Rechercher

/ languages

Choisir langue
 
Liste des rubriques
MFI HEBDO: Politique Diplomatie Liste des articles

20/05/2008
Crises touargues (1)
Vers un sommet rgional sur la scurit sahlo-saharienne


(MFI) A lissue dun intense ballet diplomatique, lAlgrie a enfin accept le 19 mai la tenue dun sommet rgional pour tenter de mettre un terme aux rbellions du Nord Mali et du Nord Niger. Elle a aussi accept de reprendre sa place de mdiateur dans le dossier malien. Les rbellions avaient attis les rivalits entre mdiateurs algriens et libyens tandis que les instances rgionales, saisies de la question, tardaient agir.

Alors que linquitude ne cessait de crotre au Mali et Niger, o sur le terrain les accrochages se multipliaient dans les rgions septentrionales, entre rebelles touaregs et armes malienne et nigrienne, les gouvernements respectifs semblaient depuis des mois impuissants rsoudre la crise. Maintes fois ritre depuis aot 2007, la proposition dAmadou Toumani Tour dorganiser un sommet des chefs dEtat sur linscurit ne parvenait pas se concrtiser. Le prsident malien voulait rassembler les cinq pays de la bande sahlo-saharienne (Mauritanie, Algrie, Libye, Mali, Niger) pour trouver des solutions communes aux problmes dune rgion qui est aujourdhui, selon ATT, le thtre de nombre dactivits illicites, allant de trafics en tout genre au proslytisme religieux .
La proposition malienne avait reu un cho favorable en Mauritanie, en proie aux attaques sporadiques de groupes prsums affilis la branche arme dAl-Qada au Maghreb islamique, venant dAlgrie. Sous prtexte que les zones frontalires de ces Etats trs permables et largement inaccessibles abritent des rseaux terroristes, un projet amricain de quadrillage du Sahara sest dploy paralllement travers la Pan-Sahel initiative et la Trans-Sahara Counter Terrorism Initiative (TSCI), en vue officiellement daider les forces de scurit des pays riverains.
A Ouagadougou, le 21 janvier 2008, une proposition conjointe des prsidents maliens et nigriens dorganiser une telle confrence rgionale avant la fin mars avait t adopte par les chefs dEtat lors dun sommet de la CEDEAO, pour qui cette crise sahlo-saharienne entrave la libert de circulation des personnes et des biens et favorise le trafic de drogue et darmes lgres dans la zone o de surcrot le trafic de cigarettes est supplant par celui des migrants clandestins jug plus lucratif.
Le Burkina, qui assure la prsidence en exercice de la Communaut et qui avait jou un rle central dans la rsolution de la grande rbellion touargue (1990-1996) aurait voqu la question lors du passage du secrtaire gnral de lONU, Ban ki-Moon, mi-avril. Sans suite. Les Nations unies sont pourtant informes des dangers encourus. Un rapport de lECOWAS (2005) indiquait quaprs la crmonie de la Flamme de la paix, au Mali, en 1996, la plupart des armes avaient pris des chemins de traverse, de la Sierra Leone la Cte dIvoire ou la Mauritanie. Sans parler des rseaux qui en acheminent de nouvelles vers le Nord, via le fleuve Niger par exemple : elles voyagent en toute quitude sous la coque des bateaux.

Interminable querelle de leadership entre mdiateurs libyens et algriens

En fait, le blocage de la tenue de ce sommet tait d linterminable querelle de leadership que se livrent en sous-main les mdiateurs libyens et algriens dans la zone stratgique de Kidal, au Nord-Mali, o le ptrole pourrait jaillir en 2008 et o la prsence duranium vient dtre prouve par une socit australienne. Leur rivalit stait exacerbe aprs la visite du Guide libyen Tombouctou en avril 2006. Promettant dinvestir dans la rgion, il avait ordonn louverture dun consulat Kidal au grand dam des Algriens, galement trs actifs pour contrer les salafistes de lex-GSPC, qui auraient fait aussi de ce secteur une base arrire.
En mai 2006, lAlliance dmocratique du 23 Mai pour le changement, mouvement bas dans la rgion, se disait subitement mcontente de lapplication du Pacte national de 1992 et attaquait deux camps militaires Kidal et Menaka. La mdiation algrienne, appele la rescousse par le Mali, aboutit en juillet 2006 la signature de laccord dAlger - au terme duquel les rebelles sengageaient respecter lintgrit du territoire malien et le gouvernement de Bamako acclrer le dveloppement du Nord. LAlliance avait ensuite affront les salafistes pour les chasser du Nord-Mali.
Mais au printemps 2007, les attaques ont repris. Et aprs une scission, un nouveau groupe, lAlliance touareg Niger-Mali lanait fin aot des attaques armes dune intensit nouvelle, enlevant notamment une cinquantaine de personnes - dont les dernires ont t libres dbut mars 2008 grce une mdiation libyenne. Or le prsident algrien Abdelaziz Bouteflika qui stait dit prt, lors de la visite du prsident Tour en Algrie, le 27 novembre, apporter son concours la tenue dun sommet des pays du voisinage, stait engag uvrer pour la libration de ces otages.

LAlgrie, partenaire incontournable dans le rglement durable de la crise du Nord

Laffaire stait encore corse le 20 mars 2008, quand Ibrahim Ag Bahanga, principal chef rebelle, avait enlev nouveau une trentaine de militaires maliens, avant de signer le 3 avril Tripoli un cessez-le-feu avec le gouvernement malien. Alger suspendait alors sa mdiation prtextant des critiques formules son encontre dans la presse pro-gouvernementale malienne. Depuis, les missaires maliens font le pied de grue Alger. Lopposition mene par Tiebil Dram, ainsi que les cadres de Kidal, rclamaient corps et cri le retour de lAlgrie, partenaire incontournable dans le rglement durable de la crise du Nord. Une demande relaye par les journaux algriens et mauritaniens, qui ont ouvert largement leurs colonnes aux chefs rebelles favorables cette option.
La demande tait dautant plus pressante que les rebelles sopposaient au redploiement progressif de larme malienne dans lextrme nord malien. Des groupes arms non reconnus par Ibrahim Ag Bahanga avaient frapp dbut mai, laissant prsager une multiplication des fronts rebelles. Sans oublier que lassassinat dun commandant touareg de larme malienne avait provoqu le dpart, avec armes et bagages, de nombreux lments pralablement intgrs de lAlliance du 23 Mai.
Selon le journal algrien El Khabar, le Premier ministre libyen Al Baghdadi Ali Al Mahmoudi, en visite Alger le 17 mai, aurait t inform par son homologue algrien Abdelaziz Belkhadem de lembarras des autorits algriennes aprs lintervention libyenne dans le processus de paix malien, qui aurait rendu caduc laccord dAlger. Deux jours plus tard, le ministre malien des Affaires trangres, Moctar Ouane, enfin reu Alger, et porteur dun message officiel dans le cadre de la scurit dans la sous-rgion , est pourtant parvenu ses fins. LAlgrie est revenue en force dans la mdiation. Et a donn son feu vert la tenue du fameux sommet.

Antoinette Delafin

retour