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Travail

Le retour des «petits chefs»

Il y a encore quelques années, le terme «harcèlement moral au travail» n'existait même pas. Aujourd'hui c'est un phénomène social. En France, ce phénomène ou «mobbing», en anglais, fait actuellement l'objet d'une proposition de loi, présentée par le communiste Georges Hage dans le cadre de la modernisation sociale. Une première lecture a eu lieu à l'Assemblée nationale le 12 janvier dernier mais la loi ne devrait être adoptée qu'au printemps 2001. Ce texte ne s'appliquera cependant qu'au secteur privé alors que la fonction publique n'est pas épargnée par ce fléau.
Il ne se passe plus une semaine sans qu'éclate, ici ou là, dans une entreprise ou dans une administration, un conflit social lié au harcèlement moral au travail. Soit c'est un directeur au comportement pour le moins pervers qui inflige à ses subordonnés des remarques désobligeantes soit c'est un «petit chef» qui humilie ses collègues en leur faisant des réflexions outrancières et qui utilise son pouvoir discrétionnaire pour les pousser à la démission.

Par harcèlement moral, entendez : «toute conduite abusive se manifestant notamment par des comportements, des paroles, des gestes ou des écrits pouvant porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l'intégrité physique ou psychique d'une personne, mettant en péril l'emploi de celle-ci ou dégrader le climat de travail» comme l'a définit la psychiatre, Marie-France Hirigoyen, auteur du best-seller «Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien» paru aux Editions Syros en 1998. Le «mobbing», comme le nomment les Anglo-Saxons, se caractérise donc par une accumulation de souffrances personnelles endurées par des salariés : violences verbales, insultes, menaces de sanction, humiliations en public, rétrogradations ou encore chantage au renouvellement des contrats de travail, et qui peuvent, cas extrême, conduire certains d'entre eux au suicide.

Le Bureau international du travail (BIT), dans son rapport de 1998 sur les violences au travail, fait du harcèlement moral l'une des principales causes de dysfonctionnement dans l'entreprise juste après le harcèlement sexuel, considéré comme un délit pénal en France depuis 1992. De toute évidence, le «mobbing» ne peut plus être aujourd'hui considéré comme le résultat d'un comportement individuel mais comme un mode de gestion du personnel. Le climat de compétitivité effrénée qui règne dans certaines entreprises favorisant le stress et développant, parfois, tous les ingrédients pour le voir émerger.

Le harcèlement moral dans le monde

En France, c'est sur une proposition des députés communistes, qu'un chapitre sur le harcèlement moral a été inclus dans le projet de loi sur la modernisation sociale. La première lecture à l'Assemblée nationale a eu lieu le 12 janvier et le texte devrait être définitivement voté au printemps 2001. Un texte qui ne devrait cependant pas remettre en cause le lien de subordination entre salarié et employeur mais plutôt écarter toute relation intolérable dans l'entreprise et remettre au goût du jour le respect et la dignité auquel chacun a droit. Dans l'hexagone, selon une étude récente du magazine Rebondir, le harcèlement moral au travail concerne près d'un salarié sur trois, touche aussi bien les hommes (31%) que les femmes (29%), les cadres supérieurs (35%) que les professions intermédiaires (27%), les employés (27%) ou les ouvriers (32%) et est autant présent dans les sociétés privées (30%) que dans les entreprises publiques (29%).

En Grande-Bretagne, un salarié sur quatre aurait été victime de brimades verbales et autres humiliations durant le premier semestre 2000. Actuellement, aucune législation n'existe sur le harcèlement moral dans ce pays, mais rien d'étonnant à cela puisque c'est le moins réglementé en matière de droit du travail. En Finlande, selon le BIT, près de 10% des salariés ont fait l'objet d'une forme ou d'une autre de harcèlement. En Allemagne, 1% des travailleurs seraient victimes de persécutions qui coûteraient 1,25 milliards d'euros à la collectivité. Quant aux pays suivants : Etats-Unis, Australie, Italie, Suisse, Suède, le harcèlement moral est considéré comme un délit depuis 1993.



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 08/04/2001

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Bibliographie

[06/04/2001]