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16/04/2007
Michel de Lorgeril : Le cholestrol nest pas un serial killer !

(MFI) Cardiologue et chercheur franais mondialement reconnu, rendu clbre en 1994 pour sa participation ltude de Lyon sur les bienfaits des acides gras omga 3, Michel de Lorgeril met en garde contre lobsession du taux de cholestrol. Il sadresse au public, aux mdias, ainsi quaux nombreux mdecins mal informs sur la question.

A qui profite le crime ? Lintrt presque obsessionnel que lon porte au taux de cholestrol est une source de profits considrables pour les industries pharmaceutique et agro-alimentaire , et donc une source aussi de cots astronomiques pour lAssurance maladie ainsi que pour les particuliers dans les pays o celle-ci nexiste pas. Pire : dun point de vue scientifique et mdical, limportance du cholestrol sur le risque de dcs prmatur ou sur lesprance de vie a t considrablement survalu , nous dit Michel de Lorgeril, cardiologue et chercheur au CNRS. Et il explique que, contrairement une ide chre aux mdecins biologistes, il ny a pas de valeur normale stricte pour des paramtres comme le cholestrol, lhmoglobine, les lymphocytes, le fer srique, la frquence cardiaque ou la pression artrielle, mais plutt des valeurs mdianes : une zone qui ne peut tre rduite un chiffre talon pour tous les habitants de la plante, zone au-del ou en-de de laquelle il peut en effet y avoir maladie. En termes plus simples : trop haut, ce nest pas bon pour la sant, trop bas non plus. Il faudrait donc relativiser et tenir compte aussi dautres paramtres. Laffirmation selon laquelle plus le cholestrol est bas et mieux cest pour notre sant (et notre esprance de vie) ne relve daucune rationalit biologique ou physiologique , crit M. de Lorgeril dans un article et un livre paratre (1). En consquence, le postulat selon lequel il nous faut tout prix diminuer notre cholestrol pour protger notre sant et amliorer notre esprance de vie est faux.

Tabac, diabte et mort subite cardiaque

Certes, rappelle-t-il, les maladies cardiovasculaires demeurent lune des premires causes de mortalit dans le monde, et elles sont souvent fatales : globalement, les victimes dun infarctus en meurent une fois sur deux. Mais la part de MSC (mort subite cardiaque) est de plus en plus importante parmi ces maladies. Aux Etats-Unis, par exemple, chez les personnes de 35 55 ans, la MSC reprsentait 75% des dcs cardiaques en 2002. Or, sappuyant sur des tudes pidmiologiques ralises dans ce pays, le cardiologue note que le cholestrol ne semble pas associ au risque de MSC. A linverse, le diabte et le tabac semblent de faon systmatique des facteurs prdictifs . Que nous apprennent cet gard les essais cliniques randomiss avec des traitements anti-cholestrol ? La diminution du cholestrol obtenue fait-elle baisser le risque de MSC ? Curieusement, constate le mdecin, la grande majorit de ces essais ne donne aucune information sur ce point. Les auteurs ont-ils oubli den parler ? Oubli dinclure ce diagnostic ? Quelle que soit la rponse, a ne fait pas trs srieux
Quen est-il des traitements anti-cholestrol utiliss en prvention primaire, cest--dire quand une personne nest pas malade mais quon juge son taux de cholestrol trop lev ? On constate quils ne semblent pas induire deffet significatif sur le risque de dcs, quelle quen soit la cause . Quen est-il des fameuses statines, gnralement prsentes de faon triomphale par les investigateurs et les laboratoires et dont certaines ont d tre retires de la vente en raison de leurs effets secondaires graves ? Au vu des plus rcentes tudes, le mdecin conclut quen prvention primaire elles nont pas deffet significatif sur la mortalit cardiovasculaire.

Des millions de traitements injustifis

Pour conclure, M. de Lorgeril concde que, chez certains groupes particuliers (hommes jeunes avec un taux trs lev, situation de post-infarctus, diabtiques avec cholestrol lev et certaines hypercholestrolmies familiales malignes), il se peut que certains mdicaments aient un effet, modeste souligne-t-il, sur la mortalit. Mais, en prvention primaire, il constate que la baisse du taux de cholestrol na pas deffet significatif sur la mortalit, que ce soit chez les hommes et les femmes dge moyen, ou mme chez les plus de 70 ans. Si on prend limage du serial killer, on peut se demander pourquoi faire tant de bruit sur les succs des policiers quand le nombre de victimes reste dsesprment stable.
Rien ne justifie donc, selon ce spcialiste, que 6 millions de Franais (et des dizaines de millions de patients ailleurs dans le monde) consomment longueur danne des molcules anti-cholestrol dans lespoir damliorer leur esprance de vie ce qui ne veut pas dire quelle nest pas amliorable ! Si on veut vraiment se protger des maladies cardiovasculaires, et en particulier de la mort subite cardiaque, il est urgent de considrer dautres facteurs que le cholestrol dans toute stratgie prventive . Ces autres facteurs, on le sait par ailleurs, tiennent la nutrition, la pollution, lexercice physique, au stress, aux motions, au mode de vie de chacun.

Henriette Sarraseca
(daprs Chol-Doc, lettre dinformation du Cerin)



(1) Cholestrol, 50 ans de mensonges (Ed. Axis Mediasciences, disponible en mai 2007). Voir aussi, du mme chercheur, Le pouvoir des omga 3 (Ed. Alpen).



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