Proche-Orient
Camp David II: le sauvetage
En conviant à Camp David le premier ministre israélien Ehoud Barak et le président de l'Autorité palestinienne Yasser Arafat, le président Clinton tente de sortir le processus de paix de l'impasse dans laquelle il se trouve depuis de nombreux mois. Une initiative hardie, mais aussi un pari risqué.
A six mois de la fin de son mandat, et à deux mois seulement de l'échéance du 13 septembre qui marque la fin de la période d'autonomie prévue par les accords d'Oslo, le président américain a voulu forcer le destin. Bill Clinton veut effacer l'affaire Lewinsky et quitter la présidence sur un succès de politique étrangère. Quel meilleur choix que ce dossier du Moyen-Orient dans lequel il s'est tant impliqué depuis sept ans, lui qui a gagné la confiance des Israéliens comme celle des Palestiniens !
Bill Clinton a donc convoqué ûil n'y a pas d'autre termeû Ehoud Barak et Yasser Arafat. Avec réticence, l'un et l'autre ont déféré à cette convocation. Impossible de faire autrement et de risquer de s'aliéner les Etats-Unis. Mais le chef du gouvernement israélien, voici quelques jours, évaluait avec un optimisme forcé à 50% les chances de réussite du sommet. Quant à Yasser Arafat, il ne voulait carrément pas venir, craignant de se voir forcer de nouvelles concessions. L'expérience des précédentes rencontres ne lui donne pas nécessairement tort sur ce point. Mais le souci de ne pas apparaître aux yeux de la communauté internationale comme le responsable d'un échec l'a conduit à se résigner à accepter l'invitation.
Yasser Arafat a maintes fois averti : en l'absence d'accord d'ici au 13 septembre, il proclamera unilatéralement l'indépendance de l'Etat palestinien. Ehoud Barak, qui n'est pas opposé, contrairement à ses prédécesseurs, à l'idée d'un Etat palestinien, a rétorqué qu'en cas de proclamation unilatérale, Israël annexera les territoires restant sous son contrôle.
Pour sortir du blocage, Bill Clinton a donc choisi de rééditer la méthode qui avait permis d'aboutir à la paix israélo-égyptienne en 1978. Jusqu'au cadre retenu : Camp David, la résidence d'été des présidents américains où, naguère, Begin et Sadate avaient vécu reclus douze jours durant en présence de Jimmy Carter.
Un mauvais accord pis que le statu quo
Il n'est pas sûr, pourtant, que la magie opère cette fois. Israël et l'Egypte devaient briser un mur d'incompréhension et de méconnaissance. Mais depuis 1993, Israéliens et Palestiniens se connaissent et se comprennent parfaitement. Simplement, leur désaccord porte sur des questions infiniment plus compliquées que celles qui opposaient Israël à l'Egypte. De plus, Carter n'avait fixé aucune limite de temps à sa présence aux côtés de Sadate et Begin, alors que Clinton a déjà fait savoir qu'il s'envolait pour le Japon le 19 juillet afin de participer au G8. A moins qu'un accord soit trouvé d'ici là, il faudra prévoir une seconde session en août. Entre-temps, les protagonistes devront avoir examiné le document de travail rédigé par les Américains servant de base à un accord.
L'absence d'accord serait une mauvaise nouvelle pour Bill Clinton, mais elle serait catastrophique pour les Israéliens et les Palestiniens. Au Proche-Orient, il n'y a pas de statu quo : la paix avance, ou elle recule. Les Palestiniens ne veulent plus entendre parler d'accord transitoire. Mais un mauvais accord définitif serait sans doute pis que l'absence d'accord.
A Camp David, un président en fin de mandat et presque sans pouvoirs reçoit deux dirigeants très affaiblis. Yasser Arafat, discrédité chez lui par ses concessions successives à Israël, qui a déjà reporté une fois la proclamation de l'Etat palestinien, ne peut plus se permettre de nouveaux reculs, sauf à risquer l'explosion d'une Intifada déjà rampante, dirigée cette fois non plus contre Israël mais contre son autorité. Ehoud Barak, dont la majorité vole en éclat, vient d'échapper de justesse à une motion de censure. Pourtant, jamais jusqu'alors le premier ministre israélien n'avait réussi comme il l'a fait lundi à la Knesset à s'affranchir des contingences politiciennes pour mettre en avant le mandat qu'il a reçu directement du peuple israélien le 17 mai 1999 : parvenir à la paix avec ses voisins arabes. Quant au leader palestinien, malade et discrédité, on aurait tort de le considérer trop vite comme un homme fini : jamais Yasser Arafat n'est meilleur que dans l'adversité, il l'a abondamment prouvé tout au long de sa vie mouvementée.
Au fond, cette faiblesse partagée des trois leaders qui se retrouvent à Camp David est peut-être leur véritable force : ils ont finalement si peu à perdre, et tant à réussir que l'impossible n'est peut-être pas complètement hors de portée.
Bill Clinton a donc convoqué ûil n'y a pas d'autre termeû Ehoud Barak et Yasser Arafat. Avec réticence, l'un et l'autre ont déféré à cette convocation. Impossible de faire autrement et de risquer de s'aliéner les Etats-Unis. Mais le chef du gouvernement israélien, voici quelques jours, évaluait avec un optimisme forcé à 50% les chances de réussite du sommet. Quant à Yasser Arafat, il ne voulait carrément pas venir, craignant de se voir forcer de nouvelles concessions. L'expérience des précédentes rencontres ne lui donne pas nécessairement tort sur ce point. Mais le souci de ne pas apparaître aux yeux de la communauté internationale comme le responsable d'un échec l'a conduit à se résigner à accepter l'invitation.
Yasser Arafat a maintes fois averti : en l'absence d'accord d'ici au 13 septembre, il proclamera unilatéralement l'indépendance de l'Etat palestinien. Ehoud Barak, qui n'est pas opposé, contrairement à ses prédécesseurs, à l'idée d'un Etat palestinien, a rétorqué qu'en cas de proclamation unilatérale, Israël annexera les territoires restant sous son contrôle.
Pour sortir du blocage, Bill Clinton a donc choisi de rééditer la méthode qui avait permis d'aboutir à la paix israélo-égyptienne en 1978. Jusqu'au cadre retenu : Camp David, la résidence d'été des présidents américains où, naguère, Begin et Sadate avaient vécu reclus douze jours durant en présence de Jimmy Carter.
Un mauvais accord pis que le statu quo
Il n'est pas sûr, pourtant, que la magie opère cette fois. Israël et l'Egypte devaient briser un mur d'incompréhension et de méconnaissance. Mais depuis 1993, Israéliens et Palestiniens se connaissent et se comprennent parfaitement. Simplement, leur désaccord porte sur des questions infiniment plus compliquées que celles qui opposaient Israël à l'Egypte. De plus, Carter n'avait fixé aucune limite de temps à sa présence aux côtés de Sadate et Begin, alors que Clinton a déjà fait savoir qu'il s'envolait pour le Japon le 19 juillet afin de participer au G8. A moins qu'un accord soit trouvé d'ici là, il faudra prévoir une seconde session en août. Entre-temps, les protagonistes devront avoir examiné le document de travail rédigé par les Américains servant de base à un accord.
L'absence d'accord serait une mauvaise nouvelle pour Bill Clinton, mais elle serait catastrophique pour les Israéliens et les Palestiniens. Au Proche-Orient, il n'y a pas de statu quo : la paix avance, ou elle recule. Les Palestiniens ne veulent plus entendre parler d'accord transitoire. Mais un mauvais accord définitif serait sans doute pis que l'absence d'accord.
A Camp David, un président en fin de mandat et presque sans pouvoirs reçoit deux dirigeants très affaiblis. Yasser Arafat, discrédité chez lui par ses concessions successives à Israël, qui a déjà reporté une fois la proclamation de l'Etat palestinien, ne peut plus se permettre de nouveaux reculs, sauf à risquer l'explosion d'une Intifada déjà rampante, dirigée cette fois non plus contre Israël mais contre son autorité. Ehoud Barak, dont la majorité vole en éclat, vient d'échapper de justesse à une motion de censure. Pourtant, jamais jusqu'alors le premier ministre israélien n'avait réussi comme il l'a fait lundi à la Knesset à s'affranchir des contingences politiciennes pour mettre en avant le mandat qu'il a reçu directement du peuple israélien le 17 mai 1999 : parvenir à la paix avec ses voisins arabes. Quant au leader palestinien, malade et discrédité, on aurait tort de le considérer trop vite comme un homme fini : jamais Yasser Arafat n'est meilleur que dans l'adversité, il l'a abondamment prouvé tout au long de sa vie mouvementée.
Au fond, cette faiblesse partagée des trois leaders qui se retrouvent à Camp David est peut-être leur véritable force : ils ont finalement si peu à perdre, et tant à réussir que l'impossible n'est peut-être pas complètement hors de portée.
par Olivier Da Lage
Article publié le 11/07/2000