par Danielle Birck
Article publié le 28/10/2008 Dernière mise à jour le 17/11/2008 à 16:19 TU
D’autant que les projets présentés s’inscrivent dans le programme INTERREG de l’Union européenne, lequel propose une nouvelle cartographie de l’UE, transcendant les frontières. « On s’est basé sur la dernière version de ce programme qui date des années 1990 et qui a découpé l’Europe en 12 régions, plus exactement des ‘inter-régions’ qui transcendent les Etats Nations et découpent l’Europe d’une façon complètement inédite. Par exemple, en ce qui concerne le nord, on a une région qui réunit l’Allemagne, la Suède, le Danemark », explique Marie Ange Brayer, la directrice du FRAC-Centre et directrice artistique d’Archilab 2008. C’est d’ailleurs grâce à l’expertise du Fonds régional d’art contemporain/Centre en matière d’architecture contemporaine qu’Archilab a pu être mis sur pied, et c’est dans ses locaux, juste à côté de la Collégiale, que commence l’exposition, avec, en guise d’introduction, un ensemble de cartes permettant de visualiser la géographie et l’évolution du programme INTERREG.
C’est à partir de cette cartographie inhabituelle qu’Omar Akbar, directeur de la Fondation Bauhaus à Dessau, en Allemagne, et commissaire de l’exposition, a fait une étude pour dégager les principaux axes des projets – en cours, réalisés, à l’étude, ou tout simplement visionnaires – aujourd’hui dans l’Union européenne.
Le visiteur peut ainsi découvrir plus de 30 villes – capitales économiques, politiques, culturelles ou villes d’échelle moyenne – au travers de projets pour la plupart co-financés par l’Union européenne. Des projets qui d’une manière ou d’une autre mettent en œuvre une « architecture stratégique », c'est-à-dire une architecture qui devient l’instrument d’une « ambition politique et culturelle », précise Marie-Ange Brayer.
« Relabelliser » les villes
Par exemple, Gdansk, la ville portuaire polonaise, entend se redéfinir en tant que « City of Freedom » (ville de la liberté, en référence à la création du syndicat Solidarnosc en 1980) et Capital of Amber (capitale de l’ambre, eu égard à l’importance de cette ressource nationale). Une double « relabellisation » de la ville que traduisent deux projets architecturaux. Côté freedom, l’European Solidarity Center qui comprend un musée, des archives, une bibliothèque, un centre de congrès et d’expositions ; côté Amber, Baltic Arena, le stade pour l’euro 2012, dont la structure porteuse s’inspire de la tradition locale de construction de navires et dont l’aspect extérieur, matière et couleur, évoque l’ambre.
En France, les exemples retenus sont ceux de Lyon Confluence, un projet d’expansion du centre ville, sur une immense friche industrielle au confluent de la Saône et du Rhône, qui va être reconvertie en logements, commerces, musée…Un programme très ambitieux représenté à Orléans avec plusieurs maquettes des projets d’aménagement des docks.
Et puis bien sûr, Marseille et le projet Euroméditerranée sont également présents à Archilab 2008, avec la Cité de la Méditerranée, un ensemble destiné à témoigner du rôle de Marseille comme métropole majeure des échanges culturels et économiques entre Europe et Méditerranée. « Là aussi un projet très ambitieux qui va complètement redimensionner la ville », souligne Marie-Ange Brayer. Marseille, choisie comme capitale européenne de la culture 2013, fait partie d’une inter-région qui comprend les régions côtières du pourtour méditerranéen.
Omar Akbar n’hésitait pas à dire d’emblée, lors de l’inauguration d’Archilab 2008, qu’il en avait « marre des architectes stars » et de leurs constructions qui ont l’air « tombées du ciel ». Tous les projets sélectionnés, en grande partie financés par des fonds européens, s’inscrivent dans une démarche de l’architecture comme « instrument du développement urbain et régional ». Comme ce projet de pont habitable entre Copenhague et Malmö - autrement dit entre le Danemark et la Suède - appelées, avec la ville allemande de Hambourg, à être au sein d'un futur espace économique européen central.
Ce qui n’exclut pas certains « bâtiments iconiques », des monuments urbains, comme par exemple la nouvelle salle de concert qui verra le jour en 2010 à Riga. Conçue par le fameux atelier de Rem Koolhaas, elle s’inscrit dans un projet global visant à faire de la capitale lettone la porte d’entrée économique vers la Baltique, l’Europe de l’est et l’Europe, tout en affirmant son statut culturel.
Urbanisation contrastée
Si l’année 2008 a marqué un tournant dans l’urbanisation de la planète, avec plus de la moitié de la population vivant désormais en milieu urbain, dans les pays développés les villes ont tendance à stagner, et même pour 40% d’entre elles, à perdre de la population.[1] « C’est vrai que l’Europe est confrontée globalement à un vieillissement de la population, un recul démographique, constate Marie-Ange Brayer. Donc, par le biais du programme INTERREG, l’idée sous jacente est de renforcer les pôles forts, mais aussi de développer une politique de la solidarité. Avec des régions ou des villes plus faibles économiquement ». Un diagnostic critique que l’exposition a voulu refléter pour « permettre aux citoyens d’avoir un peu une vision de cette mosaïque qu’on n’arrive que très difficilement à recomposer », conclut la directrice artistique d’Archilab 2008.