Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Agriculture

Timide présence africaine

Le 38e salon international de l'agriculture (SIA) ouvert à Paris du 18 au 25 février 2001, voit pour la seconde fois la présence de pays africains: Côte d'Ivoire, Sénégal, Tunisie et Madagascar. Mais pour les Africains, ce salon est l'occasion de nouer de solides partenariats économiquesà au-delà du secteur agricole.
Plus de 600 000 visiteurs chaque année, des milliers de professionnels et des centaines de partenaires économiques, des conférences, le salon international de l'agriculture constitue une véritable plate-forme d'échanges. Dans le gigantesque hangar du parc d'exposition de la porte de Versailles, à Paris, saveurs et couleurs africaines se mêlent, depuis peu, à celles du monde entier.

Cette année, seuls quatre pays africains ont pu faire le déplacement: la Côte d'Ivoire, le plus fidèle, le Sénégal, pour la première fois, Madagascar et la Tunisie. Présent l'an dernier, le Mali n'a pu s'offrir de stand d'exposition cette année.
«C'est pas évident pour nous, Africains, remarque Touré Abdoulaye, ingénieur agronome et conseiller technique au ministère ivoirien de l'Agriculture et des Ressources animales. Participer à un salon de cette ampleur coûte cher: cinq millions de francs CFA. Sans compter les frais de déplacement, d'hébergement, de repas des animateurs.» D'où une absence remarquée des agriculteurs ivoiriens. «Mais il y a des opérateurs économiques qui viennent à leurs propres frais, pour prendre des contacts, ajoute le conseiller technique. Ce stand leur sert de relais, puisque nous présentons divers produits fabriqués aussi bien par le secteur public que privé: cacao, café, avocats, bananes, etc.»

Les animateurs sénégalais tiennent quasiment le même discours. «L'intérêt du Sénégal dans ce salon est de montrer au monde entier notre savoir-faire», explique Mamadou Sall, homme d'affaires dans l'agro-alimentaire et coorganisateur du stand. Un savoir-faire qui ne se limite pas aux produits agricoles (arachide, coton, mil, haricots verts, etc.): le Sénégal est aussi venu «vendre» son tourisme. Quelques cartes postales des somptueuses plages dakaroises, des adresses pratiques, des rythmes de Youssou Ndour donnent de l'attrait à l'exposition. «L'alternance politique a favorisé notre participation, précise Mamadou Sall. En plus, la présence du président Wade, reçu dimanche par Jacques Chirac à l'inauguration du salon, est une innovation».

Recherche de partenaires économiques

Mais au-delà des émotions et de la fête, les animateurs africains ne perdent rien de l'objectif essentiellement économique de ce salon. «Nous sommes venus chercher des partenaires, notamment en matière de coopération agricole », rappelle l'Ivoirien Abdoulaye Touré. Mamadou Sall, espère quant à lui que son pays tire un profit important de cette première participation. D'autant que les insuffisances du marché de l'horticulture au Sénégal sont encore, selon lui, loin d'être comblées. «Le pays cultive des produits de contre-saison, haricots verts, tomate-cerises, mangues, qu'il a du mal à écouler, s'indigne l'homme d'affaire. Il existe un véritable problème de fret aérien. Air France et Air Afrique qui avaient le monopole, n'arrivent plus à assurer la totalité des transports de ces produits». A tel point que l'année dernière, Mamadou Sall dit avoir perdu vingt tonnes de haricots verts et pour 2001 encore, il craint le pire.

Le Sénégal et la Côte d'Ivoire sont, avec le Mali, de très gros producteurs agricoles. Le secteur agricole ivoirien emploie par exemple 66% de la population active et rapporte près de 70% des recettes d'exportations (essentiellement grâce au cacao qui confère au pays son rang de premier producteur mondial).

Fort de cet atout, l'Etat ivoirien organise depuis novembre 1997 un salon international de l'agriculture et des ressources animales (SARA). Le SARA, qui se veut un peu à l'image du SIA parisien, a attiré, lors de ses deux premières éditions, une trentaine de pays de la sous-région et plus de 150 000 visiteurs. Pas étonnant que le Sénégal ait, à son tour, mis en place il y a peu une foire internationale de l'agriculture et des ressources animales (FIARA). Les prochaines éditions du FIARA et du SARA se tiendront respectivement en mars 2001 et en novembre 2002.

Si la maladie de la «vache folle» hante les stands européens du SIA, les représentants africains assurent ne pas se sentir tellement concernés par cette question. «Nous disposons de directions de la sécurité alimentaire au ministère de l'Agriculture, confie l'un d'eux, et nous prenons toutes les mesures nécessaires pour éviter de recevoir des viandes contaminées». Avant d'ajouter discrètement: «mais même si aucun pays africain n'a pas encore décelé de cas de vache folle, comment être sûr qu'il n'en existe pas?»




par Luc  Ngowet

Article publié le 20/02/2001