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Argent sale

Monaco montré du doigt

Conduite notamment par les députés socialistes Vincent Peillon et Arnaud Montebourg, la mission parlementaire d'information sur la délinquance financière et le blanchiment des capitaux en Europe a déjà effectué plusieurs visites de travail à l'étranger (Chypre, Gibraltar, la Suisse) et rendu public un premier rapport d'étape sur le Liechtenstein. La mission devrait remettre son rapport final d'ici la mi-juillet. Eclairage sur les pratiques rencontrées dans la principauté de Monaco qui vient à son tour d'être épinglée.
Cette fois-ci, ce ne sera pas la famille turbulente du Rocher monégasque qui fera la Une des journaux, mais bel et bien son statut très particulier de «paradis fiscal». Monaco qui vient, en effet, de faire l'objet d'un rapport d'étape intitulé Principauté de Monaco et blanchiment: un territoire complaisant sous protection française et dirigé par des parlementaires français, est qualifié de «l'un des territoires les plus hypocrites dans la lutte contre le blanchiment de l'argent sale». Arnaud Montebourg, rapporteur de la mission va même plus loin en parlant d'«Etat hypocrite», ajoutant que «la loi monégasque est une vitrine dont l'arrière-boutique accueille des activités moins reluisantes». La mission reproche essentiellement à la principauté d'abriter un centre offshore favorable au blanchiment dont se servent les criminels financiers. Mécanisme «non seulement toléré mais organisé» pour attirer des richesses vers le Rocher.

Monaco qui dispose d'un régime fiscal permettant à ses citoyens et à certains résidents de ne pas payer d'impôt sur le revenu ni sur la fortune est un lieu rêvé pour tous ceux qui veulent mettre à l'abri des regards indiscrets des fortunes colossales. «L'absence de déontologie bancaire rigoureuse, l'existence d'une législation qui garantit l'anonymat des transactions, un casino sans contrôle, une coopération administrative et judiciaire internationale défaillante, font de Monaco un lieu propice au blanchiment des capitaux» résume Arnaud Montebourg. Le rapport reproche également vivement à la France de protéger et de financer ce «paradis fiscal, fiduciaire et judiciaire», mettant ainsi Paris dans une situation pour le moins délicate et embarrassante. La mission pense que la France devrait «envisager sérieusement la remise à plat de ses accords avec Monaco» rappelant que l'implication française dans le fonctionnement des structures décisionnelles monégasques «contribue à discréditer» sa volonté politique de lutter contre le blanchiment d'argent sale.

Le rapport précise aussi qu'en 1998, les établissements bancaires installés dans la principauté géraient 340 109 comptes dont 112 988 au profit de particuliers résidents, 18 692 au profit d'entreprises mais surtout 206 975 (soit 60,9%) au profit de personnes physiques ou morales non résidentes, alors que la population totale monégasque s'élève à 30 000 habitants! Le Rocher compte ainsi dix fois plus de comptes courants que de résidents.

La mission propose, en conclusion la mise en place d'un «système de contrôle bancaire rigoureux, l'existence d'une législation permettant de se prémunir contre l'anonymat des transactions, la garantie d'une coopération internationale policière, judiciaire, efficace, accordée en matière pénale face à l'afflux inévitable de capitaux résultant de l'existence d'une fiscalité privilégiée».



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 22/06/2000