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Les éliminés des quarts de finale
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Indéchiffrable
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Hocine Achiou, en train de célèbrer le but exceptionnel qu'il a inscrit face à l'Egypte, a largement participé au renouveau de l'Algérie. (Photo AFP)
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L'heure des premiers bilans a sonné. Entre ceux qu'on annonçait vainqueurs probables, à l'instar des finalistes de la dernière CAN, et ceux qui ont fait leur retour après une longue, parfois très longue, absence, la CAN a étonné.
De notre envoyé spécial en Tunisie
A la veille de la CAN 2004, sollicités de toutes parts, nous avions formulé quelques analyses dont nous savions qu’elles risquaient d’être infirmées par le terrain. Placer le Cameroun, lauréat des deux dernières éditions, le Sénégal, quart de finaliste de la dernière Coupe du monde, la Tunisie, pays organisateur et le Nigeria, au potentiel considérable, parmi les premiers favoris de l’édition en cours ne relevait pas d’une grande audace, pas plus que d’une grande originalité. Le Mali figurait au rang de premier outsider, à la lecture de ses performances d’il y a deux ans, mais réalisées devant son public. Nous avions oublié le Maroc qui avait inscrit dix buts sans en encaisser un seul lors de la phase éliminatoire, dans un groupe, reconnaissons-le, largement à sa portée, ainsi que l’Algérie qui se présentait sur la ligne de départ avec une formation très profondément renouvelée.
Cameroun
Les deux derniers finalistes ont tous les deux manqué de cet entrain, de cet allant, de cet enthousiasme et pour quelques joueurs de leur meilleur forme physique, pour aller plus loin dans une épreuve extrêmement ouverte. Personne n’était et ne reste au-dessus du lot, les challengers ayant parfaitement joué leur rôle. Le Cameroun, souvent assoiffé de conquête, a pêché au niveau de sa défense avec les débuts difficiles de son gardien Kameni. Le champion olympique de Sydney ne joue pas avec son club du Havre pour des raisons obscures et rien ne remplace la compétition. Il s’est rétabli lors de son quart de finale, en accomplissant un sans faute, mais sa défense centrale ne l’a pas vraiment aidé. Le capitaine Rigobert Song n’était pas au mieux physiquement et a commis, avant et pendant le quart de finale, quelques bévues qui n’ont pas rassuré le groupe. Son entente avec Mettomo n’a pas toujours été des plus convaincantes.
Le milieu de terrain des Lions indomptables ne possède pas la tête pensante qui pourrait varier les combinaisons, donner le bon tempo à un ensemble qui a tendance à aller trop de l’avant. Samuel Eto’o, porté aux nues après la Coupe des Confédérations, n’a jamais su concrétiser les opportunités créées par sa pointe de vitesse. Quant à Patrick Mboma, son coup du chapeau contre le Zimbabwe a fait illusion. Lors des deux rencontres suivantes, il est resté muet. L’avenir est loin d’être garanti dans des éliminatoires du Mondial 2006 qui s’annoncent redoutables avec notamment, dans son groupe, l’Egypte et davantage encore la Côte d’Ivoire, principal manquant en Tunisie.
Sénégal
Un Cameroun en petite forme, pas à l’aise dans son nouveau maillot une-pièce, allait-il céder son fauteuil à son dauphin de 2002? Nul n’en doutait au Sénégal. Mieux, une partie du public imaginait que le trophée lui revenait de plein droit, compte tenu de ses exploits asiatiques. C’était trop simple. La CAN ne se joue pas avant son coup d’envoi. Très sincèrement, sur les échos qui nous arrivaient régulièrement de Dakar, nous pouvions légitimement entretenir quelques incertitudes. Certains des titulaires ne l’étaient pas dans leurs clubs, d’autres dormaient sur leurs lauriers, les derniers enfin voyaient plus beaux qu’ils ne sont. L’absence de Khalilou Fadiga allait se révéler un mal incurable. Véritable gaucher, sa lecture du jeu, sa capacité d’accélération sur son côté, il était une pièce-maîtresse des Lions de la Teranga. Un seul être vous manque et l’équipe boîte, perd son équilibre. Un constat que chacun a pu faire en Tunisie.
Par ailleurs Guy Stéphan a peut-être commis l’erreur de ne pas aligner Mamadou Niang, un véritable buteur, lors du match contre la Tunisie. Il est naturellement trop tard pour refaire le match. Le Sénégal demeure une vraie valeur du football africain. Il suffit de remettre quelques idées en place, de redescendre les pieds sur terre et de déterminer le rôle exact affecté à El Hadji Diouf, soliste très doué, sûrement pas attaquant de pointe, mais un homme qui, par ses improvisations, son jeu unique, doit simplifier son jeu et le rendre plus efficace au bénéfice de la collectivité.
Algérie
L’Algérie était venue chez son voisin sans savoir où elle en était, avec beaucoup de joueurs qui découvraient la sélection. Sa vertu première, nous confiait l’ancien international et entraîneur de la sélection, Rachid Mekloufi, est son courage. Celui de ne jamais abdiquer, celui de se battre jusqu’au bout, une attitude qui s’est révélée largement payante, même si elle a fini par céder, comme elle avait gagné auparavant, dans les toutes dernières minutes de son quart de finale face au Maroc. Un retour de bâton qui n’est pas un drame. Le frémissement de sa part qu’on attendait depuis de nombreuses années est devenu une quasi certitude : l’Algérie est en passe de retrouver une équipe nationale.
Rabah Saadane, dans des conditions difficiles, a insufflé une nouvelle inspiration. Peu avant la CAN, des entraîneurs étrangers avaient été sollicités. Heureusement que les accords n’ont pu être trouvés. On ne sait pas si le onze algérien y aurait gagné quelque chose. Le retour de l’Algérie, s’il se confirme, est une des meilleures nouvelles de la CAN que nous vivons actuellement. Si elle retrouve sa vivacité, sa technique des années 80, alors les Fennecs joueront, à nouveau, un rôle important sur le continent. Pourquoi pas dès l’horizon 2006 avec un groupe éliminatoire très dense mais pas inaccessible (Nigéria, Zmbabwe, Angola, Gabon et Rwanda).
Guinée
Ce n’est pas cette année encore que le Syli National entrera dans le carré d’as. Et pourtant, son quart de finale avec le Mali est assurément le plus beau match du tournoi, le plus agréable à suivre, les deux formations ayant développé un football technique, inspiré, un jeu de séduction. Les Guinéens semblaient mériter la victoire ayant développé des arguments supérieurs à ceux de son rival. Les Mansaré, Youla, Titi Camara ont fait tourner la tête des défenseurs maliens et assuré le spectacle. Une petite féerie qui aurait mérité meilleur sort. Peut-être a-t-il manqué à la Guinée l’efficacité d’un Frédéric Kanouté qui, pour leur malheur, évoluait dans l’équipe adverse. Si la Guinée prend conscience qu’elle a fait une très bonne CAN et qu’avec quelques retouches elle peut titiller voire mettre à la raison les présumés grands, alors Conakry doit se convaincre que son équipe n’a pas perdu son temps et qu’au contraire, le soleil se lève à nouveau après une interminable éclipse.
La situation reste indéchiffrable car pas plus aujourd’hui qu’hier, on ne peut avancer le nom du futur vainqueur de cette CAN. Le plus important, c’est que les bonnes nouvelles sont nombreuses, que les retardataires ont recollé au peloton. Qui osera prétendre que le cru 2004 aura été un cru médiocre ? C’est tout le contraire. En attendant le dénouement.
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Gérard Dreyfus 09/02/2004
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