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Santé

Urgent: médicaments pour enfants

par Marion Urban

Article publié le 11/06/2007 Dernière mise à jour le 11/06/2007 à 16:43 TU

Un médicament à petites doses ne se transforme pas obligatoirement en médicament pour enfant.(Photo : AFP)

Un médicament à petites doses ne se transforme pas obligatoirement en médicament pour enfant.
(Photo : AFP)

Une étude, menée par des scientifiques britanniques, s'inquiète du trop grand nombre de médicaments récents pour adultes prescrits pour les enfants atteints d'épilepsie alors qu'ils n'ont pas encore été reconnus comme sécuritaires. L'alerte intervient quelques mois après la mise en application d'une directive de l'Union européenne sur la nécessité pour les laboratoires pharmaceutiques de mener des tests spécifiques pour les médicaments pédiatriques.

L’équipe britannique de chercheurs de la School of Pharmacy (faculté de pharmacie), de l’Institute of Child Health (Institut de pédiatrie) de l’université de Londres et du Great Ormond Street Hospital (hôpital pour enfants), a étudié les dossiers de 7 721 enfants et adolescents, traités entre 1993 et 2005. 70% des ordonnances ne concernent qu’un seul médicament, ce qui rejoint les constats tirés des dossiers de patients adultes : 60 à 70% des épileptiques ne se soignent qu’avec un seul médicament.

Le nombre général de prescriptions d’anti-épileptiques a augmenté de 19%. L’utilisation de nouveaux anti-épileptiques a régulièrement progressé alors que les anti-épileptiques conventionnels, dont les résultats sont probants, ont régressé. Or, selon les scientifiques, la plupart des anti-épileptiques récemment mis sur le marché, ne présentent pas toutes les garanties de sécurité. «Les bienfaits des traitements étaient au départ évidents. Les médicaments sont sortis sur le marché avec moins de restrictions que d’autres», explique le professeur Ian Wong, qui a dirigé l’équipe de chercheurs. «De nouvelles données sur leur sécurité sont en train d’émerger et nous devrions contrôler les prescriptions».

Trois remèdes à tester

La lamotrigine, un anticonvulsivant, est présent dans 65% des prescriptions, particulièrement dans la tranche d’âge des 12-18 ans. Ce médicament, utilisé aussi chez les adultes pour soigner les troubles de la dépression, provoque des éruptions cutanées, qui peuvent être graves.

Le topiramate provoque des pertes de poids importantes chez le patient. Lorsqu’il est prescrit à des enfants et des adolescents, il peut entraîner d’autres effets, tout comme le lévétiracétam. L’équipe de chercheurs britanniques met en avant des insuffisances rénales et des troubles sanguins.

Le professeur Ian Wong, qui, par ailleurs, a été consultant à l’Agence européenne pour l’évaluation des médicaments (AEEM), et ses collaborateurs, insistent pour que des essais pédiatriques de ces anti-épileptiques soient entrepris rapidement.

Sirop pour enfant de 6 à 12 ans

Ce n’est que depuis le 26 janvier 2007, qu’une directive de l’Union européenne demande aux laboratoires pharmaceutiques de conduire des tests séparés adultes et enfants (moins de 18 ans) pour obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM).

Jusqu’à cette date, la moitié des médicaments utilisés chez l’enfant n’ont été développés et évalués que pour les patients adultes. Ils n’ont pas fait l’objet de recherches et d’autorisations spécifiques. Les doses sont simplement réduites en fonction du poids de l’enfant ou de l’adolescent.

Pendant longtemps, l’argument éthique a servi à refuser les tests pharmaceutiques sur des enfants. En fait, les laboratoires pharmaceutiques ne voulaient pas investir dans le développement de traitements pédiatriques, représentant à leurs yeux un «petit» marché commercial, peu rentable, et supposant des essais compliqués. La population infantile n’est pas homogène puisqu’elle est composée de nouveaux-nés et d’adolescents. Les recherches peuvent être longues, difficiles et chères. Mettre au point un sirop, avec la bonne dose, la présentation et l’emballage «attrayant» pour un enfant de 6 ans a un coût industriel important.

Reprendre le contrôle

L’absence de médicaments pédiatriques a conduit les médecins à prescrire des traitements sans autorisation de mise sur le marché (AMM) et sans donner d’informations suffisantes sur les effets des médicaments.

Entre prescrire des médicaments non autorisés et ne pas vouloir tester des médicaments sur des enfants, les autorités ont choisi.

Après les États-Unis, les Européens ont décidé d’accorder quelques avantages aux laboratoires pharmaceutiques qui conduiraient des essais sur la population infantile, comme celui de voir prolonger la durée du brevet conféré au médicament.

Un groupe d’experts en pédiatrie a été créé au sein de l’Agence européenne pour l’évaluation des médicaments, en 2006. Il conseille l’organisation sur la sécurité, la qualité et l’efficacité des traitements pour enfant et tient à jour la liste des essais cliniques en cours.

Selon la directive européenne, un logo spécifique doit désormais identifier les médicaments pédiatriques.