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J.O. - Basket-ball

La marche olympique de l’Angola

par David Kalfa

Article publié le 31/07/2008 Dernière mise à jour le 07/08/2008 à 13:08 TU

Depuis vingt ans, la sélection angolaise règne sur l’Afrique. Le titre de champion continental ne lui a échappé qu’une fois en onze éditions. Depuis son unique échec en 1997, la meilleure nation africaine a encore progressé grâce à d’excellentes structures et de gros moyens financiers. A elle désormais de concrétiser sa montée en puissance aux J.O. de Pékin. Même si sa tâche s'annonce difficile dans un tournoi olympique très relevé.

Les Angolais célèbrent leur victoire en Stankovic Cup.(Photo : AFP/Frederic J. Brown)

Les Angolais célèbrent leur victoire en Stankovic Cup.
(Photo : AFP/Frederic J. Brown)



Le basketball, ce n’est pas comme le football. On gagne rarement sur un malentendu ou un but improbable. Aussi, quand l’Angola remporte la Stankovic Cup en battant successivement trois nations majeures, la Serbie, la Russie et la Chine, c’est le signe que ce pays est prêt à franchir un nouveau palier dès le mois d’août, lors du tournoi olympique de Pékin.

Atteindre les quarts

De l’Angola aux Jeux, on conserve surtout l’image d’un « punching-ball » pour la plus grande équipe de tous les temps, la « Dream Team » américaine. A Barcelone, en 1992, Michael Jordan et Charles Barkley avaient révélé le gouffre entre la NBA et le reste du monde en martyrisant les « Palancas Negras » avec un 116 à 48 (l’équivalent d’un 10-0 en football).

L'ailier américain LeBron James tentera de dompter les "Palancas negras".(Photo : Reuters)

L'ailier américain LeBron James tentera de dompter les "Palancas negras".
(Photo : Reuters)

Or, les « Palancas » vont retrouver leurs bourreaux (ainsi que la Chine, l’Espagne, l’Allemagne et la Grèce) lors du Premier tour des J.O. Et le résultat ne sera surement pas le même tant ceux-ci ont fait du chemin depuis quinze ans.

En tout cas, le Dr Alphonse Bilé, Secrétaire général de la confédération africaine de basketball (FIBA-Afrique), y croit : « Les Angolais ont manqué les quarts de finale de peu lors du Mondial 2006 au Japon. […] Cette équipe a le potentiel pour décrocher la 7e ou la 8e place. » Le président de la Federação angolana de basquetebol (FAB) et du Comité olympique angolais (COA), Gustavo da Conceiçao, préfère en revanche se montrer modeste : « Nous souhaitons contribuer à la dignité du basket angolais et africain. Avec tout le respect dû aux grandes équipes, nous espérons gagner un ou deux matches et atteindre la 9e place. »

Superpuissance africaine

Pourtant, l’Angola est une superpuissance sur la scène continentale. Sa sélection a remporté dix des onze dernières coupes d’Afrique des nations. Une suprématie inimaginable, même pour l’hyper-puissance états-unienne.

En clubs, la domination va également crescendo. Depuis 2002, cinq coupes d’Afrique des clubs champions sur six ont été glanés par Primeiro de Agosto et Petro Atletico Luanda, les deux équipes phares angolaises, vitrines respectives d’une grosse société pétrolière et de l’armée. Primeiro et Petro se sont même affrontés en finale des coupes 2006 et 2007…

Pourquoi une telle supériorité ? Le Dr Bilé y voit « deux raisons fondamentales ». « Le basket représente en Angola la même chose que le football au Brésil. Les autorités politiques et sportives sont très impliquées dans son développement et sa promotion.» Le dirigeant ivoirien poursuit son raisonnement : « Beaucoup d’argent et de sérieux sont mis à disposition. Et le travail est fait dans tous les compartiments, de la formation des cadres à celle des joueurs. Car il y a une vraie culture du basket avec des clubs professionnels. Les joueurs restent donc au pays. »

Sport national

Les stars angolaises ayant tenté leur chance à l’étranger sont rares. L'exemple le plus connu est celui du vice-président de la FAB, Jean-Jacques Conceiçao, ex-pivot du CSP Limoges, en France. Et aucun représentant n’a jamais foulé les parquets NBA.

Pourtant, cette sédentarité n'est pas un handicap. Car si le Sénégal, le Nigeria, la Côte d’Ivoire ou le Cameroun comptent toujours plus de joueurs en Europe ou en NBA, leur incapacité à offrir un cadre structuré en équipe nationale rend inutile le talent acquis par la diaspora africaine. Et garantit pour longtemps la toute-puissance angolaise...

Ambitions mondiales

Gustavo da Conceiçao, le président de la Federação Angolana de Basquetebol (FAB) et du Comité olympique angolais (COA).(Photo : www.fiba-afrique.org)

Gustavo da Conceiçao, le président de la Federação Angolana de Basquetebol (FAB) et du Comité olympique angolais (COA).
(Photo : www.fiba-afrique.org)

Dire que les « Palancas negras » sont désormais à l’étroit dans leur pré carré est un euphémisme. Le pays a déjà réalisé de nets progrès en terme d'infrastructures en accueillant la CAN 2007 (avec un investissement de près de 200 millions de dollars US, selon le Dr Bilé*). Et il devrait en faire encore avec la tenue de la CAN de football 2010, sur son sol.

Les ambitions locales vont donc croissantes. Les dirigeants angolais ont ainsi annoncé leur souhait d’organiser les championnats du monde. « C'est notre défi, confirme Gustavo da Conceiçao. On veut montrer que l'Afrique est prête à organiser des grandes compétitions. On se prépare donc pour le Mondial 2018 ».

Crise de croissance

Le Dr Alphonse Bilé se veut plus prudent, estimant qu’il est peut-être encore « un peu tôt ». Quant au tournoi olympique, ce sera évidemment difficile d’y franchir les poules, tant le niveau général y est élevé et homogène.

Surtout que l’équipe ne comporte aucun élément de plus de 2 mètres 05. Un véritable handicap dans le basket moderne, comme le concède Gustavo da Conceiçao : « Nous sommes des 'petits' avec des joueurs faisant 20 centimètres de moins que leurs adversaires. Cela crée une usure physique plus importante avec la répétition des matches aux J.O. Car nous devons compenser ce déficit par un jeu agressif et une grosse intensité. »

Cette carence en centimètres, il va falloir désormais y remédier par des détections de grands joueurs dans tout le pays (chose inimaginable du temps de la guerre civile). Car c'est une étape nécessaire pour passer à la suivante : entrer dans le Gotha international. A moins que les Angolais ne forcent le destin dès le 10 août, date du début de la compétition olympique. Vu leurs dernières sorties, ils en paraissent capables.

Carlos Morais (ici, avec la balle) et les Angolais retrouveront les Chinois sur leur route aux JO de Pékin.(Photo : AFP/Frederic J. Brown)

Carlos Morais (ici, avec la balle) et les Angolais retrouveront les Chinois sur leur route aux JO de Pékin.
(Photo : AFP/Frederic J. Brown)

*Ces investissements concernent également la construction de routes et de nombreuses infrastructures extra-sportives.