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Jeux olympiques 2012

Chirac n’a pas pris sa revanche olympique

par Valérie Gas

Article publié le 06/07/2005 Dernière mise à jour le 06/07/2005 à 17:46 TU

Le choix de Londres pour organiser les Jeux olympiques 2012 est une excellente nouvelle pour Tony Blair et un coup dur pour Jacques Chirac.(Photos : AFP)

Le choix de Londres pour organiser les Jeux olympiques 2012 est une excellente nouvelle pour Tony Blair et un coup dur pour Jacques Chirac.
(Photos : AFP)

Londres a gagné la course aux Jeux olympiques. Partie outsider, la capitale britannique a remporté une victoire sur le fil devant Paris. Il s’agit d’une excellente nouvelle pour Tony Blair, le Premier ministre, qui avait soutenu avec conviction la candidature de Londres. C’est, en revanche, un coup dur pour Jacques Chirac, le président français, qui s’était lui aussi investi personnellement pour promouvoir la candidature de Paris. Après l’échec du référendum sur le projet de Constitution européenne, les ratés du Sommet de Bruxelles, voici qu’il perd sa dernière chance de redorer le blason de la France et de requinquer sa cote de popularité.

Londres vainqueur, Paris battu. La décision du Comité international olympique d’attribuer l’organisation des JO 2012 à la capitale britannique a comme des airs de bérézina pour la France qui subit, avec cette troisième rebuffade de la part de l’establishment olympique (après 1992 et 2008), un échec de plus. Et Jacques Chirac, le président français, qui a appris la victoire de Londres dans l’avion qui le conduisait au Sommet du G8 de Gleneagles où il doit être accueilli par Tony Blair, va devoir encore une fois avaler une mauvaise nouvelle après l’échec du référendum sur la Constitution européenne qui a placé la France dans une situation difficile par rapport à ses partenaires continentaux. Cette défaite-là sera peut-être encore plus difficile à digérer que les précédentes puisque plus inattendue.

Le dossier français était «excellent». Paris était donnée favorite. La présentation du projet olympique s’était bien déroulée. A priori, les membres du comité de candidature français n’avaient aucune raison d’être soucieux avant l’annonce de la décision. Si ce n’est qu’un vote des membres du CIO s’effectue en fonction de motivations et d’alliances bien spécifiques. A la lumière du résultat qui a montré que Londres a tranquillement devancé Paris à chaque tour du vote pour l’emporter finalement par quatre voix d’avance, on se rend donc compte que le fair play affiché par la délégation française dans les dernières heures de la campagne a, semble-t-il, été moins efficace que la pugnacité non dissimulée des Britanniques. Une victoire olympique, il faut aller la chercher, la construire des fondations au toit, sans oublier un étage au passage. C’est peut-être là que les Français ont perdu, en étant moins performant pour promouvoir leur candidature et nouer les contacts avec les bons interlocuteurs, pour parler aux membres du CIO le langage qu’ils aiment entendre.

Blair un, Chirac zéro

Après tout, il fallait un gagnant et un perdant et le fait, pour les deux villes, d’arriver en finale est déjà une satisfaction. Mais il ne faut pas oublier que cet affrontement franco-britannique pour les Jeux s’inscrit dans un contexte politique global de tensions très vives entre la France et le Royaume-Uni, entre Jacques Chirac et Tony Blair, qui a débuté avec la guerre en Irak que le président français a refusé de soutenir. Si l’important c’est de participer, dans le cas présent, l’esprit olympique ne sera pas suffisant pour faire accepter de bon cœur la défaite contre un adversaire à qui tout semble devoir réussir. D’autant que le président français et le Premier ministre britannique vont se retrouver, quelques heures à peine après cette annonce, pour inaugurer le Sommet du G8 autour d’un dîner. On peut imaginer que Jacques Chirac n’aura pas beaucoup d’appétit.

Pour Tony Blair, en revanche, rien ne semble devoir affadir les mets. Hôte du G8, nouveau président tournant de l’Union européenne, Premier ministre du pays organisateur des JO de 2012, il se trouve presque en état de grâce. Malgré son soutien à George W. Bush dans la guerre en Irak, qui lui a valu des critiques et des attaques dans la communauté internationale mais aussi dans son pays, il n’est pas isolé et peut même envisager de jouer un rôle diplomatique moteur. Il a déjà pris l’initiative sur la scène européenne en se positionnant face à la France justement comme l’homme du renouveau. Il a obtenu les Jeux et va pouvoir rassembler encore plus les Britanniques, qui viennent de le réélire, derrière l’ambition olympique d’une nation qui gagne. Et le G8 pourrait lui offrir la cerise sur le gâteau s’il réussit à obtenir des engagements des pays riches sur les dossiers phares du réchauffement climatique et de l’aide au développement de l’Afrique.

Cette éclatante réussite de la Grande-Bretagne met bien évidemment en valeur la morosité d’une France qui n’a pas réussi pas à mobiliser autour d’elle malgré un engagement fort et unanime sur le dossier olympique. L’échec de la candidature de Paris pour les JO 2012 représente une occasion manquée de redonner un coup de fouet aux ambitions hexagonales sur la scène internationale mais aussi d’améliorer le moral des Français qui n’ont cessé, ces derniers mois, de manifester leur déception et leur inquiétude, notamment en votant «non» au référendum sur la Constitution européenne. Jacques Chirac qui s’est investi personnellement et espérait profiter de l’effet rassembleur de la candidature, autour de laquelle partis politiques, syndicats, population se sont réunis, a fait chou blanc. L’échec de Paris ne pourra donc pas manquer d’être analysé comme un nouveau coup d’épée dans l’eau pour un président dont la popularité ne cesse de s’effriter. Désavoué à l’intérieur, fragilisé en Europe et sur la scène internationale, le président français, proche de l’asphyxie politique, n’aura même pas bénéficié d’un petit ballon d’oxygène olympique.