Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Musique sur Internet

MP3 : les initiales qui font peur aux maisons de disques

Une révolution : le mot n'est pas trop fort pour décrire les conséquences de l'Internet pour l'industrie musicale. Au c£ur de ce bouleversement, un procédé qui permet la circulation de son de qualité digitale sur le réseau des réseaux et fait trembler les grandes maisons de disques.
L'Internet est-il une menace pour les maisons de disques ? Le réseau des réseaux implique en tous cas de profonds changements dans l'industrie musicale. Ce grand chambardement tient en trois initiales : MP3. Derrière ce sigle se cache un système qui permet à un propriétaire d'ordinateur de se procurer n'importe quel morceau ou album de son artiste préféré d'un simple clic de souris. Comment ? Grâce au format MP3, abréviation de MPEG1 Audio Player 3, un titre occupe 12 fois moins de place qu'un son enregistré normalement sur le disque dur d'un ordinateur, sans perte de qualité perceptible à l'oreille. Il peut ainsi être diffusé le plus facilement du monde sur le net. Ensuite, n'importe quel internaute dont le terminal est équipé du logiciel approprié peut aller faire son marché sur le réseau mondial.

Résultat : des milliers de personnes se procurent aujourd'hui sur l'un des multiples sites spécialisés le dernier tube de leur chanteur favori qu'ils peuvent aisément télécharger sur leur PC ou leur Macintosh, voire enregistrer sur des CD pouvant contenir jusqu'à deux cent morceaux. L'affaire n'est pas trop grave lorsqu'un particulier se limite à concocter une compilation à usage personnel. L'ennui, c'est que le système commence à être utilisé à grande échelle. A commencer par les as du piratage qui peuvent s'échanger, en quelques minutes et sans s'acquitter du moindre droit, n'importe quel album de Michael Jackson, Céline Dion ou Koffi Olomidé.

Mais si le MP3 préoccupe autant les maisons de disques traditionnelles, ce n'est pas seulement à cause du piratage. Car le système intéresse de plus en plus des artistes soucieux de se débarrasser du carcan des grands distributeurs. Chez les stars, il est de bon ton de proposer en avant-première sur le net un titre de son prochain album. Certains vont même jusqu'à diffuser exclusivement leurs créations sur la toile, comme l'ont fait récemment le chanteur Prince ou les célèbres rappeurs de Public Enemy. Inversement, l'Internet apparaît comme une planche de salut pour des artistes qui ne parviennent pas à s'insérer dans les circuits de distribution traditionnels. Un grand nombre d'entre eux tentent de se faire connaître par ce biais. Parallèlement, des sociétés d'un nouveau type voient le jour. Leur particularité est de ne diffuser leur production que sur le réseau des réseaux, comme Goodnoise Corporation, qui propose un grand nombre de morceaux en format MP3, ou the Internet Underground Music Archive, qui se propose de faire connaître des artistes n'ayant pas signé avec une maison de disques classique. Le mouvement n'en est qu'à ses débuts. Mais il ne fait aucun doute que les majors, les grandes sociétés qui dominent l'industrie du disque, doivent s'adapter à cette nouvelle donne, si elles ne veulent pas perdre des parts de marché.

L'industrie musicale est d'ailleurs sur le pied de guerre avec pour objectif le maintien de son contrôle du secteur. Aux Etats-Unis, la puissante Recording Industry Association of America (RIAA) qui regroupe les grandes entreprises du secteur, y a mis les moyens. L'un de ses derniers faits d'arme a consisté, fin 1998, à tenter d'empêcher en justice, sans succès, la mise sur le marché par la société Diamond Industry d'un baladeur d'un genre nouveau, baptisé Rio, compatible avec le format MP3. Sa particularité ? Il ne comporte, ni K7, ni CD, mais un disque dur de 32 Mégabits et peut se brancher sur un ordinateur. Ce qui offre la possibilité de puiser sur le net tous les titres désirés.

En outre, les cinq majors - Sony, Universal, BMG, Time Warner et EMI - travaillent activement en commun à une technique, alternative au MP3, qui permettrait à la fois d'améliorer la qualité de la transmission du son sur l'Internet et de la sécuriser. «D'une part, le MP3 n'est pas forcément la norme la plus efficace, même pour la vente licite. Il y a peut-être des normes plus performantes, telle que Audiosoft, Liquid Audio ou Madison. Mais, surtout, les majors essayent de trouver un système qui permette une sécurité totale depuis le site jusqu'au consommateur avec la capacité de télécharger un album en 10 minutes», précise Frédéric Goldsmith, directeur juridique du SNEP, le syndicat national français de l'édition phonographique. Une chose est sûre, quels que soient les résultats des efforts en cours pour mieux contrôler le monde musical virtuel, le marché mondial du disque est en train de changer de visage.



par Christophe  Champin

Article publié le 01/11/2000