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Environnement/ Biodiversité

Le thon, trop bon trop pêché !

par Dominique Raizon (avec AFP)

Article publié le 17/11/2008 Dernière mise à jour le 17/11/2008 à 14:53 TU

Sur le marché aux poissons, à Tokyo.(Photo : Lise Aguiton-Moro)

Sur le marché aux poissons, à Tokyo.
(Photo : Lise Aguiton-Moro)

« Thon rouge : Fermez la pêche ! ». Accentué par la flambée des prix, sur fond de forte demande des Japonais, très friands de cette espèce, le niveau de capture des thons a doublé et l'effondrement du stock de thon rouge est réel, selon des estimations d’associations d’écologistes et de scientifiques. En guise de protestation et réclamant la protection des stocks, Greenpeace a déversé ce 17 novembre 2008, cinq tonnes de têtes de thon rouge devant le ministère de l'Agriculture, à Paris (France). L’organisation écologiste a déployé ses banderoles alors que les 45 pays composant la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (ICCAT ) se réunissent au Maroc, jusqu'au 24 novembre, pour décider de l'avenir de cette pêche au thon. Les organisations écologistes réclament avec force un moratoire.

La réunion qui se tient à Marrakech (Maroc), du 17 au 24 novembre 2008, aura huit jours pour examiner différentes options susceptibles de protéger cette espèce lourdement menacée par la surpêche et pour trouver un accord sur ce sujet passionnel, aux lourdes implications environnementales, mais aussi économiques et sociales.

Six pays de l'UE sont concernés par cette pêche: la France, l'Espagne, l'Italie, la Grèce, Malte et Chypre. Sergi Tudela, responsable pêche au WWF Méditerranée, estime pour sa part qu’« une fermeture de la pêche est indispensable dans l'attente de l'imposition de contrôles adéquats, d'une réduction de la capacité de pêche et de la mise en oeuvre effective d'un plan de sauvetage [fondé sur] une réelle base scientifique ». Aujourd'hui, le thon rouge incarne la crise des océans et le problème de la gouvernance des pêcherie, estime François Chartier, chargé de la campagne Océan Greenpeace.

De son côté, la Sathoan -une organisation regroupant à Sète (France, sud) une dizaine des plus importants thoniers-senneurs de France- estime qu'un « moratoire n'est pas la solution la plus pertinente car elle supprimerait toute l'activité économique des pêcheurs ».

Que le thon ne connaisse pas le sort de la morue

Greenpeace le WWF, l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et l'association Robin des Bois de rappeler, dans le quotidien économique français La Tribune : « Le thon rouge ne doit pas connaître le même sort que la morue de Terre Neuve dont le stock s'est effondré en 1992 et ne s'est jamais rétabli », rappellent Greenpeace.

En déversant quelque cinq tonnes de têtes de poisson devant le parvis du ministère, un porte-parole de Greenpeace, Philippe Lansac, a déclaré que l’organisation voulait ainsi dénoncer « l'irresponsabilité de la France et de son ministre chargé des pêches », Michel Barnier, dont le pays préside l'Union européenne.

Les pêcheurs de l'Union européenne dénoncent régulièrement le manque de contrôles sur la flotte des pays du Maghreb, de la Libye, de la Turquie ou encore de la Croatie. Et, « compte tenu du nombre de rapports d'experts qui tous recommandent la fermeture de la pêche au thon rouge, les politiques ont désormais toutes les cartes en main », souligne François Chartier, qui rappelle que les stocks en Méditerranée ont fondu de 80% en deux décennies.

Une gestion plus « rigoureuse »  

Des quotas existent certes mais, considérés trop élevés par certains, ils ne sont jamais respectés. En 2007, alors que le niveau de capture autorisé était de 29 500 tonnes, 61 000 tonnes, soit plus du double, ont été capturées, selon les chiffres du comité scientifique de l'Iccat, qui juge qu'une limite maximale de 15 000 tonnes par an devrait être fixée.

« La réunion de Marrakech est cruciale. C'est une question de crédibilité. L'Iccat doit faire comprendre à ses Etats membres qu'on ne peut plus continuer comme cela, que cette histoire devient ridicule », estime François Simard, conseiller pour la pêche et les affaires maritimes à l'Union mondiale pour la nature (UICN).

Mi-octobre, l'UICN s'était prononcée pour une suspension de la pêche au thon rouge en Méditerranée et que, fait notable, cette décision a été approuvée par le Japon et l'Espagne.

« Les Français plus contrôlés que les Turcs et les Croates »

Quinze jours plus tard, les ministres européens de la Pêche ont réclamé une gestion plus « rigoureuse » grâce à une réduction des quotas et de la durée de la saison de pêche. Ils n'ont cependant pas retenu l'hypothèse d'un moratoire international, qu'ils jugent inapplicable.

Les discussions, qui s'annoncent houleuses. De son côté, l'Association européenne des thoniers méditerranéens (AETM), qui affirme regrouper 2 500 professionnels de France, d'Italie et Malte, demande que les niveaux des quotas de pêche ne soient pas réduits et insiste pour que les contrôles soient renforcés « pour tous ». « Il faut surtout une équité de traitement. Aujourd'hui, les Français sont bien plus contrôlés que les Turcs et les Croates qui disposent pourtant d'une flotte énorme », a déploré le directeur de la Sathoan, Bertrand Wendling.

  

  

Pour en savoir plus :

Consulter les sites suivants

- Greenpeace France et Tous les chemins mènent au moratoire

- ICCAT 

- ministère français de l'Agriculture et de la Pêche

- UICN : liste des espèces menacées

- WWF