malgr les critiques, Ren Prval entend poursuivre langle social de sa politique de lutte contre la criminalit. Ce qui ne lempche pas davoir renforc larsenal rpressif. Le chef de la police, Mario Andrsol, a dj rvoqu 168 agents et 53 autres sont sous les verrous. Un millier de policiers devraient faire les frais de ce plan dpuration qui vise liminer les agents les plus corrompus et ceux notoirement lis aux gangs ou au trafic de drogue. Un temps critiqus pour leur inaction, les Casques bleus ont renforc leurs interventions dans les quartiers sensibles de la capitale. En fvrier, ils ont repris le contrle du quartier de Boston. Le mme mois, trois chefs de gangs de Cit Soleil qui avaient transform ce bidonville de 200 000 habitants en un vritable coupe-gorge ont t arrts. Il y a peu encore, symbole de linscurit en Hati, Cit Soleil est aujourdhui largement pacifi ; les ONG y travaillent et la police y patrouille. Le 5 mai enfin, cest au tour de Jean Eoldy Torchon alias Blade Nasson , le boss du quartier du Linteau II, dtre apprhend par les soldats de lOnu. Dans toutes ses oprations, la Minustah qui a perdu 20 hommes depuis 2004 est accompagne par des agents de la police nationale, preuve du soutien renforc des autorits hatiennes la lutte contre linscurit. Juste aprs le dpart forc du prsident Jean-Bertrand Aristide en fvrier 2004, le pays a sombr dans la guerre civile. La Minustah nosait pas sattaquer aux gangs car chacun saffirmait proche dun leader politique, donc dun possible futur dirigeant dHati. Depuis llection de Ren Prval, le pouvoir est clairement identifi, et les gangs apparaissent bien comme des bandes criminelles. Il est donc possible aux Casques bleus de les cibler, mme si ces gangs sont redoutablement bien arms et organiss , explique Jean-Claude Bajeux, le prsident du Centre cumnique des droits de lHomme, Port-au-Prince. La situation reste nanmoins minemment volatile. Comme le racontait au quotidien Le Monde un mdecin de MSF Port-au-Prince : Lorsque la criminalit baisse Cit Soleil, elle augmente Martissant, et vice-versa. Au seul mois de mars, nous avons soign 220 blessures par balle. Dans la moiti des cas, les victimes taient des femmes ou des enfants. | |||
| Jean Piel | |||
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