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MFI HEBDO: Politique Diplomatie Liste des articles

11/09/2007
Quel avenir pour les relations franco-africaines ?

(MFI) Places par le nouveau prsident franais Nicolas Sarkozy sous le sceau de la rupture avec le pass et du changement , les relations franco-africaines restent privilgies mais non prioritaires dans une politique trangre qui se veut avant tout europenne, pro-amricaine avec des nuances et ouverte aux pays mergents, nouveaux acteurs importants de la mondialisation.

La politique trangre labore par lElyse, et particulirement son volet africain, a t au cur des discussions huis clos de la XVe confrence annuelle des ambassadeurs de France tenue Paris fin aot 2007, runion marque par plusieurs discours officiels aussi bien du prsident que du Premier ministre Franois Fillon et du ministre des Affaires trangres Bernard Kouchner. Elle a aussi t au centre des interventions de deux hommes, rivaux de fait sur lAfrique malgr leurs dclarations lnifiantes : le ministre charg de lImmigration, de lIntgration, de lIdentit nationale et du Co-dveloppement Brice Hortefeux et le secrtaire dEtat la Coopration et la Francophonie Jean-Marie Bockel, qui dpend des Affaires trangres (voir article ci-joint).
LAfrique restera une priorit essentielle de notre politique trangre et un axe central de la politique de coopration de lUnion europenne , a affirm cette occasion le prsident franais pour qui la construction de lEurope restera la priorit absolue de notre politique trangre . Pour Nicolas Sarkozy qui prsidera le 25 septembre 2007 une runion du Conseil de scurit sur les conflits en Afrique, lAfrique a tout pour russir dans la mondialisation et la France veut ly aider , en maintenant ses engagements en dpit des difficults qui pseront sur le budget de 2008 . Il na toutefois pas donn dobjectifs chiffrs, comme lavait fait son prdcesseur Jacques Chirac, et de nombreuses incertitudes psent sur lavenir de laide publique au dveloppement (APD) qui, en outre, diminue mondialement en raison de la fin des annulations de dette, qui ne concourent plus aux bons chiffres de ces dernires annes.

Une normalisation rclame depuis longtemps

Cette nouvelle politique africaine, qui reste encore dfinir prcisment malgr les effets dannonce, est diversement accueillie sur le continent. Lors de son premier dplacement en Afrique subsaharienne fin juillet, Nicolas Sarkozy avait suscit lire de plusieurs intellectuels francophones en voquant Dakar limaginaire du paysan africain o tout recommence toujours et o il ny a de place ni pour laventure humaine, ni pour lide de progrs . Sadressant aux jeunes dAfrique , le prsident franais avait affirm que sils voulaient sortir de larbitraire, de la corruption, de la violence, du parasitisme et du clientlisme , ctait eux de le dcider .
Bon nombre dAfricains rclament depuis longtemps une normalisation des relations avec lancienne puissance coloniale, lheure o ils sont sollicits par de nouveaux partenaires comme la Chine ou lInde. Mais ils se demandent si le souci affirm dune politique dimmigration restrictive ne prendra pas le pas sur laide au dveloppement. Parmi les voix critiques, celle de lancien chef dEtat malien Alpha Oumar Konar, prsident de la Commission de lUnion africaine, qui estime que le discours de Dakar nest pas le genre de rupture avec le pass souhaite, mme si lappel la jeunesse africaine est important. Ce discours nest pas nouveau en Afrique. Beaucoup de dirigeants africains le tiennent, les jeunes Africains le savent et beaucoup de ces jeunes depuis longtemps se battent , a-t-il dit, estimant que Nicolas Sarkozy a besoin de mieux connatre lAfrique.
De son ct, Hubert Vdrine, ancien ministre des Affaires trangres du prsident socialiste Franois Mitterrand, dans un rapport sur la mondialisation prpar la demande de lElyse, a mis en garde contre les tentations dabandon dune politique africaine. Il nest que de voir lengagement croissant en Afrique de la Chine et des tats-Unis. La solution dite deuropanisation ne peut tre que partielle, ou alors cest un leurre et une dmission , a-t-il dit, prconisant de se mettre rellement lcoute des Africains.

Toujours une cellule africaine lElyse et des sommets

Dans une lettre de mission adresse Bernard Kouchner, qui doit prparer dici fin juin 2008 un Livre blanc sur la politique trangre de la France, Nicolas Sarkozy voque la cration, terme, dun ministre de la Mondialisation pour la diplomatie franaise. Il prconise aussi une nouvelle politique de coopration et daide au dveloppement, estimant que laide franaise doit tre concentre sur certaines priorits y compris lAfrique et les secteurs de la sant, de lducation et du dveloppement durable travers des projets concrets et visibles. Parmi les nouveauts figure la rorganisation du dispositif de coopration. Nicolas Sarkozy, qui a propos la cration dun service civique obligatoire, veut redonner une dimension ambitieuse mais dans un contexte profondment renouvel au rseau des cooprants franais ltranger et rformer le systme dassistance technique.
Pour le moment, lElyse "new look" garde bien une cellule africaine, mme si elle est place sous la supervision du conseiller diplomatique et non plus sous celle, directe, du chef de lEtat. De mme, le principe des sommets France-Afrique est maintenu malgr limportance particulire accorde aux confrences euro-africaines. De toute faon, les Africains sont demandeurs de toute rencontre bilatrale ou multilatrale, sommets Etats-Unis/Afrique, Chine/Afrique, Japon/Afrique, Amrique latine/Afrique et mme Luxembourg/Afrique, si cela tait le cas , affirme un diplomate chevronn.

La Cte dIvoire et le Tchad pourraient ne plus accueillir de troupes franaises

Une des nouveauts est laccent renforc mis sur le soutien lUnion africaine pour quelle puisse assurer un jour le maintien de la paix dans le continent. Paris poursuit ainsi leuropanisation de son dispositif de formation des Africains au maintien de la paix (Recamp), amorc depuis quelque temps. Et reste aussi attache la rforme de son dispositif militaire en Afrique entame sous Jacques Chirac. Ce dispositif qui vise appuyer au besoin les brigades africaines venir dans les diffrentes rgions du continent, est centr autour de Dakar, Libreville, Djibouti et la Runion. Ainsi la Cte dIvoire, et peut-tre mme un jour le Tchad ce qui parat hypothtique tant que durera le conflit du Darfour et linscurit dans la rgion pourraient ne plus accueillir de troupes franaises.
Sur le plan politique, la France prserve ses liens avec tous ses partenaires, "vieux lphants" ou "jeunes lions". Il semble toutefois que Nicolas Sarkozy, qui a accueilli solennellement Paris lancien prsident sud-africain Nelson Mandela, hros de tout un continent, mise beaucoup sur linfluence politique et le poids conomique de lAfrique du Sud. Dautant que celle-ci fait partie du lot des pays mergents comme la Chine, lInde, le Brsil et le Mexique que le prsident franais souhaite voir siger un jour au sein dun G8 transform en G13.
La France, qui sest pose en championne des plus pauvres, sest toujours appuye sur les Africains pour asseoir son influence au sein des instances internationales. Si elle veut jouer la grande puissance, elle aura peut-tre encore besoin deux au sein du G8 ou ailleurs , souligne un diplomate. Il fait aussi valoir que les ressources du continent attisent bien des convoitises. Si la France na pas dindustrie minire, elle a quand mme besoin duranium pour son nuclaire et souhaite comme tout le monde avoir accs des rserves stratgiques en ptrole et en gaz , souligne-t-il.

Marie Joannidis

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