par Dominique Raizon
Article publié le 22/05/2007 Dernière mise à jour le 22/05/2007 à 16:52 TU
Pierre-Gilles de Gennes, prix Nobel de physique 1991, membre de l'Institut (Académie des Sciences) et professeur au Collège de France.
(Photo : AFP)
«Avocat passionné de la science jusqu’au dernier jour, Pierre-Gilles de Gennes a plaidé sans relâche la cause de la science auprès des jeunes», a rappelé ce mardi matin Valérie Pécresse, en saluant la mémoire d’«un humaniste militant». Né le 24 octobre 1932 à Paris, fils d’un médecin endocrinologue et d’une infirmière, Pierre-Gilles de Gennes fut l’élève de l’Ecole normale supérieure, agrégé de physique et docteur ès sciences.
Le physicien est décédé vendredi 18 mai 2007 à Orsay (Essonne), après avoir marqué des générations de chercheurs et d’étudiants. Ses travaux auront insidieusement changé notre vie quotidienne. Ils ont permis, en effet, des applications industrielles comme par exemple, la fabrication des écrans plats de téléviseurs ou d’ordinateurs, des calculettes, des montres à cristaux liquides (*) mais aussi à la mise au point de «superglues» qui permettent désormais d’assembler des matériaux longtemps considérés comme incollables. Il avait reçu le prix Nobel de physique pour ces travaux sur, ce qu’il appelait lui-même, «la physico-chimie de la matière molle».
«Il était capable de subjuguer un auditoire d’universitaires en décryptant par le menu la naissance, la vie et la mort d’une bulle de savon...»
Au micro de Christian Sotty, réaction de Jacques Friedel, ancien président de l’Académie des sciences et physicien comme Pierre-Gilles de Gennes qu’il a bien connu :
«Je suis d'autant plus triste que je le savais très actif bien qu'il fût malade, il s'attaquait à la matière complexe avec des idées de simplification.»
Membre de l’Académie des sciences et professeur honoraire au Collège de France, le chercheur a dirigé de nombreux travaux de laboratoire au Commissariat à l’énergie atomique (CEA), à l’université d’Orsay et au Collège de France. Directeur de l’Ecole supérieure de physique et de chimie industrielles de la Ville de Paris de 1976 à 2002, il avait, plus récemment, rejoint l’Institut Curie, abordant le système du vivant et la compréhension des mécanismes cellulaires, s’intéressant particulièrement à l’odorat et à la mémoire.
«Accepter de perdre la face»
Modeste, il déclarait dans Les Objets fragiles (éditions Plon,1994) : «Globalement, ce que je déteste les plus dans les écoles, c’est l’autosatisfaction des maîtres, des élèves et des anciens élèves. D’elle vient le conservatisme et cette notion absurde du ‘droit à vie’». Le quotidien Le Monde cite d’autres déclarations qui dessinent le portrait d’un chercheur audacieux et humble : «Le vrai point d’honneur, aimait à répéter Pierre-Gilles de Gennes, n’est pas d’être toujours dans le vrai. Il est d’oser, de proposer des idées neuves, et ensuite de les vérifier. Il est aussi, bien sûr, de savoir reconnaître publiquement ses erreurs (…). L’honneur du scientifique est (…) d’accepter de perdre la face».
Ceci n’était pas que beaux mots et effets de manche. Ce chercheur polyvalent, qui détestait les barrières -qu’il considérait comme une entrave à la quête de la connaissance- s’est toujours appliqué à réunir, au sein d’une même équipe, des expérimentateurs et des théoriciens de plusieurs disciplines différentes. Lui rendant hommage, Daniel Thoulouze, directeur du département Mathématiques et physique de base du CNRS, au moment de l’attribution du prix Nobel à Pierre-Gilles de Gennes a déclaré : «Grâce à lui (Pierre-Gilles de Gennes) on a redécouvert ces vingt dernières années, que la physique est une science naturelle».(*) Son ouvrage The physics of liquid crystals, 1974, reste une référence.
Pour en savoir plus :
http://www.college-de-france.fr/chaires/chaire2/pgg.htm
Retrouvez également Pierre-Gilles de Gennes en vidéo sur le site de la Cité des Sciences, en cliquant ici.