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| 04/11/2008 | |||
| Questions internationales (2) Le Caillou, un environnement protger | |||
| (MFI) La Nouvelle-Caldonie est une rserve exceptionnelle de biodiversit. Son rcif corallien vient dtre inscrit au patrimoine mondial de lUnesco. Mais lindustrie du nickel menace lenvironnement tant terrestre que maritime. Dilemme : elle assure aussi larchipel son fort taux de croissance. | |||
| Des plages de sable blanc, une eau turquoise, des forts dun vert meraude, un ciel toujours bleu La Nouvelle-Caldonie cultive une image de paradis environnemental. Et elle le peut. Larchipel est considr comme un point chaud de la biodiversit, le troisime au monde en nombre despces endmiques, faune et flore confondues. Quon en juge : 3 380 espces endmiques de plantes, 106 de reptiles, 23 doiseaux et 4 000 dinsectes. Sous leau, les poissons, crustacs et coquillages propres la rgion se comptent par centaines. Et encore ne connat-on que 20 % des espces sous-marines , prcisent les scientifiques de lIRD, lInstitut de recherche pour le dveloppement de Nouma. Les dangers et les atouts du nickel Mais la Nouvelle-Caldonie abrite aussi 25 % des rserves mondiales de nickel. Depuis 2002, le cours du minerai bat des records, assurant au Caillou ainsi quon surnomme la Nouvelle-Caldonie un taux de croissance annuel de prs de 6 % et un quasi-plein emploi. Or la dfense de lenvironnement et lexploitation du nickel font rarement bon mnage. Le spectacle dune mine ciel ouvert le prouve : la fort ventre sur des dizaines de mtres de profondeur, des carrires sans fond, des millions de mtres cubes de rsidus jets flanc de collines, acclrant lrosion et creusant des ravines, une eau rougetre qui coule directement dans le lagon, pourtant considr comme lun des plus beaux du monde. Sur la cte est de la Grande terre, Houalou, une norme coule de boue, qui a dval dune exploitation de nickel, a tout dtruit sur son passage, modifi le cours de deux rivires, avant daller recouvrir le plateau corallien en contrebas. Mme les trottoirs de certains quartiers de Nouma sont recouverts dune pellicule de poussire rouge venue de carrires distantes de plusieurs kilomtres. Selon les statistiques officielles, les surfaces dgrades par les mines stendent sur quelque 20 000 hectares. Mais les mmes statistiques voquent les milliers demplois crs par le minerai. Dveloppement conomique ou protection de lenvironnement : le dilemme est ancien. Il na plus de raison dtre. Les deux sont aujourdhui conciliables. Nous avons deux richesses, le nickel et la biodiversit ; elles peuvent cohabiter , estime Isabelle Ohlen, la vice-prsidente du Congrs, le Parlement caldonien. Certes, les obligations de respect de lenvironnement imposes aux compagnies minires sont plus strictes quavant, mais elles restent des industries terriblement invasives contre la nature. Les Kanaks nacceptent plus de subir la pollution. Ils veulent que les socits minires se comportent autrement. Comme la loi est insuffisante ou peu respecte, lquilibre stablit au bon vouloir des industriels , observe Philippe Faivre, le grant dune socit spcialise dans la revgtalisation des sites miniers. En effet, certaines entreprises minires nont mme pas de service ddi lenvironnement. La rsistance des Kanaks Longtemps, les Kanaks, les premiers habitants de larchipel, nont pas eu voix au chapitre. Ils taient dpossds de leurs terres et subissaient directement les effets de la pollution, sans jamais tre consults ni indemniss. Leurs villages, leurs aires coutumires, leurs sites sacrs ne pesaient gure face aux millions investis par les multinationales. La situation est diffrente aujourdhui. Non seulement parce que, partout, la dfense de lenvironnement est devenue un enjeu majeur. Mais aussi parce que, depuis les accords de Matignon et Nouma, les droits politiques, conomiques et culturels des Kanaks sont mieux pris en considration. En tmoigne le conflit parfois violent qui a oppos pendant cinq ans populations kanaks et associations cologistes la firme Goro-Nickel, filiale du gant brsilien Val. Cette dernire a investi 3,2 milliards de dollars dans la construction dune usine dune capacit annuelle de 60 000 tonnes de nickel et 5 000 tonnes de cobalt. Mais le chantier a longtemps t bloqu car lusine se situe dans une rgion la biodiversit maritime et terrestre exceptionnelle. En outre, un tuyau dvacuation des effluents du site plongeait directement dans la mer. Nous craignons que les poissons soient contamins. Le lagon, cest notre garde-manger depuis des millnaires. Ce tuyau traverse en outre les terrains coutumiers de nos anctres , expliquait alors, au quotidien Les Nouvelles Caldoniennes, Joseph Ma, le reprsentant coutumier de lle Ouen. Un accord a finalement t trouv le 30 septembre dernier. Il prvoit la cration dun comit consultatif coutumier environnemental et plusieurs mesures de protection de la nature, mais aussi un volet en faveur de la dfense de la culture kanak et des programmes de formation et de dveloppement de lconomie locale. Au total, Goro Nickel versera 84 millions deuros sur trente ans. Ce nest pas un contrat forc, mais une dmarche innovante. Nous voulons promouvoir la participation des populations locales au dveloppement durable. Nos projets miniers sinscrivent dans le respect de lenvironnement et la valorisation conomique et sociale des alentours , assure Michel Sylvestre, le directeur de la firme, sur lantenne de RFO. Certains anti-indpendantistes estiment que les Kanaks abusent des rfrences au sacr et aux terres de leurs anctres pour gagner de largent sur les entreprises minires. Dautres rappellent que les habitants originels de la Nouvelle-Caldonie sont toujours rests proches de la nature et des traditions, et quil ny a aucune raison quils soient spolis de leurs terres par des industries polluantes sans compensation. Un rcif corallien au patrimoine mondial de lUnesco Au-del des mfaits du nickel, la Nouvelle-Caldonie, comme toutes les les du Pacifique, sinquite du rchauffement climatique. Llvation du niveau des mers aurait des effets dsastreux sur les ctes et les cosystmes marins, en particulier sur la formation du corail. Les cyclones risquent de sintensifier, do de nouvelles menaces sur lagriculture, lhabitat et la vgtation des zones ctires. Mais le rchauffement mettrait aussi en pril lintrieur des terres, notamment la fort sche qui ne stend plus que sur 60 km alors quelle reprsentait 4 500 km il y a des centaines dannes. Cette fort sche lieu dune biodiversit exceptionnelle a t mise mal par lurbanisation, les feux de brousse et lagriculture. Le rchauffement climatique ne reste nanmoins quune menace long terme ; les scientifiques nont pas constat dlvation alarmante du niveau des mers ces dernires annes autour de la Nouvelle-Caldonie. Quelles que soient les inquitudes, lenvironnement est globalement prserv dans larchipel. La pression dmographique est faible, avec seulement 12 habitants au km. Les moyens existent puisque sept rserves maritimes et 25 rserves terrestres ont t cres ces vingt dernires annes. Des rserves o il est parfois interdit de chasser, de cueillir des plantes, de couper du bois, de pcher, damarrer un bateau. Dans les les Loyaut, la notion de rserve nexiste pas, mais les pratiques coutumires interdisent laccs certaines zones. Les croyances ou lhistoire de tribus protgent de nombreux espaces. Preuve de cet environnement prserv : le 7 juillet 2008, 15 000 des 23 000 km du rcif corallien ont t inscrits au patrimoine mondial de lUnesco. Il sagit du deuxime plus grand rcif corallien au monde aprs celui de lAustralie, et les scientifiques reconnaissent sa beaut exceptionnelle, lincroyable diversit des poissons et mammifres marins qui y vivent, lexcellent tat de conservation du corail. Les herbiers et la mangrove qui lentourent sont aussi remarquables. Tous les responsables locaux ainsi que les associations cologistes se sont flicits de cette reconnaissance par lUnesco. Ils esprent que cela permettra dencore mieux protger le rcif, mais aussi dattirer davantage de visiteurs frus dcotourisme ou de plonge sous-marine. Mais pour Nidoish Naisseline, lu kanak des les Loyaut : Cette inscription au patrimoine mondial de lUnesco ne doit pas tre larbre qui cache la fort. La rglementation minire reste insuffisante, et la Nouvelle-Caldonie a besoin dune politique globale de protection de la biodiversit. | |||
| Jean Piel | |||
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