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26/01/2007
Sida : les gels microbicides en 5 questions

(MFI) Des immunologistes brsiliens viennent dannoncer quun gel microbicide anti-VIH, utilisant les principes actifs dune algue marine, est en cours dexprimentation. Ce produit pourrait venir concurrencer dautres microbicides qui ont dj une longueur davance. Petit tour dhorizon.

1. Y a-t-il plusieurs formules en cours dexprimentation ?

Oui. Les difficults mettre au point un vaccin font que des chercheurs investiguent dautres moyens dviter le sida. Depuis le lancement en 1998 de la Campagne mondiale pour les microbicides (finance par plusieurs pays du Nord, des organisations internationales et la Fondation Gates), des accords ont t signs avec plusieurs grands laboratoires pharmaceutiques pour mettre au point des formules une quinzaine ce jour permettant dinclure des antiviraux dans des gels vaginaux. Parmi celles-ci, Carraguard, Cellulose Sulfate Gel et Pro 2000 en sont la phase 3 (la plus avance) des essais cliniques ; ceux-ci ont t raliss dans plusieurs pays dAfrique notamment (Afrique du Sud, Nigeria, Bnin, Ouganda, Tanzanie et Zambie). Dautres essais sont en cours ou prvus au Zimbabwe, au Malawi, au Cameroun, au Rwanda, au Kenya.

2. Comment agiraient les microbicides ?

La plupart ont t conus sous forme de doses de gel introduire dans le vagin avant chaque rapport sexuel, ou bien une fois par jour. Parmi les produits de deuxime gnration , le TMC 120, qui contient lantirtroviral dapivirine, serait utilis sous forme danneau vaginal muni dun rservoir diffusant le produit actif en continu. Aprs essais in vitro (en laboratoire), la quantit diffuse parat suffisante, et la toxicit pour des cellules de muqueuse en culture juge faible mais rien ne dit que le produit se comportera de la mme manire in vivo. Des essais sur plus de 10 000 femmes dmarrent cette anne en Afrique du Sud et en Ouganda. Restera, ensuite, valuer lapparition de rsistances long terme, comme pour tous les antirtroviraux. Une grande difficult pour les chercheurs rside dans le fait que les mcanismes molculaires de la fusion du virus avec les cellules de la zone gnitale ne sont pas encore tout fait compris.

3. Comment sont raliss les essais cliniques ?

Lorsque tous les essais in vitro jugs ncessaires ont t complts, des femmes srongatives sont recrutes pour tester les produits. Le Partenariat international pour des microbicides (www.ipm-microbicides.org) a dit des Lignes directrices pour les essais cliniques prvoyant le consentement clair de toutes les participantes, qui doivent tre informes des risques. En cours dtude, les participantes aux essais cliniques de lIPM passent rgulirement des tests de dpistage du VIH. Pour celles qui contractent le virus au cours dune tude, il est prcis quelles recevront un traitement antirtroviral et des soins adquats () dont lIPM assumera le cot jusqu ce que le traitement soit disponible auprs dun programme national ou dune autre source . Mais il nest prvu aucune compensation. Par ailleurs, lIPM estime quil est moralement appropri de dpister les infections sexuellement transmissibles parmi les volontaires et de leur fournir des soins adquats. Le traitement des ITS est en soi une importante mesure de rduction du risque dinfection par le VIH. Etude ou pas, ce dernier point demeure important, quil sagisse de sida ou de cancer du col de lutrus.

4. Quelles sont les principales difficults surmonter ?

Une fois que des molcules anti-VIH ont fait leurs preuves in vitro, il faut les combiner et dterminer la quantit de principes actifs ncessaires laction de barrage ou de modification de la chimie vaginale. Ceci sans que le produit soit dangereux pour la muqueuse : un premier essai large chelle avec le nonoxynol-9, un dtergent dj utilis dans des spermicides, attaquait tellement la muqueuse que les chercheurs avaient conclu un risque accru de vulnrabilit au VIH ! Il faut aussi vrifier que la protection non toxique sera active dans un contexte de scrtions et de flore normales, ce qui ncessite des concentrations values entre mille un million de fois plus importantes. De plus, le produit doit tre agrable lusage, dune action prolonge afin que les femmes lutilisent comme elles le souhaitent, et pas cher. Dans un article dtaillant ces difficults, le Dr Robin Shattock, du St Georges Hospital Medical School de Londres, sinterroge aussi sur la relle volont davancer : Les microbicides sont vus comme un domaine peu sexy par les chercheurs. Quant aux enjeux commerciaux, les grands laboratoires ne les jugent pas assez attractifs.

5. Quelle protection peut-on attendre des microbicides ?

Les scientifiques esprent mettre au point un produit efficace 50 % ou 60 %. Cest aussi le but annonc du Brsilien Castello Branco, chercheur de longue date sur le VIH et la tuberculose, qui annonce pour 2008 le dbut dtudes sur humains dun gel base dalgue marine Dictyota pfaffi. En fait, deux diterpnes extraits de cette algue ont t retenus comme principes actifs. Les diterpnes sont des molcules contenues dans de nombreuses plantes, algues et champignons. On les trouve aussi bien dans le safran que dans les conifres ; elles sont plus concentres dans les rsines ainsi que, aprs distillation, dans certaines huiles essentielles (en mdecine naturelle, celles-ci sont dj utilises, sous forme dovules, pour protger le milieu vaginal de bactries, virus ou champignons). Dune manire gnrale, les terpnols agissent contre les bactries et les virus tout en renforant le systme immunitaire. Les possibilits de trouver des molcules actives sont donc nombreuses. Les rsultats de la recherche pour le moment assez maigres. Concernant les produits en cours dtudes qui dans lidal devraient aussi protger de plusieurs virus et MST ils pourront venir sintgrer dans une stratgie prventive plus globale. Mais les femmes nen disposeront pas avant plusieurs annes.

Henriette Sarraseca

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