Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Koweït

Une plaie mal refermée

Le 2 août 1990, tout a basculé : l'armée irakienne s'empare en quelques heures de son petit voisin, le riche émirat pétrolier du Koweït. Dès lors, le compte à rebours est déclenché. Il aboutit six mois plus tard au bombardement massif de l'Irak par la plus formidable coalition militaire de l'Histoire.
Comme 1948 (création d'Israël) ou 1967 (guerre des Six jours), l'année 1990 est une année charnière pour le Moyen-Orient. Il y a un avant et un après invasion du Koweït. En quelques heures, à l'aube du 2 août, tout à basculé. Pour la première fois depuis la création des Nations Unies, un Etat-membre est totalement envahi, puis annexé.

Le monde arabe, profondément divisé, révèle ses fractures au grand jour. Dix ans plus tard, les plaies ne sont toujours pas refermées et si certains leaders ont quitté la scène régionale et internationale, les rancunes sont tenaces. Jamais dans l'Histoire, une coalition diplomatico-militaire n'avait atteint l'ampleur de la coalition anti-irakienne menée par George Bush. En ce sens, la crise ouverte par l'invasion irakienne de l'émirat, mais pas refermée par la victoire de la coalition, n'est sans doute ni un précédent, ni un exemple, mais une situation unique comme l'Histoire en a souvent connues, rendue possible par la conjonction momentanée d'éléments aussi disparates que la fin de la guerre froide, l'affaiblissement de l'URSS, le souci des Américains de se donner de nouveaux buts stratégiques, les colossales erreurs tactiques et stratégiques de Saddam Hussein, la richesse pétrolière du Golfe, et singulièrement du Koweït, etc.

Pourtant, l'une des conséquences les plus palpables de la crise du Koweït est l'ouverture du processus de paix israélo-arabe à peine plus d'un an après l'intervention militaire irakienne contre son petit voisin : Saddam Hussein avait voulu établir un «lien» entre l'occupation du Koweït et la situation faite aux Palestiniens, c'est aux Américains Bush et Baker qu'il revint de traduire en actes ce «lien» en mettant sur pied la conférence de paix de Madrid en octobre 1991.

Mais la plaie ouverte par l'invasion n'est toujours pas refermée. Frappé d'embargo depuis tout juste dix ans, l'Irak, naguère encore puissance militaire, économique et culturelle au Moyen-Orient, a effectivement été renvoyé à l'âge préindustriel, comme l'avait promis le secrétaire d'Etat américain James Baker à son homologue irakien le 9 janvier 1991 à Genève, quelques jours seulement avant le début des frappes. Une génération entière d'Irakiens est marquée pour la vie par cette épreuve. Il serait illusoire de penser que cela sera sans conséquence pour l'avenir de la région. Sous la contrainte internationale, l'Irak a formellement reconnu l'indépendance et les frontières de l'émirat qu'il avait annexé. Mais les dirigeants irakiens ne font aucun effort pour dissimuler qu'ils considèrent toujours que le Koweït, un jour ou l'autre, devra être rattaché à l'Irak. De gré ou de force.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 01/08/2000