Paysages

« Rendez-vous aux jardins », édition 2009

par Danielle Birck

Article publié le 05/06/2009 Dernière mise à jour le 05/06/2009 à 16:18 TU

Après « le voyage des plantes », thème de l’édition 2008, « Rendez-vous aux jardins » met en avant cette année la trilogie « Terre, terrain, territoire ». Une manière de décliner l’histoire des paysages et avec elle, les liens changeants et complexes de l’homme avec la nature. Du 5 au 7 juin 2009, ce sont quelque 2000 parcs et jardins qui sont ouverts au public jusqu’au crépuscule. Cette manifestation organisée par le ministère de la culture et de la communication en collaboration avec le Comité des parcs et jardins de France, bénéficie aussi de la participation du Centre des monuments nationaux, d’associations de propriétaires de jardins ainsi que de propriétaires privés.

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Jardin d'émotions à Epinac
DR

C’est d’ailleurs grâce à ces derniers qu’on pourra par exemple cette année visiter le Jardin d’émotions, à Epinac en Bourgogne, ou le jardin des Vieilles vignes, à Valay en Franche-Comté, un jardin paysager ouvert sur la campagne, inscrit par sa propriétaire dans le cadre du développement durable.

Parmi les autres nouveautés de cette 7ème édition, le public peut découvrir le parc de la maison de Gérard Philippe, à Cergy, dans la région parisienne, avec ses grilles ornées de masques en fer forgé, en hommage à l’interprète mythique du Cid ou de Fanfan la tulipe, ou le Jardin de Colette, dans le Limousin, a proximité du château de Castel Novel où la célèbre auteure de Claudine à l’école ou de Chéri a vécu. Un parc où sont reconstitués les ambiances florales des différentes régions où cette amoureuse de la nature et des jardins s’est posée.

Le musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis.
(Photo : Office du tourisme de Saint-Denis)

Au musée d’Art et d’Histoire de Saint-denis, au nord de Paris, un jardin des cinq sens, mêle par exemple histoire et botanique, avec des plantes tinctoriales, la guèdre et la garance, commercialisées au Moyen Age sur un marché de Saint-Denis ou encore des roses créées par un rosiériste dionysien au début du XIXe siècle. Les plantes aromatiques ou médicinales et les fleurs relient ainsi le jardin aux collections de l’ancien Hôtel Dieu de Saint-Denis et de son apothicairerie du XVIIIe siècle, ou au poète dionysien Paul Eluard, et son poème Le Blason des fleurs et des fruits, ou encore au caricatures d’Alfred Le Petit, sous la Commune de Paris de 1871…

Mystère urbain

(Photo : Alain Goustard/ BnF)

S’il est un lieu, dans Paris intra-muros, a priori très éloigné de l’idée de nature ou de jardin c’est bien le site François Mitterrand de la Bibliothèque Nationale de France. les seuls témoignages de verdure qu’on y aperçoit à l’extérieur sont des arbustes enfermés dans des cages de métal… Et pourtant la BNF participe pour la deuxième fois à la manifestation « Rendez-vous aux jardins » en proposant des visites guidées de son jardin intérieur, habituellement fermé au public. On pourrait dire quasiment « invisible » au public, puisqu' enfoui dans un espace clos en contrebas de l’esplanade, aux quatre coins de laquelle s’élèvent les tours de la bibliothèque.

C'est assez récemment que les visiteurs ont pu commencer à apercevoir la cime de quelques-uns des arbres qui y furent plantés en 1994. Au total 126 pins sylvestres adultes transplantés de la forêt de Bord en Normandie qu’étaient venus ensuite compléter des chênes, bouleaux, fougères, jacinthes auxquels se sont ajoutés spontanément des cerisiers sauvages et d’autres espèces pionnières. Un espace d’un peu plus d’un hectare, conçu par l’architecte Dominique Perrault et le paysagiste Eric Jacobsen.

« Le jardin interdit »

« On y trouve des animaux égarés, chats ou lapins arrivés là par on ne sait quel miracle, et disparaissant parfois tout aussi mystérieusement (les lapins ont été exfiltrés et installés confortablement dans le Bois de Vincennes). Il attire les oiseaux, étourneaux ou éperviers. Mais seuls les jardiniers ont le droit d’y pénétrer, en dehors d’occasions exceptionnelles (…). Il est une sorte d’île où les chercheurs du Muséum d’histoire naturelle, nos voisins, viennent étudier la biodiversité : si les grosses bêtes y sont rares, les bestioles et les plantes y pullulent à l’aise. On ne va pas jusqu’à y photographier les fées, comme la dame anglaise qui avait su abuser Conan Doyle au point qu’il publia dans les années vingt un livre intitulé The coming of fairies ».

Extrait du Blog des lecteurs de la BNF

La visite exceptionnelle de ce jardin s’accompagne de l’exposition d’une sélection de planches botaniques d’espèces qui y sont plantées, ainsi que d’ouvrages se référant au thème « Terre, Terrain, Territoire ».

Jardin de la Bretagne - Les Jardins de Colette
(Photo : lesjardinsdecolette.com)

Un thème qui, par ailleurs, avait donné lieu, en amont de la manifestation « Rendez-vous aux jardins » à une journée d’études en février dernier. Quelques 200 participants (professionnels, propriétaires, étudiants ou amateurs) ont mis en avant l’importance de la connaissance pour donner un sens à un lieu, la nécessité du respect, tant du milieu à aménager que des riverains, comme l’obligation de prendre en compte la dimension économique. Tandis qu’on s’essayait à explorer la relation entre territoire et paysage…

Cultiver son jardin ...

Il est vrai que l’aménagement paysager est un élément important de l’art de vivre et aussi de la valorisation immobilière. Selon une dernière enquête UNEP-IPSOS, trois quarts des Français possèdent un espace de jardinage extérieur. Il n’est donc pas étonnant que les entreprises du paysage, regroupées au sein de l’UNEP ( Union nationale des entrepreneurs du paysages ), soient partenaires pour la troisième année de la manifestation « Rendez-vous aux jardins » pour présenter aux visiteurs, en association avec leurs clients, leurs plus belles réalisations.

Vue aérienne de l’abbaye de Beauport dans les Côtes d’Armor.© D. Halleux

Comme les jardins de l’Abbaye de Beauport à Paimpol en Bretagne. Situé en bord de mer, ce domaine de 86 hectares, classé depuis 1963, a fait l’objet d’importants travaux de restauration et de revalorisation des jardins pour en préserver l’aspect champêtre et la richesse botanique. Les jardins abbatiaux ont été valorisés en vergers conservatoires, tandis qu’un soin particulier était apporté aux abords de l’abbaye.

Arboretum Crété dans la Somme.
DR

Plus au nord, à Saint-Aubin-Rivière, dans la Somme, c’est l’arboretum Crété, du nom de son propriétaire, pépiniériste, qui s’ouvre au public. Ce parc présente sur trois hectares plus de 150 espèces forestières, un verger, un potager, divers aménagement paysagers et un plan d’eau. Deux exemples sur la dizaine de sites présentés par l’UNEP et les jardiniers paysagistes.

Une vision différente de la nature

Enfin, un clin d’œil s’impose pour ces "Rendez-vous" 2009 avec les tableaux de Timothy Martin actuellement exposés à la fondation Mona Bismarck à Paris. Peintre, l’artiste américain est aussi un « naturaliste » qui nous offre « une vision différente de la nature ».

C’est en effet une vision éminemment poétique de la nature qui est déclinée au fil de la cinquantaine de toiles réunies à cette occasion, une nature qui s’inscrit dans des objets usuels, essentiellement du mobilier (chaises, canapés) des sièges, mais aussi des instruments de musique, eux-mêmes inscrits dans un paysage… De telle sorte qu’ensuite, par exemple, « les gens ne puissent voir une harpe sans penser à du chèvre-feuille », déclare l’artiste se référant à l’un de ses tableauxoù cette plante grimpante enserre les cordes de l'instrument. Pour ma part, j’aurai désormais du mal à voir un piano sans l’imaginer revêtu des feuilles et fruits du poirier…