Article publié le 12/10/2008 Dernière mise à jour le 11/10/2008 à 23:51 TU
De l’envoyé spécial de RFI en Roumanie, Jean-François Pérès
Le nul ramené de Roumanie, aura peut-être des conséquences positives pour l'avenir de Raymond Domenech.
(Photo: Reuters)
Après vingt minutes, un match nul aurait tenu du miracle. Au coup de sifflet final, les Bleus pouvaient presque regretter de ne pas l’avoir emporté. Paradoxe d’une soirée roumaine où les Français auront alterné le pire (en défense) et le meilleur (en attaque).
Premier coup de théâtre : le forfait de dernière seconde de Patrick Vieira, victime d’une contracture au mollet à l’échauffement. La série noire continue pour le capitaine français, déjà absent de l’Euro, dont l’avenir en Bleu devient de plus en plus opaque. Le milieu de terrain de l’Inter Milan est logiquement remplacé par le Bordelais Alou Diarra.
Pas de surprise par ailleurs dans la composition des deux équipes, qui pénètrent sur la pelouse bosselée d’un stade de Constanta même pas comble (on joue pourtant à guichets fermés) dans des conditions climatiques de fin d’été indien tout à fait agréables. Dans les tribunes, des chants, des cris, des drapeaux, un franc soutien pour une équipe roumaine avide de revanche après son cuisant revers face à la Lituanie (0-3) en septembre, mais aucune hostilité vis-à-vis des Bleus, la Marseillaise étant notamment scrupuleusement respectée.
Comme il fallait s’y attendre, le début de match est crispé de part et d’autre. Sur un terrain de petite taille, le jeu se cantonne au milieu jusqu’à la première bourde de la rencontre, un ballon de la gauche qui file dans l’axe de la défense française sans être intercepté par qui que ce soit, si ce n’est Florentin Petre, qui en profite pour battre de près et de l’extérieur du droit Steve Mandanda (1-0, 6e minute). Sur le but, toute la défense des Bleus est à blâmer, de Sagna qui laisse passer, à Boumsong et Abidal transformés en spectateurs puis Evra, dépassé par la vitesse de Petre.
Début de match cauchemardesque
Galvanisé par cette réussite initiale, les Roumains mettent au supplice une arrière-garde française fébrilissime, à l’image d’un Abidal au bord de la crise de nerfs. Première réaction des vice-champions du monde, un tir à ras-de-terre de Gourcuff au ras du poteau de Lobont, mais le gardien roumain est bien placé (14’).
Réplique immédiate : centre de Mutu, reprise de Marica contrée, juste au dessus. Sur le corner, Florentin Petre trouve la tête du spécialiste Goian, seul là-haut dans les airs, qui croise sa reprise et creuse l’écart malgré la présence aussi amorphe qu’inutile de Malouda au deuxième poteau, qui ne peut que dévier le cuir dans ses propres buts (2-0, 17e minute).
Après moins d’une moitié de mi-temps, il faut déjà enregistrer la faillite d’une défense française aux allures de bric-à-brac, tant il parait évident que Boumsong et Abidal, qui n’ont que deux minutes de vécu international commun derrière eux, sont dépassés par les événements et la vitesse d’exécution d’une équipe roumaine profitant à plein des dimensions réduites du terrain. Tout cela était prévisible…
Ribéry sonne le réveil
A l’approche du dernier quart d’heure de la première période, les Bleus semblent enfin s’extirper du cauchemar. Les passes sont mieux assurées, les attaques moins anodines. Ribéry tombe dans la surface, Malouda tente sa chance de loin : rien de bien inquiétant pour Lobont, mais un début de révolte illustrée par une reprise à bout portant d’Henry forçant le portier roumain à sa première véritable intervention… après 35 minutes.
La Roumanie s’est endormie. Logique dès lors que, bien servi par Gourcuff, Ribéry puisse entrer dans la surface et armer une frappe sèche qui trompe Lobont et redonne espoir aux Français (2-1, 37e minute).
Raymond Domenech décide dans la foulée de remplacer Malouda par Benzema. L’attaquant lyonnais rejoint Henry à la pointe de l’attaque, Ribéry retrouve son côté favori, le gauche : les Bleus dominent franchement les dernières minutes, malgré une superbe action de l’excellent Muresan côté droit qui trouve Mutu, dont la tête passe juste au dessus des buts français (45e minute). Les Roumains rentrent aux vestiaires avec un avantage d’un but tout à fait mérité, mais on sent que les Français n’ont pas dit leur dernier mot.
Le chef d’œuvre de Gourcuff
La preuve : la première frappe cadrée de la seconde mi-temps est signée Ribéry, qui force Lobont à se coucher (47e). Le milieu du Bayern, véritable patron du jeu français, sert dans la foulée Henry, dont le tir part dans les étoiles. La pression française est de plus en plus nette, corners et coups-francs près de la surface adverse se multiplient : Toulalan trouve la tête de Benzema, lancé à toute allure, mais Lobont s’interpose (60e).
Le gardien roumain réussit ensuite deux parades aussi spectaculaires que décisives, coup sur coup, devant Henry et Gourcuff, confirmant qu’il est l’un des spécialistes les plus sous-estimés du continent (65e).
Déjà plaisant, le match devient carrément passionnant, jusqu’au chef d’œuvre de Yoann Gourcuff : frappe surpuissante de plus de 30 mètres, pile sous la barre transversale. Imparable ! Les Bleus, qui n’avaient plus marqué depuis une éternité sur une telle phase de jeu, égalisent en toute logique grâce à l’étincelant Bordelais, déjà formidable face à la Serbie, et qui marque son premier but en équipe nationale. Ô combien important (2-2, 69e minute)…
Nouveau sursis pour Domenech ?
Dépités, autant par la tournure des événements que par les sorties conjuguées de Mutu et F. Petre, les premiers spectateurs désertent les tribunes. On ne reconnait plus les Roumains, pourtant si fringants en début de rencontre. Ribéry est à deux doigts de donner la victoire aux Français, mais son tir, au terme d’une magnifique action collective, passe juste à droite des buts de Lobont (81e). Les Français vont-ils l’emporter sur le fil ?
Le temps règlementaire est presque terminé, Domenech lance dans le grand bain le Rennais Jimmy Briand en lieu et place de l’indispensable Ribéry. Anecdotique : l’arbitre belge Frank De Bleeckere siffle la fin de la rencontre sur un match nul de bon niveau qui n’arrange personne au final, la France restant 4e du groupe 7 avec 4 points (comme l’Autriche), contre 6 aux Serbes et aux Lituaniens… Hormis les deux sélectionneurs menacés, qui vont peut-être bénéficier d’un nouveau sursis. « C’est un match nul qui ressemble à une victoire », conclut Abidal. Sauf sur les plans comptable et défensif.
Prochain match des Bleus, un amical mardi au stade de France face à la Tunisie. Retour des éliminatoires en mars 2009, contre la Lituanie.
Les équipes |
Roumanie : Lobont – Ogararu, Goian, Tamas, Rat – Muresan, Cocis, Chivu – F. Petre, Marica, Mutu. Remplacements : Mutu par Costea (74e), F. Petre par Bucur (74e). France : Mandanda - Sagna, Boumsong, Abidal, Evra – A. Diarra, Toulalan – Ribéry, Gourcuff, Malouda – Henry. Remplacements : Malouda par Benzema (38e), Ribéry par Briand (90e). Avertissements : Boumsong (33e), Toulalan (62e). Arbitre : Frank De Bleeckere (Belgique) |