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Culture

Shigeru Ban : Un architecte japonais pour le Centre Pompidou de Metz

par Danielle Birck

Article publié le 06/11/2006 Dernière mise à jour le 06/11/2006 à 19:58 TU

Shigeru Ban, l'un des deux architectes du Centre Pompidou de Metz.(Photo : AFP)

Shigeru Ban, l'un des deux architectes du Centre Pompidou de Metz.
(Photo : AFP)

Shigeru Ban est surtout connu à l’étranger pour l’utilisation de matériaux non classiques, comme le carton, pour ses constructions, qu’elles soient éphémères ou pérennes. Une conception et une technique qui se sont illustrées notamment dans les reconstructions d’urgence après le séisme de Kobe, au Japon, en 1998. S’il ne veut pas être catalogué comme «l’architecte du papier», Shigeru Ban n’en revendique pas moins une légèreté des structures et une fluidité des espaces qu’après avoir appliqué à la maison particulière, il met en œuvre dans le projet du Centre Pompidou-Metz.

«Des paysagistes ont dessiné un jardin et moi j’ai posé un chapeau chinois dessus», cette déclaration de Shigeru Ban à propos du projet du Centre Pompidou-Metz résume assez bien le parti pris de l’architecte japonais. Ce n’est d’ailleurs pas une position isolée au sein de la nouvelle génération des architectes japonais – c'est-à-dire ceux nés autour des années 60 – qui en fait renoue avec la tradition antérieure au XXème siècle et à l’influence occidentale en mettant en avant l’osmose entre le jardin et le bâtiment, entre le lieu et la construction, entre l‘environnement naturel et les matériaux utilisés. Et il n’est pas indifférent que ce retour à la nature soit le fait d’architectes essentiellement citadins, confrontés aux conditions de vie dans les mégapoles surpeuplées du Japon, comme  Shigeru Ban né à Tokyo en 1957. [1]

L’architecture : un engagement social

Shigeru Ban est un des premiers architectes de sa génération à concevoir des espaces de liberté sur des terrains urbains contraignants, par leur exiguïté et/ou  configuration. Depuis vingt ans il n’a cessé d’imaginer, de dessiner, de concevoir des maisons, le lieu idéal à ses yeux pour concilier expérimentation et respect de la fonction primordiale de l’abri, donc de ses habitants. C’est d’ailleurs ainsi qu’il définit son «engagement social». Celui qui s’est formé en grande partie à Los Angeles et à New York, fonde son agence en 1985 et se fait remarquer la même année en réalisant la scénographie d’une exposition entièrement à partir de tubes de carton.

Il délaisse les procédés et matériaux de construction classiques, sans préjugé ni préférence: «Même les matériaux les plus fragiles peuvent faire des bâtiments solides», explique-t-il. Et de citer le carton «un matériau qui devient très résistant sous la forme d’un tube». C’est ainsi qu’il a mis au point après le séisme de Kobe, des méthodes d’auto-construction  permettant de bâtir des abris d’urgence, une église et d’autres installations. Il crée l’ONG Voluntary Architect’s Network et devient  consultant auprès du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

Ses tubes de carton ont également été utilisés pour la réalisation du pavillon japonais à l’occasion de l’exposition universelle de Hanovre en 2000, comme pour la réalisation des bureaux temporaires de son équipe au Centre Pompidou à Paris ou de la Maison du projet du Centre Pompidou-Metz qui permettra aux visiteurs d’accompagner sur place et jusqu’à son achèvement en 2008 la construction du futur Centre.

Le Centre Pompidou-Metz

Un bâtiment fait de bois, de béton, d’acier et de verre, «sans le moindre tube en carton » précise Shigeru Ban qui ne veut pas, dit-il, «être catalogué comme l’architecte du papier». Mais la légèreté devrait être au rendez-vous, avec notamment une immense toiture culminant à 77 mètres, en forme de «chapeau chinois» tressé, réalisée à partir du maillage de fines pièces de bois s’inspirant du travail de vannerie, sur une charpente en acier et en bois. Des plafonds en bois blond, des murs et structures peints en blanc, des sols en béton ciré gris perle devraient accentuer la clarté  donnée par de grands volets de verre, assurant l’interface entre le bâtiment et l’extérieur, tandis que des galeries ouvertes à chaque extrémité offriront des vues panoramiques sur la ville de Metz.

Encore une fois c’est la prise en compte du contexte qui a orienté la conception du bâtiment : c’est parce que le site de Pompidou-Metz était éloigné du centre-ville, qu’il a été décidé que les galeries ouvriraient une perspective sur des éléments importants de la ville comme la cathédrale ou la gare. «En centre-ville, le bâtiment aurait été entièrement différent», précise Shigeru Ban qui avec ce musée du XXIème confirme sa posture internationale. [2]

Architectes japonais en France

Et il n’est pas le seul : c’est le projet d’un cabinet d’architectes japonais qui a été retenu pour la construction de la future antenne du musée du Louvre à Lens dans le nord de la France, dont l’ouverture est prévue en 2009. Après la construction en 2004 du musée d’art contemporain du XXIème siècle dans la ville de Kanazawa au Japon, Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa, fondateurs de l’agence Sanaa en 1995, sont donc les maîtres d’œuvre de ce premier Louvre «décentralisé» à Lens, un projet qui prévoit un ensemble de bâtiments avec des toits terrasses de verre et des façades miroirs d’aluminium, au cœur d’un grand parc.[3] Ils mènent également le projet de l’Institut d’Art moderne de Valence, en Espagne.

Quant à Toyo Ito, il a signé le nouvel hôpital de la Fondation Cognacq-Jay, à Paris, qui a été inauguré le 19 octobre. Pour cette première œuvre en France, Toyo Ito s’est adjoint la compétence de deux autres architectes, Yun Yanagisawa et Manuel Tardits, un Français Tokyoïte, qui avec trois Japonais a fondé l’atelier Mikan. Toyo Ito, né en 1941 en Corée, auteur, entre autres, de la médiathèque de Sendaï et du magasin Tod’s à Tokyo, expose également à Orléans, parallèlement à la 7ème édition d’Archilab.

[1] En  France, l’exposition «Faire son nid dans la ville» qui réunit à Orléans les maquettes de projets  d’une trentaine d’architectes japonais de cette génération, dont Shigeru Ban, donne une idée de l’inventivité et de l’originalité des créateurs nippons.  Une exposition  réalisée dans le cadre de la 7ème édition des Rencontres internationales d’architectures d’Orléans (Archilab), jusqu’au 23 décembre 2006.

[2]On peut consulter le projet sur le site de la mairie de Metz.

[3]On peut consulter la vidéo du projet sur le site du Conseil régional.