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Ethiopie-Erythrée<br>

La fin d'une guerre inutile

Le président érythréen Issaias Afeworki et le premier ministre éthiopien Meles Zenawi ont signé ce mardi à Alger un accord de paix mettant officiellement un terme au conflit qui a opposé leurs pays pendant deux ans. Mais la normalisation de leurs relations n'est pas acquise.
A l'heure où l'Afrique fait parler d'elle pour ses conflits interminables, l'Ethiopie et l'Erythrée ont enterrés la hache de guerre, ce 12 décembre. Réunis à Alger, où ils se sont rencontrés pour la première fois depuis 31 mois, le président érythréen et le premier ministre éthiopien ont signé un accord de paix marquant la fin officielle d'un conflit qui a fait plusieurs dizaines de milliers de morts et plus de 1,3 millions de déplacés et disparus.

La partie algérienne, bien sûr, dont les efforts courant 1999 et début 2000 ont largement contribué à la fin des hostilités, mais aussi les secrétaires généraux de l'ONU et de l'OUA, de même que le président en exercice de l'Organisation de l'unité africaine ainsi que les représentants de l'Union européenne, des Etats-Unis et le chef de l'Etat nigérian Obasanjo : la cérémonie organisée dans la capitale algérienne était à la mesure des efforts déployés jusqu'au cessez-le-feu conclu le 18 juin dernier et scrupuleusement respecté depuis. Rarement conflit aura en effet autant mobilisé de bonnes volontés. Après le début des combats en mai 1998, une multitude de médiateurs africains, européens et américains avaient fait, sans succès, la navette entre les deux capitales. Et c'est finalement sous la présidence algérienne de l'OUA que les affrontements opposant deux armées aguerries ont trouvé une issue.

Avec la conclusion des accords d'Alger, c'est la cause la plus évidente de la guerre, un différend frontalier sur plusieurs zones litigieuses envahies par l'Erythrée puis récupérées par l'Ethiopie, qui trouve sa solution. Alors que les Nations Unies ont commencé à déployer les 4 200 hommes de la Mission des Nations Unies pour l'Ethiopie et l'Erythrée (MINUEE), dans la future zone de sécurité située sur la frontière, le texte soumis aux deux belligérants prévoit en effet des procédures de délimitation et démarcation.

«Une relation de bon voisinage est inimaginable»

L'accord d'Alger ne solde toutefois pas l'ensemble des motifs de discorde entre les deux Etats. «Une relation de bon voisinage est inimaginable et n'est pas prévisible avec l'actuel gouvernement en Erythrée», a souligné Meles Zenawi à la veille de la signature. Autrefois alliés dans la lutte contre l'ancien dictateur éthiopien Mengistu, le premier ministre éthiopien et le président Afeworki s'étaient également entendus sur l'indépendance de l'Erythrée, acquise en 1993. Mais par la suite, leurs relations ont tourné au vinaigre, le différend frontalier ne servant en fait que de déclencheur à une guerre dont les causes sont multiples.

«Après plusieurs années d'excellentes relations, la crise entre les deux capitales s'était durcie, notamment sur la question de l'introduction d'une nouvelle devise en Erythrée, sur des accords économiques entre les deux pays et sur l'usage du port d'Assab, a expliqué sur RFI Roland Marchal, chercheur au Centre d'études et de recherches internationales (CERI). C'est sans doute à ce niveau-là que les négociations paraissent difficiles. Cette négociation ne peut être encadrée, en tous les cas dans les termes actuels, par les Nations Unies ou qui que ce soit. Il faut que les deux gouvernements se mettent autour d'une table et débattent de ces problèmes-là.» Il reste que si la normalisation entre Addis-Abeba et Asmara n'est pas acquise, une guerre inutile a bien pris fin à Alger.



par Christophe  Champin

Article publié le 12/12/2000