Côte d''Ivoire
Alpha Blondy: <br> <i>"La Côte d'Ivoire n'est pas une République bananière"</i><br> <br>
Star internationale et personnalité très écoutée en Côte d'Ivoire, Alpha Blondy est inquiet. Après avoir dénoncé les excès de l'ex-président Bédié, puis salué le "coup d'Etat de Noël", le chanteur de reggae met en garde contre l'exclusion d'Alassane Ouattara de la prochaine présidentielle qui risque selon lui "d'embraser le pays". Il se dit également déçu par la candidature du général Gueï, qu'il considère comme une trahison.
RFI: Pour l'Ivoirien que vous êtes, que pensez-vous du spectacle politique donné à Abidjan ces dernières semaines?
Alpha Blondy: Moi, je souhaiterais d'ores et déjà que tous les candidats se présentent. Et que les gens ne s'amusent pas s'ils ne veulent pas embraser la Côte d'Ivoire à recaler M. Alassane Ouattara. Ce serait dommage de piper les dés à une période aussi critique que celle que nous vivons aujourd'hui en Côte d'Ivoire. Ca, c'est d'un. De deux, je suis contre la candidature du Général Gueï. Parce que, quand le général a pris le pouvoir, ce jour-là, il a dit qu'il n'était pas intéressé par la présidence. Et, je me suis, moi Alpha Blondy, attelé à défendre l'homme de parole qu'il représentait. L'espoir que les Ivoiriens comme moi plaçaient en lui pour servir de repère, pour arbitrer toute la scène politique. Mais que lui, il se dédise comme ça, je dis non, il n'a pas le droit de trahir notre confiance. Quand il dit qu'il est au-dessus de tous les partis politiques, je dis beaucoup mieux, il est au dessus des partis politiques et au-dessus des élections. Il ne peut donc pas être juge et partie. De grâce mon Général! Ca c'est le propre des républiques bananières. Ceux qui vous disent de vous présenter vont vous trahir, je suis prêt à mettre ma main au feu.
RFI: Aujourd'hui que le général Gueï est candidat, que pouvez-vous faire?
A.B: C'est ce que je viens de faire. Ce serait de la "non-assistance à général en danger" que de ne rien dire. Je préfère comme toujours, dire ce que je pense du fond de mon c£ur. Je pense que s'il est candidat, s'il est élu, il sera trahi. Un général quand il donne sa parole, il la respecte. Mesdames et messieurs, un général, ce n'est pas Alpha Blondy qui peut dire c'est blanc ce matin et dans la soirée, dire c'est noir. Non. Et surtout pas maintenant en Côte d'Ivoire. En Côte d'Ivoire où il n'y a plus de repères, les querelles politiciennes entre politiciens ivoiriens ont emmené ce coup d'Etat. Alors, on ne va pas recommencer.
RFI: Alpha Blondy, que pensez-vous du soutien du PDCI à Emile Constant Bombet?
A.B: C'est le deuxième coup d'Etat qui a renversé Bédié. Maintenant, Bédié doit savoir qu'il n'était entouré que de petits traîtres et qu'il aurait dû écouter des gens comme Alpha Blondy et beaucoup de musiciens qui lui disaient: "Tu es mal conseillé". Aujourd'hui, il n'a que ses yeux pour pleurer.
RFI: Alpha Blondy, comment se terminera ce processus de transition en Côte d'Ivoire?
A.B: Moi je suis pessimiste. Dès l'instant où le Général a posé sa candidature, je me suis dit qu'il a discrédité le CNSP et en même temps il a raté son entrée dans l'histoire de la Côte d'Ivoire. Je te promets que les Ivoiriens et les non Ivoiriens, la communauté internationale avaient placé beaucoup d'espoir en lui. Je ne sais pas si c'est à cause des 15 milliards de F CFA que chaque président doit avoir par an qu'il a dit oui. Dans le cas contraire qu'il nous dise sur quels critères on l'a blagué pour qu'il s'engage. Mais je suis très sceptique et j'ai peur pour lui.
RFI: Vous êtes déçu, vous êtes irrité?
A.B: De voir que la Côte d'Ivoire commence à briller par toute cette cacophonie politique, oui. Je suis déçu de la famille politique ivoirienne. J'avais placé tellement d'espoir en monsieur Gueï que je me sens personnellement trahi.
RFI: Est-ce que, selon vous, c'est de l'ingérence de la part des Français ou d'autres, de recommander que l'élection soit ouverte?
A.B: Non, pas du tout. Il y a l'ingérence coupable, et la non-ingérence coupable. Aujourd'hui, si les Français ne disent rien, c'est de la non-ingérence coupable. De grâce! Quand quelque chose ne va pas, on a tous besoin d'amis même en tant qu'individu. C'est quelle Côte d'Ivoire que nous voyons-là? Soyons justes, OK? Qu'on dépassionne ce débat! On n'est pas entre ennemis, alors tous ceux qui se prétendent ivoiriens et qui sont prêts à brader la paix civile en Côte d'Ivoire pour assouvir leurs ranc£urs tribales et ethniques peuvent se rhabiller.
RFI: Revenons à la chanson. Alpha Blondy, "La démocrature", titre de votre dernier album, c'est quoi exactement?
A.B: "La démocrature", c'est une "démocratie" à base de tortures et de dictature, comme le sentier sur lequel la Côte d'Ivoire vient de s'engager. Déjà, on avait commencé lorsque les geôliers de la première République avaient enchaîné Blé Goudé pour avoir revendiqué le droit des étudiants. Ils n'ont pas le droit d'enchaîner l'Université. C'était très symbolique. C'était un début de "démocrature". Et aujourd'hui, on n'a pas le droit de frapper des gens qui font un sit-in pour exprimer leur opinion. C'est leur opinion, c'est ce qu'ils pensent. C'est encore une manifestation de la "démocrature". Et puis n'oublions pas, aujourd'hui il y a ceux qui sont du bon côté du fusil et il y a ceux qui sont du mauvais côté. Mais ça peut changer. Alors mes frères Ivoiriens, ressaisissons-nous! Dans cette armée ivoirienne, on a tous un parent. On dit que c'est une affaire militaire. Les militaires à part la tenue, ce sont des civils, ce sont des enfants, ce sont nos petits frères. Alors, on ne va pas continuer la bêtise. Pour dire quoi? Qu'ils vont se massacrer entre eux? Ils n'ont pas la tête ou quoi!
Alpha Blondy: Moi, je souhaiterais d'ores et déjà que tous les candidats se présentent. Et que les gens ne s'amusent pas s'ils ne veulent pas embraser la Côte d'Ivoire à recaler M. Alassane Ouattara. Ce serait dommage de piper les dés à une période aussi critique que celle que nous vivons aujourd'hui en Côte d'Ivoire. Ca, c'est d'un. De deux, je suis contre la candidature du Général Gueï. Parce que, quand le général a pris le pouvoir, ce jour-là, il a dit qu'il n'était pas intéressé par la présidence. Et, je me suis, moi Alpha Blondy, attelé à défendre l'homme de parole qu'il représentait. L'espoir que les Ivoiriens comme moi plaçaient en lui pour servir de repère, pour arbitrer toute la scène politique. Mais que lui, il se dédise comme ça, je dis non, il n'a pas le droit de trahir notre confiance. Quand il dit qu'il est au-dessus de tous les partis politiques, je dis beaucoup mieux, il est au dessus des partis politiques et au-dessus des élections. Il ne peut donc pas être juge et partie. De grâce mon Général! Ca c'est le propre des républiques bananières. Ceux qui vous disent de vous présenter vont vous trahir, je suis prêt à mettre ma main au feu.
RFI: Aujourd'hui que le général Gueï est candidat, que pouvez-vous faire?
A.B: C'est ce que je viens de faire. Ce serait de la "non-assistance à général en danger" que de ne rien dire. Je préfère comme toujours, dire ce que je pense du fond de mon c£ur. Je pense que s'il est candidat, s'il est élu, il sera trahi. Un général quand il donne sa parole, il la respecte. Mesdames et messieurs, un général, ce n'est pas Alpha Blondy qui peut dire c'est blanc ce matin et dans la soirée, dire c'est noir. Non. Et surtout pas maintenant en Côte d'Ivoire. En Côte d'Ivoire où il n'y a plus de repères, les querelles politiciennes entre politiciens ivoiriens ont emmené ce coup d'Etat. Alors, on ne va pas recommencer.
RFI: Alpha Blondy, que pensez-vous du soutien du PDCI à Emile Constant Bombet?
A.B: C'est le deuxième coup d'Etat qui a renversé Bédié. Maintenant, Bédié doit savoir qu'il n'était entouré que de petits traîtres et qu'il aurait dû écouter des gens comme Alpha Blondy et beaucoup de musiciens qui lui disaient: "Tu es mal conseillé". Aujourd'hui, il n'a que ses yeux pour pleurer.
RFI: Alpha Blondy, comment se terminera ce processus de transition en Côte d'Ivoire?
A.B: Moi je suis pessimiste. Dès l'instant où le Général a posé sa candidature, je me suis dit qu'il a discrédité le CNSP et en même temps il a raté son entrée dans l'histoire de la Côte d'Ivoire. Je te promets que les Ivoiriens et les non Ivoiriens, la communauté internationale avaient placé beaucoup d'espoir en lui. Je ne sais pas si c'est à cause des 15 milliards de F CFA que chaque président doit avoir par an qu'il a dit oui. Dans le cas contraire qu'il nous dise sur quels critères on l'a blagué pour qu'il s'engage. Mais je suis très sceptique et j'ai peur pour lui.
RFI: Vous êtes déçu, vous êtes irrité?
A.B: De voir que la Côte d'Ivoire commence à briller par toute cette cacophonie politique, oui. Je suis déçu de la famille politique ivoirienne. J'avais placé tellement d'espoir en monsieur Gueï que je me sens personnellement trahi.
RFI: Est-ce que, selon vous, c'est de l'ingérence de la part des Français ou d'autres, de recommander que l'élection soit ouverte?
A.B: Non, pas du tout. Il y a l'ingérence coupable, et la non-ingérence coupable. Aujourd'hui, si les Français ne disent rien, c'est de la non-ingérence coupable. De grâce! Quand quelque chose ne va pas, on a tous besoin d'amis même en tant qu'individu. C'est quelle Côte d'Ivoire que nous voyons-là? Soyons justes, OK? Qu'on dépassionne ce débat! On n'est pas entre ennemis, alors tous ceux qui se prétendent ivoiriens et qui sont prêts à brader la paix civile en Côte d'Ivoire pour assouvir leurs ranc£urs tribales et ethniques peuvent se rhabiller.
RFI: Revenons à la chanson. Alpha Blondy, "La démocrature", titre de votre dernier album, c'est quoi exactement?
A.B: "La démocrature", c'est une "démocratie" à base de tortures et de dictature, comme le sentier sur lequel la Côte d'Ivoire vient de s'engager. Déjà, on avait commencé lorsque les geôliers de la première République avaient enchaîné Blé Goudé pour avoir revendiqué le droit des étudiants. Ils n'ont pas le droit d'enchaîner l'Université. C'était très symbolique. C'était un début de "démocrature". Et aujourd'hui, on n'a pas le droit de frapper des gens qui font un sit-in pour exprimer leur opinion. C'est leur opinion, c'est ce qu'ils pensent. C'est encore une manifestation de la "démocrature". Et puis n'oublions pas, aujourd'hui il y a ceux qui sont du bon côté du fusil et il y a ceux qui sont du mauvais côté. Mais ça peut changer. Alors mes frères Ivoiriens, ressaisissons-nous! Dans cette armée ivoirienne, on a tous un parent. On dit que c'est une affaire militaire. Les militaires à part la tenue, ce sont des civils, ce sont des enfants, ce sont nos petits frères. Alors, on ne va pas continuer la bêtise. Pour dire quoi? Qu'ils vont se massacrer entre eux? Ils n'ont pas la tête ou quoi!
par Propos recueillis par Boniface VIGNON
Article publié le 28/08/2000