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01/12/2009
Une stratgie francophone pour Copenhague L'agriculture, enjeu crucial

(MFI) A 95 % dpendante de la pluviomtrie, l'agriculture africaine est dangereusement expose aux changements climatiques qui menacent la scurit alimentaire des populations africaines, qui aux deux tiers dpendent directement de l'agriculture et de la foresterie. C'est pourquoi le volet agriculture occupe une place centrale dans le projet NECTAR.

L'avertissement mane de Jean-Pascal Van Ypersele, vice-prsident du GIEC : Dans les rgions tropicales et subtropicales arides et subhumides (en particulier en Afrique) o les cultures sont dj proches de leur seuil de tolrance la chaleur et la scheresse, l'augmentation des tempratures et la rduction des prcipitations risque de rduire et de faire chuter le rendement moyen, dj bas, des exploitations agricoles. En particulier les petites exploitations familiales qui n'ont pas les moyens d'investir dans de coteux systmes d'irrigation . De son ct, dans un rapport paru en septembre 2009, l'International Food Policy Research Institute (IFPRI), bas Washington, montre que l'adaptation aux changements climatiques et la scurit alimentaire sont deux problmatiques troitement lies : Toute activit consistant adapter l'agriculture aux dfis du rchauffement climatique peut amliorer la scurit alimentaire. Inversement, toutes actions en faveur de la scurit alimentaire des petits producteurs leur permettant d'accrotre leurs revenus les aideront s'adapter au changement climatique . Partageant un tel constat, les Francophones plaident pour que la question agricole soit un point central des ngociations sur le changement climatique.

Des responsabilits communes mais diffrencies

Les changements climatiques menacent l'humanit entire, mais la diffrence des entreprises et consommateurs des pays industrialiss et mergents, la priorit pour la petite agriculture du Sud n'est pas d'adopter des moyens de production moins polluants, tant sa part dans les missions globales passes et prsentes est rduite , signale le sociologue Franois Polet, du Centre Tricontinental de Louvain-la-Neuve en Belgique. Aussi doit-on s'interroger sur la solution des mcanismes de dveloppement propre dont se flicite la communaut internationale, alors que cette solution ne vise pas tant prparer les pays pauvres au dfi du rchauffement climatique qu' offrir un degr de flexibilit aux pays dvelopps essayant d'atteindre leurs objectifs de rduction d'mission de CO2. En revanche, pour les millions de paysans confronts la diminution de la pluviomtrie, il s'agit d'adopter des techniques agricoles permettant de produire autant sinon plus, dans des conditions difficiles, en amliorant la capacit des sols retenir l'eau, en oprant un travail de slection des semences et des espces animales moins gourmande en eau .

Les changements climatiques risquent d'affecter substantiellement les rendements agricoles en Afrique subsaharienne : diminution de 15 % pour le riz, 34 % pour le bl et 10 % pour le mas, selon les projections de l'IFPRI. Pour faire face cette situation, la plupart des experts appellent un accroissement de la production et donc des investissements publics dans la recherche, les infrastructures, l'irrigation. L'IFPRI value 7 milliards de dollars par an le cot d'une telle adaptation, indiquant que la priorit doit tre donne l'Afrique sub-saharienne - 40% du total -, et notamment l'investissement dans les infrastructures routires. Dans le mme sens, dans l'tude sectorielle sur l'agriculture du projet NECTAR , Mamadou Khouma et Yacine Badiane Ndour (de l'Institut sngalais de recherches agricoles, l'ISRA) concluent que les ngociateurs africains doivent insister sur la ncessit d'avoir un fonds spcial pour l'agriculture et les forts dont les procdures d'accs seraient simples. Ils doivent aussi insister sur l'accs aux technologies gnres en dehors de l'Afrique et directement applicables faible cot .

Des modles d'agriculture en concurrence

Si les experts et les politiques s'accordent sur la ncessit d'accrotre les investissements dans l'agriculture, la question fondamentale qui se pose est de savoir qui ces investissements vont profiter et pour quels usages , souligne le professeur Franois Collart Dutilleul, l'un des spcialistes europens du droit agroalimentaire. Deux modles s'affrontent : le premier prne une vision productiviste et libre-changiste qui encourage une agriculture de rente de type agro-exportatrice favorable aux multinationales. Le second est centr sur la souverainet alimentaire et promeut une agriculture familiale de type vivrire respectueuse de l'environnement. Force est de constater que le volet agriculture du projet NECTAR reste relativement silencieux sur cette pineuse question qui divise les Etats. Mais il s'agit seulement d'une tude prliminaire de NECTAR sur l'agriculture. L'tude approfondie sera disponible prochainement. Toutefois, les chercheurs de l'ISRA prcisent qu' en Afrique sub-saharienne, la priorit doit tre donne des actions alliant agriculture de conservation et agro-foresterie pour augmenter le stockage du carbone, protger la biodiversit, assurer la subsistance des populations et enrayer la dsertification . Un premier pas ?

Face au bilan ngatif du Sommet mondial sur la scurit alimentaire (16-18 novembre 2009), le dfi des Francophones pourrait consister faire des ngociations climatiques une vritable opportunit de dveloppement pour les paysans africains. Comme le souligne l'tude sectorielle, l'largissement du march du carbone la protection des forts et l'agriculture pourrait offrir de nouvelles incitations aux petits producteurs tout en leur permettant de participer l'effort mondial de rduction des missions des gaz effet de serre, principal moteur des changements climatiques .

Olivier Rabaey

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