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vendredi 23 janvier 2009

 

Sénégal, Gorée la douce

par Ziad Maalouf, Ludovic Dunod

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Une découverte à contre-courant d’un des plus beaux joyaux du patrimoine africain.

En arrivant en fin d’après-midi à Gorée quand tous les touristes regagnent le continent et en décidant d’y passer la nuit, le voyageur curieux, sensible aux atmosphères de caractères et aux rencontres, découvre l’île dans son intimité.



Les tons ocres des maisons et l’allure paisible des habitants ne poussent pas à la précipitation. Pourtant, en journée Gorée est souvent prise d’une fièvre désagréable : marchands de souvenirs importuns, guides insistants et touristes par centaines. Le visage intime de l’île se découvre mieux dès la fin d’après midi quand le soleil commence à peine sa révérence. En prenant la chaloupe après 17 heures, au port de Dakar, on est certain d’avoir Gorée quasiment pour soi. Après 20 minutes de traversée, on débarque au pied d’une petite ville plusieurs fois centenaire, classée « patrimoine mondial » par l’Unesco.

Patrimoine et rencontres

L’histoire coloniale a sculpté ici une des ses fleurons les plus pittoresques. C’était une île de marchands et de militaires. Une terre de métissage aussi. Mille produits se sont échangés ici, hommes compris. Aujourd’hui, Gorée est devenue un lieu de mémoire de la traite négrière et sa « Maison des Esclaves » un site emblématique - même si l’île n’a jamais été une escale importante du commerce triangulaire.

Après avoir posé les bagages à l’Hostellerie de Boufflers ou dans une des rares chambres d’hôtes, nos premiers pas dans les rues de sable s’enchaînent au hasard. Quelques enfants jouent dans la rue en riant. Les adultes marchent lentement ou discutent devant les maisons. Tout le monde se salue. Bougainvillées, hibiscus, géraniums, palmiers et baobabs enrobent la balade de formes, de couleurs, d’odeurs et d’ombres bienveillantes. L’absence de voiture et d’engins motorisés contribue à donner une ambiance rare de nos jours.

Nuit magique

Après dîner, une fois la nuit tombée, les voyageurs ont souvent peur de sortir (même ceux qui étaient venus dans ce but…). Les rues peu éclairées découragent les timides. Les autres ne savent où aller. La petite cité de 1200 âmes appartient alors à ceux qui osent les rencontres. Il faut aimer les ambiances de caractère pour goûter à la personnalité de Gorée by night. Sur la place principale, des petits groupes continuent de discuter entre eux. Sans hausser le ton, la pénombre ne s’y prête pas. Sur un des côtés de la place, la grande carcasse vide et délabrée de l’ancien palais des gouverneurs prend une allure fantomatique sous les étoiles. On peut aller sur sa terrasse contempler les lumières de Dakar. Les plus curieux franchissent le seuil du bar des sapeurs-pompiers. Il est installé dans une des salles du rez-de-chaussée. Néons blafards, congélateur cabossé, vieilles chaises dépareillées et télé mal réglée composent un décor incertain plus proche d’un beau riff de blues que d’une mélodie tropicale et suave. A cette heure-ci, la bière est la maitresse des hommes échoués ici.

Sur les hauteurs de l’île, à 10 minutes à pied, le Castel, semble désert. Pourtant, des dizaines de familles vivent dans les souterrains ou près des remparts de ce vieux bastion fortifié. Certains soirs, la pizzeria Dolce Vita, au Castel toujours, organise des concerts (rythmes afro ou reggae selon les jours). Quel que soit l’endroit, on se promène sans crainte à Gorée.

Loin de l’agitation du monde

A minuit, la dernière chaloupe regagne le continent. Le voyageur est souvent déjà dans sa chambre depuis longtemps. L’hébergement est sobre dans l’île. Quelques riches sénégalais et étrangers y possèdent des maisons dignes des magazines de décoration mais la majorité des Goréens vit simplement, parfois même dans une grande pauvreté. Entre la maison d’hôte ASAO, l’Auberge Keur Beer, l’Hostellerie du Chevalier de Boufflers et une ou deux chambres chez l’habitant, Gorée ne peut guère accueillir qu’une quarantaine de personne. L’intimité est garantie.

Nous quittons l’île quand les premières casquettes de touristes pointent à nouveau leur visière sur le béton du débarcadère. Le tumulte naissant nous rappelle que rien ne vaut une découverte de Gorée à contre-courant.  


Renseignements pratiques : (janvier 2009)

Y aller :

Chaloupe (150 ou 350 places) à l’embarcadère du port de Dakar. 1er départ de Dakar à 6h15 / dernier départ de Gorée à minuit (1h15 le samedi) 20mn de traversée environ.

Où dormir :

L’Hostellerie du Chevalier de Boufflers
Le plus vieux restaurant de l’île, fondé en 1953 à deux pas du débarcadère, a ouvert un hôtel il y a quelques années. Les chambres sont situées dans une vieille maison à galerie à deux rues du restaurant. 5 chambres. Déco sobre et claire. Moustiquaire et ventilateur. Douche/wc dans chaque chambre. Préférez les chambres à l’étage. Le petit déjeuner se prend au restaurant, sur l’agréable terrasse ombragée qui domine l’anse de Gorée et la mer.
Autour de 25 000 CFA (221) 33 822 53 64 goreeboufflers@arc.sn

Auberge Keur Beer
Située près de la Maison des Esclaves, cette petite auberge ouverte en 1996, possède 3 chambres avec douche/wc et 3 autres avec sanitaires en commun. Moustiquaire et ventilateur. Confort simple. Quand l’établissement est complet, l’auberge propose un logement c/o l’habitant. Entre 20 000 et 30 000 CFA (221) 33 821 38 01 keurbeergie@yahoo.fr

ASAO, maison d’hôtes
L’adresse charme et déco de Gorée. La maison appartient à Valérie Schlumberger, fondatrice de CSAO, une société qui promeut le travail des artisans et des artistes sénégalais. Ce fut aussi l’atelier de Moussa Sakho, un des plus célèbres peintres de « fixé sous verre ». Autant dire que les objets singuliers et les oeuvres contemporaines donnent le ton à cette vaste bâtisse possédant deux belles cours ombragées. 6 chambres (single, double, suite). Certaines chambres ont une sdb/wc privative et d’autres possèdent des sanitaires communs.
Entre 15 000 et 35 000 CFA (221) 33 821 81 95 csaodakar@orange.sn

A lire
:

Le goût du Sénégal
Textes choisis et présentés par Catherine Mazauric Mercure de France.

Gorée, mémoire du Sénégal,
Photos de Thomas Renaut / textes de Marie Aude Priez ASA Editions.
Trésors de l’iconographie du Sénégal colonial
Xavier Ricoux Riveneuve éditions

Gorée en aquarelles
Guy Jay
http://aquarelleaventures.fr/

Sénégal
Guide Evasion Hachette

A voir :

Ile de Gorée, Joyau du Sénégal
Un film d'Olivier Cogels
DVD en vente aux boutiques de l'embarcadère, dans les hôtels de l'Ile et dans les deux grandes librairies de Dakar.

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