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25/09/2007
Questions internationales (2)
Les relations troubles entre Pkin et les firmes amricaines du Net


(MFI) Les quatre principales firmes amricaines du Net sont accuses de collaborer avec les autorits chinoises afin de censurer le Web et surveiller les cyberdissidents . Les accuses invoquent des arguments commerciaux pour leur dfense et soulignent quelles permettent des millions de Chinois davoir accs Internet.

Fvrier 2006 : une commission de la Chambre des reprsentants Washington convoque les dirigeants de quatre grandes entreprises informatiques amricaines, Cisco Systems, Yahoo, Google et Microsoft. Elle les accuse de collaborer avec les autorits chinoises pour censurer Internet et favoriser larrestation de cyberdissidents . Cest le portail Yahoo qui concentre les critiques. Il aurait en effet communiqu la justice chinoise des informations personnelles sur Wang Xiaoning et Shi Tao, deux journalistes qui, sur leur blog hberg par Yahoo, appelaient des rformes dmocratiques dans lEmpire du milieu. Arrts en 2003, ils ont t condamns dix ans de prison pour incitation la subversion du pouvoir de lEtat . Ils sont actuellement dtenus la prison n2 de Pkin, de sinistre rputation. Rponse pour le moins hypocrite des dirigeants de Yahoo : Nous avons en effet fourni ces informations personnelles, mais simplement par respect de la loi chinoise. Nous ignorions lusage que les autorits en feraient.

Une aide au filtrage des sites

Premier producteur mondial de routeurs , ces quipements dacheminement des donnes sur le Net, Cisco Systems est souponn pour sa part davoir aid les fournisseurs daccs chinois paramtrer leur matriel de faon en faire des outils de blocage et de surveillance. Il aurait galement vendu du matriel de filtrage la police. Quant Microsoft, Google et Yahoo, ils reconnaissent avoir ferm des blogs de dissidents sur ordre des autorits chinoises, et cr des moteurs de recherche en mandarin qui se plient aux exigences de la censure. Sur Google.cn, les sujets qui fchent les dirigeants sont soigneusement redirigs. Les recherches sur des mots-cls comme droits de lhomme ou dmocratisation renvoient directement aux positions officielles du gouvernement chinois. En aot 2007, Microsoft, Google et Yahoo ont nouveau sign le pacte dautodiscipline impos par Pkin qui vise protger les intrts de lEtat chinois et interdire la diffusion de messages illgaux .

Les affaires sont les affaires

Sans tats dme, les entreprises informatiques amricaines justifient leur collaboration avec les autorits chinoises par des raisons commerciales. La Chine est le march qui reprsente aujourdhui la plus forte marge de croissance. Nous devons y tre prsents, et pour cela nous devons respecter la loi chinoise. Nous ne faisons pas de journalisme ; nous sommes dans le business de la communication , a ainsi dclar John Marcon, le vice-prsident de Yahoo, devant la Chambre des reprsentants. Lespace dans lequel nous oprons est trs comptitif. Si nous noffrons pas ce que les clients nous demandent, ils sadressent ailleurs , a ajout pour sa part Vint Cerf, le directeur de la recherche de Google. Bref, pour gagner de largent, tous les moyens sont bons, mme ceux qui foulent aux pieds les rgles de la dmocratie.

La censure, un moindre mal

Pour attnuer leurs propos trs les affaires avant tout , les dirigeants des principales firmes amricaines du Net affirment que collaborer avec une dictature est un moindre mal. Le pire serait que ces pays crent leurs propres rseaux ferms, ce qui entranerait la fin dInternet en tant que rseau plantaire. Nous prfrons permettre un maximum de Chinois daccder un maximum dinformations, quitte censurer certains lments dont les autorits ne veulent pas , se justifie Vint Cerf. Impossible de nier en effet quInternet en Chine est devenu un formidable relais des attentes de la socit civile, dans le domaine de la sant comme dans celui de lducation ou de la justice sociale. Mme avec 40 000 policiers affects la surveillance de la Toile, les autorits ne peuvent pas contrler tous les contenus. Au demeurant, les hommes politiques amricains nont gure plus de courage que les chefs dentreprises. Des lus dmocrates au Congrs ont en effet dpos un projet de loi visant interdire aux entreprises amricaines de traiter avec les gouvernements qui censurent Internet. Il na pas t adopt. Sans nous, Internet nexisterait pas en Chine , plaident les cyber-socits amricaines. Sans vous, Internet existerait en Chine, et la censure serait moins efficace , rplique lOng Human Rights Watch.
Reste quune procdure judiciaire est en cours contre Yahoo aux Etats-Unis, initie par des dissidents chinois reprsents par lOng World organization for human rights. Leur but est de faire condamner le portail pour complicit dans larrestation de Wang Xiaoning et Shi Tao. Ces relations ambigus entre les autorits chinoises et les firmes amricaines du Net font que le slogan invent par Sergey Brin, le crateur de Google, pour son moteur de recherche Dont be Evil (Ne fais pas le mal) sonne aujourdhui un peu creux.

Jean Piel

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