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Premier jour: à Ouaga, tout est possible!

Attentes interminables dans des aéroports d'Europe et d'Afrique, hôtels surbookés, organisation plus qu'approximative: les habitués croyaient avoir tout vu au Fespaco, mais subissaient stoïquement ces avanies, par amour pour le cinéma en général et le cinéma africain en particulier. Cette année, il semble cependant que le festival panafricain du cinéma ait atteint un point de non retour, puisque dimanche matin deux projections étaient annulées... faute de copie!
De notre envoyée spéciale à Ouagadougou

Qui aurait dit, en février 1969, lors de l'ouverture du premier Fespaco (on parlait alors de la «semaine du cinéma») que Ouagadougou deviendrait la capitale du cinéma africain et le festival panafricain du cinéma une institution incontournable, capable de drainer lors de chacune de ses éditions plusieurs milliers de professionnels (réalisateurs, producteurs distributeurs, responsables de chaînes de télévision, critiques...) du monde entier? Le problème est que les organisateurs semblent avoir de plus en plus de mal à contrôler leur festival. Victimes de leur succès? Toujours est-il qu'hier, les festivaliers, levés aux aurores pour voir les premiers films en compétition, s'en sont retournés bredouilles: faute de copie, deux projections ont été annulées.

«Je gagnerai l'érection»

Heureusement, certains avaient pu voir la veille, après la cérémonie d'inauguration au stade du 4 août (couronnée par un concert du Sénégalais Youssou Ndour) Les couilles de l'éléphant, premier long métrage du jeune réalisateur gabonais Joseph Bididi. Dans un stade municipal bourré à craquer, le public a ainsi pu applaudir aux tribulations d'Alevina, député africain sans scrupules et à l'ambition sans bornes, dont la vie s'écroule le jour où sa femme, lassée de ses infidélités, décidé de lui faire jeter un sort (il devient impuissant). Une comédie assez poussive et convenue, mais qui a eu l'heur de plaire aux spectateurs burbinabès, non pas tant pour ses jeux de mots et faux lapsus (lorsqu'Alevina, en réunion avec ses conseillers, assène «Je gagnerai l'érection» -au lieu de l'élection), mais plutôt pour sa description peu amène du petit monde politique africain. Ainsi, lorsque le même député, à quelques jours du scrutin, et alors que les sondages le donnent perdant, réplique, royal, à son conseiller en communication, «de toutes façons, j'ai déjà gagné les élections», le murmure amusé qui parcourut alors le stade municipal ne laissait aucun doute quant à l'état d'esprit du public burkinabè. Pour le reste, au moment où l'hôtel Indépendance, où sont hébergés la plupart des festivaliers, se remplit peu à peu, à l'heure des embrassades et des retrouvailles, on attend avec impatience l'arrivée des copies en retard. Un comble au moment où le Fespaco, pour célébrer le troisième millénaire, prépare un colloque intitulé «Cinéma africain et nouvelles technologies».

Article publié le 23/02/2001