| |||
09/05/2007 | |||
VIH : pourquoi lallaitement protge les bbs | |||
(MFI) Une toute rcente tude mene en Afrique du Sud, publie dans le Lancet, apporte une contribution importante sur un sujet controvers. Elle montre que les bbs ns de mres sropositives bnficiant dun allaitement mixte courent deux fois plus de risque dtre sropositifs que ceux allaits exclusivement au sein. Plus grave : si ces bbs reoivent en plus des laits animaux, des bouillies, le risque est onze fois plus lev ! Explications. | |||
A lapproche de laccouchement, la plupart des femmes testes sropositives sont confrontes un choix terrible, douloureux : vais-je ou non allaiter mon bb ? Quest-ce qui, finalement, est mieux pour lui et pour moi ? Que valent les recommandations officielles alors que les scientifiques posent toujours beaucoup de questions sans rponses ? A ce jour, les agences internationales (OMS, Unicef, Onusida) valuent 15 % environ le risque de transmission par lallaitement au sein, mais les chiffres cits vont de 10 % plus de 30 %, selon les diffrents paramtres pris en compte. Il sagit destimations. De plus, le risque a t estim sans diffrencier nutrition au sein et nutrition mixte. Or ce que montre cette tude mene luniversit de KwaZulu-Natal par lquipe de Hoosen Coovadia et Nigel Rollins, cest que lallaitement maternel exclusif (sans aucun autre liquide, y compris leau) est de loin le mode le plus protecteur. Parmi les 1 132 bbs (83% du total) nourris au sein, 19,5% ont t tests positifs avant lge de six mois ; mais, si lon tient compte des transmissions attribues la grossesse et laccouchement, expliquent les chercheurs, la part de contamination via lallaitement chez les bbs srongatifs est estime environ 4 %. Ce rsultat confirme celui de deux tudes prcdentes menes Harare et Durban, qui concluaient 1,3% et 4,4% de risque respectivement. Cest aussi le pourcentage que donnait il y a sept ans le Pr Michael Latham, de luniversit Cornell de New York, se basant sur des documents officiels nord-amricains. Les agences internationales, crivait-il dans le British Medical Journal en juin 2000, ont eu tendance surestimer la part de lallaitement maternel dans la transmission du sida. En Afrique, on lestime moins de 1 % dans les pays faible prvalence de la maladie, et moins de 4 % dans ceux forte prvalence. De plus, ltude de Durban a montr qu trois mois, la nutrition mixte prsente plus de risques que lallaitement exclusif au sein ou par des formules de remplacement dont les risques sont sensiblement quivalents. Pas de bouillies trop tt ! Autres donnes importantes de ltude : trois mois et demi, les bbs recevant outre le lait maternel, un lait maternis du commerce, ont prsent un risque deux fois plus lev dtre sropositifs ; et, cinq mois, ceux qui avaient reu en plus des bouillies de crales (quelles soient prpares la maison ou achetes en magasin) ont prsent un risque onze fois plus lev ! Comment expliquer des carts aussi importants ? Lallaitement exclusif au sein, rappellent les auteurs de ltude, protge lintgrit de la muqueuse intestinale du bb, lui permettant ainsi de constituer une barrire plus efficace face au VIH. A linverse, il se peut que les grosses protines contenues dans le lait de vache et, bien plus encore, dans les aliments solides endommagent cette muqueuse, ce qui rend plus facile la pntration du virus entre ses cellules. Ces protines complexes peuvent aussi modifier les rcepteurs cellulaires, augmentant ladhsion virale et linfection. Ces dysfonctionnements dus une nutrition inadapte tout bb est naturellement programm pour tre nourri par le lait de sa mre pendant de longs mois , sont par ailleurs bien documents aujourdhui, et nombre de scientifiques et de mdecins les considrent lorigine des allergies croissantes et de maladies auto-immunes, entre autres. Sans compter que dautres infections plus ou moins graves, virales et bactriennes, ainsi que dautres perturbations du systme immunitaire peuvent tre favorises par une nutrition trop tt diversifie : celle-ci dsquilibre lcosystme intestinal garant, lui aussi, dune bonne immunit. Il ny a donc pas que le sida en cause. Cest pourquoi les chercheurs tudient aussi les liens entre mode alimentaire et taux de mortalit. La mme tude sud-africaine constate un taux de mortalit trois mois deux fois et demi plus important chez les bbs nayant pas t nourris exclusivement au sein (15 % contre 6 %). Des taux semblables ont t constats au Kenya et au Botswana, mais pas dans les pays dvelopps. Cest que, dans ceux-ci, les facteurs de risque ne sont pas aussi nombreux que dans le Tiers monde o leau contamine, les parasitoses, les co-infections graves, la malnutrition et les dficits importants en vitamines et minraux chez les mres sont courants. Les maladies infectieuses et la malnutrition demeurent les premires causes de mortalit infantile , rappelle lOMS. Or, seul le lait maternel contient certains nutriments indispensables au bb, ainsi que des immunoglobulines pouvant le protger, tant que dure lallaitement, des maladies auxquelles la mre a t confronte. Le lait maternel diminue la mortalit Diverses tudes, notait le Pr Latham, montrent que la mortalit due des diarrhes ou des affections respiratoires aigus, ainsi qu dautres maladies infectieuses, est 5 6 fois plus leve chez les bbs nayant pas t allaits durant les deux premiers mois. Ces tudes ont t menes au Brsil, au Pakistan, aux Philippines, en Gambie, au Ghana, au Sngal. Lorsquon met des recommandations sur les modes nutritionnels, concluent pour leur part H. Coovadia et son quipe, il est donc essentiel de prendre en compte le risque global de mortalit pour le bb, et pas seulement le risque de sropositivit au VIH. Lallaitement au sein demeure une cl de prvention de la mortalit infantile. Mme dans les pays forte prvalence du sida, lallaitement exclusif au sein jusqu lge de 6 mois pourrait viter 13 % des morts chez les enfants de moins de cinq ans. Enfin, deux facteurs importants ne doivent pas tre oublis. Le premier est la sant de la mre elle-mme : toute femme enceinte, toute mre qui allaite a besoin damliorer sa sant par une nutrition optimale et, souvent, par une complmentation en micronutriments (spiruline, etc.). On en est loin, en ralit, dans le Tiers et le Quart mondes. Le second est le facteur motionnel : il ny a l aucune distinction entre riches et pauvres. Lallaitement est motionnellement ncessaire au bb, tout comme, souvent, la mre. Et on sait aujourdhui que le stress et les motions influent aussi sur limmunit. Yinka Jegede-Ekpe, jeune mre sropositive nigriane, vient de faire la Une des magazines de son pays. Heureuse que son bb soit srongatif grce, dit-elle, la stratgie recommande par son mdecin, elle a pourtant dclar : Le plus difficile pour moi a t de ne pas allaiter mon enfant. | |||
Henriette Sarraseca | |||
|