par Gérard Dreyfus
Article publié le 27/10/2006 Dernière mise à jour le 27/10/2006 à 10:57 TU
Lever 5 heures, petit déjeuner 6 heures, puis transport pour aller à la piscine, puis séance d'échauffement. Malheur aux nageurs qui ne sont pas très frais le matin. Pour répondre aux exigences de la télévision américaine NBC, principal bailleur de fonds des Jeux olympiques, le CIO a décidé de soumettre certains sportifs à un régime inhabituel qui risque de chambouler toute leur préparation et de peser sur la qualité de leurs performances pendant la compétition.
Habituellement les finales avaient lieu en fin d'après-midi. A Pékin, pour cause de changement de fuseau horaire, le rendez-vous ne convenait pas aux téléspectateurs américains très friands de natation avec, actuellement, quelques champions de haute volée emmenés par l'idole Michael Phelps déjà sept fois médaillé aux Jeux précédents. La décision du CIO de se soumettre à la volonté des Américains, sans le dire naturellement, est vivement critiquée un peu partout dans le monde à commencer par l'Australie, pays où la natation est considérée comme le symbole du sport national. De son point de vue, les autorités olympiques ont fait fi de leurs propres règles qui veulent que les Jeux soient faits pour les athlètes.
Les uns et les autres auront beau manifester leur désappointement, crier à la trahison comme commencent à le faire les plus grands champions, le CIO ne risque pas de revenir sur sa décision. Cela vaudra pour la natation comme pour quelques épreuves de gymnastique. Les performances chronométrées s'en ressentiront probablement, mais on ne va pas aux Jeux pour battre des records, on y va pour les médailles.
L'argent des Jeux
Il convient de rappeler pour prendre l'exacte mesure du problème que la chaîne de télévision américaine a acquitté 3,5 milliards de dollars pour les Jeux olympiques (hiver et été) jusqu'en 2008, et qu'elle a libellé un nouveau chèque de 2,2 milliards pour les éditions de Vancouver (2010) et 2012 (Londres). Une somme qui représente plus de la moitié des revenus des Jeux. Ce qui, évidemment, donne à l'organisateur un certain nombre d'obligations, mais débouche sur le conflit du XXIe siècle, déjà largement entamé lors des deux décennies précédentes entre intérêt des athlètes et argent des financiers.
Sans télé, toutes les disciplines sportives le savent, il n'y a plus de compétitions de haut niveau. Quand s'y ajoutent les problèmes de décalage horaire, on comprend que les mécontents soient plus nombreux que les satisfaits. Pour le CIO, «la solution qui convient à tout le monde n'existe pas». De plus les dirigeants ont obtenu l'assentiment de la commission des athlètes qui réunit une constellation d'anciens champions. L'affaire est entendue. Encore que, dans un entretien avec le quotidien L'Equipe, le triple champion olmpique néerlandais Peter Van den Hoogenband n'écarte pas la possibilité d'une action de protestation pendant les Jeux.
Sous quelle forme? «Peut-être que je monterai nu sur le podium. Il paraît que les Américains détestent cela...». Le sport olympique baigne actuellement dans une drôle d'ambiance.