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14/07/2009 | |||
Parlement francophone des jeunes Conventions collectives : le long chemin des journalistes dAfrique | |||
(MFI) Pas moins de sept conventions collectives des journalistes ont t adoptes, ces dernires annes, dans les pays dAfrique francophone. Cest laboutissement dun long et difficile processus. Mais aussi le commencement des choses srieuses | |||
Journalisme, un mtier haute prcarit. Cest spcialement vrai en Afrique o la faible organisation du secteur fait des journalistes et des autres employs de la presse de parfaits acteurs du secteur informel. Depuis longtemps, les acteurs des mdias rclament la mise en place de conventions collectives des journalistes, destines favoriser lamlioration des conditions de travail des journalistes et des travailleurs des mdias , en participant la structuration de ce secteur, la promotion de la paix sociale dans les entreprises de presse et au dveloppement de ces dernires , selon les termes de lOrganisation internationale de la Francophonie, trs active sur ce terrain. Le problme est connu : tout le monde, ou peu prs, veut de la convention collective, sauf les premiers concerns : les patrons de presse, peu soucieux de voir imposer leurs fragiles entreprises des contraintes rglementaires auxquelles elles ne peuvent faire face. Les ngociations portant sur llaboration de conventions collectives font partie des rituels bien rods auxquels la profession sadonne, selon les pays, depuis bien plus dune dcennie. La sensibilisation a fini toutefois par porter ses fruits : outre le Sngal (ds 1991), sont advenues ces dernires annes les conventions collectives du Bnin, de Cte dIvoire, du Tchad et du Cameroun : en novembre 2008 pour ce dernier pays, aprs trois annes de discussions mouvementes et de faux rendez-vous. Ensuite un tir group, dbut 2009 : ctait le tour du Burkina-Faso et du Congo, en janvier. Enfin au Mali, pays longtemps rtif en raison de la faible structuration conomique des mdias, une convention a t adopte en mars dernier, ceci pour lanniversaire de la rvolution de 1991 : tout un symbole ! En prvision : la Rpublique dmocratique du Congo a lanc le processus, et le Niger sy prpare. Partenaires extrieurs : un rle daccompagnement crucial Les partenaires internationaux ont t des acteurs cruciaux dans cette dynamique : cest le cas en particulier de lOIF et de la Fdration internationale des journalistes (FIJ), en appui notamment aux organisations rgionales de journalistes. Partenaires qui ont eu, indique Emmanuel Adjovi (OIF), un rle daccompagnement passant par la ralisation dtudes sur les conditions de travail des journalistes, lorganisation de concertations nationales et rgionales entre les acteurs des mdias sur le statut et les conditions de travail des journalistes, la mise en place de conventions collectivescadre sur le plan rgional (Afrique de lOuest et Afrique centrale)(1), lorganisation de sessions de formations nationales et rgionales sur les techniques de ngociations collectives, la mise disposition dexperts pour appuyer les processus de ngociations et lappui lorganisation des ngociations. Sur le papier, tout va mieux Sur le papier, tout va mieux : les conventions collectives offrent de multiples garanties aux journalistes, en dfinissant selon les pays des grilles de salaires, un systme de protection sociale tendu et des amliorations notables des conditions de travail (prise en charge des frais, formation), sans oublier des protections en matire de dontologie : ainsi un journaliste peut-il refuser de rdiger un article de nature publicitaire. Tout va mieux, mais sur le papier seulement : les conditions relles dexercice sont si alatoires que les sceptiques jugent la plupart des dispositions inapplicables. Et il suffit de demander aux confrres sngalais ce quils pensent de la mise en uvre de leur vieille convention collective, dans un contexte de dgradation du secteur maintes fois dnonc. On a un avant-got de la mise en uvre des conventions collectives avec la situation au Cameroun. Ici, quelques patrons de presse ont commenc se conformer au code nouvellement en vigueur, gnralement en se concentrant sur un alignement progressif des salaires sur la grille de la fonction publique. Mais ils sont encore peu nombreux faire la dmarche, et le chantier nest quesquiss. Surtout, les entrepreneurs conditionnent cet effort un soutien de lEtat, par le truchement du systme daides la presse. On connat les aides directes (la subvention annuelle distribue entre quelques grands acteurs du secteur), dont il est souhait quelles aillent dsormais aux entreprises mritantes ; mais on attend surtout les aides indirectes : avantages fiscaux, exonrations, appuis la formation et lquipement, etc. De ce point de vue, lEtat est la peine, quel que soit le pays. Dans le meilleur des mondes, les conventions collectives finiront par tre appliques, et les journalistes pourront envisager sereinement de partir la retraite. Notre confrre sngalais Mademba Ndiaye poussait, il y a peu, un cri dalarme ce propos, constatant les conditions de vie trs dgrades de ses pairs atteints par la limite dge : Les journalistes la retraite sont tous obligs de continuer exercer dune faon ou dune autre, parce que leur niveau de retraite ne permet pas quelquun de vivre dcemment. Thierry Perret (1) Telle la convention-cadre adopte Dakar en 2004 pour lAfrique de lOuest, finalise et amende par un arrt-modle de convention, valable pour la Cedeao, en avril 2008. Convention collective : mode demploi (vertueux) (MFI) La mise en uvre dune convention collective nallant pas de soi, il y faut des conditions pralables, note Emmanuel Adjovi, responsable de programme mdias lOrganisation internationale de la Francophonie (OIF) : la premire condition rside dans la structuration relle des mdias. Celle-ci pose la question de la reprsentativit des syndicats et celle de la viabilit des entreprises. Il faut une reprsentativit des syndicats pour peser dans la balance face au patronat. Les syndicats peuvent demander des clauses dapplication de CCN quand elles existent. Quand ce nest pas le cas, le syndicat peut demander lOIT linsertion dune clause. Plutt que de dlimiter gographiquement le primtre daction, il a t propos de se focaliser sur les entreprises de presse, avec la ncessit de renforcer les syndicats pour quils puissent faire face quelle que soit lentreprise. La structuration est galement garante de la viabilit des entreprises. Pour assurer cette prennit des entreprises, il convient de rglementer, dorganiser et de structurer le march publicitaire. La mise en place dun systme dallocation des ressources publicitaires (prives comme institutionnelles) en fonction des performances et des audiences des entreprises de presse. On peut galement envisager dagir sur les multinationales qui sintressent de plus en plus aux mdias. Un partenariat est donc ncessaire linternational pour faire des pressions tous les niveaux. Le deuxime facteur qui conditionnera la russite du projet porte sur le renforcement des syndicats. En Afrique, les syndicats sont rarement subventionns. Il convient dencourager les Etats et les organisations internationales pour quils contribuent financirement au dveloppement des syndicats. Il faut renforcer les capacits des structures syndicales. Cela commence par le renforcement des liberts syndicales et du droit de ngociation collective dans les accords- cadre. Il sagit dun minimum. Propos recueillis par T. P. | |||
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