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Insécurité

Qu'est-ce qu'une «bande» ?

La bande est considérée par les jeunes comme leur deuxième famille. Un refuge pour nombre d'entre eux qui y trouvent un lieu de dialogue, d'écoute, de solidarité affective et d'action. La bande implique le regroupement de plusieurs jeunes partageant les mêmes centres d'intérêt, la même envie de s'amuser ou des objectifs similaires. Dans son adolescence, chacun est plus ou moins membre d'une bande au sens large, c'est-à-dire d'un groupe d'amis. Rien de préoccupant, sauf lorsque les actions de ses membres passent du jeu, de la rigolade, à des activités ou des comportements illégaux, comme la violence gratuite. Or, la violence urbaine est un phénomène collectif. Les infractions qui la constituent sont le plus souvent commises par des groupes de jeunes. Ces derniers sont-ils structurés, organisés ? Ces phénomènes de bandes ont-ils un rapport avec les gangs américains ?

Au fond, qu'est-ce qu'une bande ? Chaque institution a sa propre définition. Pour la police, la bande est un groupe organisé, structuré, autour d'un chef, tourné exclusivement vers la délinquance. Pour les médias, la bande est un regroupement violent de jeunes. Pour la population, la notion de bande n'est pas claire : entre le regroupement bruyant de jeunes dans les cages d'escaliers et les membres des «voyous » américains, les habitants ne font pas toujours la part des choses.

Alors, bande ou gang ? Selon le dictionnaire, la bande est «un groupe d'hommes rangés sous une même bannière, un même chef». C'est également «un groupe organisé et stable de personnes associées pour un dessein» ou encore «un regroupement occasionnel de personnes ayant des points communs». Ainsi, la bande peut tout aussi bien être une bande de joyeux drilles, qu'une bande de casseurs, voire de malfaiteurs de type mafia. Ce qui devient grave.

Entre amusement et violence

Pour les spécialistes, il existerait deux types de bandes : les «bandes ordinaires» peu structurées et les «bandes organisées» à caractère délinquant. Dans les premières, on trouverait en majorité des adolescents de sexe masculin, venant des quartiers en difficulté ; elles seraient des refuges contre l'ennui et la solitude. Les buts de cette bande seraient de s'amuser, d'oublier les contraintes de la vie quotidienne. Dans les secondes, on trouverait des groupes structurés, entretenant volontiers des liens avec des organisations politiques. Elles seraient formées d'adolescents ou de jeunes gens engagés dans des processus de violence et de délinquance. Ces bandes seraient des gangs au sens américain du terme.

D'une manière générale, les adolescents des banlieues cherchent, comme tous les adolescents, à se construire une personnalité à travers un certain nombre d'identifications : famille, école, cinéma et télévision, musique, aspirations professionnelles, héros, bandes de copains, etc. Mais, là où un adolescent issu des classes moyennes peut, en général, trouver un certain équilibre entre ces miroirs dans lesquels il peut se projeter, le jeune issu des banlieues populaires voit cet éventail se réduire peu à peu. L'échec scolaire, l'éclatement de la famille, le manque de perspectives professionnelles, l'absence de relations amoureuses, réduisent son champ d'identification. Il n'empêche -et tous les sociologues sont d'accord sur ce point- que la cité reste l'élément de référence et d'identification pour les jeunes. Ces derniers se définissent par rapport au lieu où ils résident. Ayant grandi dans le quartier, passant la majorité de leur temps libre sur les places publiques ou dans les halls, l'identité du jeune se construit autour de son quartier qui devient une «patrie». D'où la nation de «patriotisme de cité».

Pour comprendre le phénomène des violences urbaines, l'approche territoriale est primordiale. Un priorité : la défense du territoire face aux intrus. Pour ce faire, les jeunes faisant partie des bandes rejetteront tous ceux qui ne font pas partie du quartier. De surcroît, on assiste à une solidarité sans faille entre les jeunes du même quartier. Si un jeune est pris à partie par la police, peu importe ce qu'il aura fait, les jeunes de son quartier se porteront immédiatement à son secours. Paradoxalement, ces jeunes qui n'évoluent qu'en référence à leur quartier sont les premiers à le dégrader. D'un côté, on vilipende l'environnement, de l'autre, on participe à sa dégradation.



par Pierre  DELMAS

Article publié le 30/01/2001