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Aviation

Top gun au Bourget

Fusions, concentrations, acquisitions, restructurations, annonces de commandes fermes et d'option, l'économie et la finance sont omniprésentes au Salon de l'aéronautique et de l'espace qui s'est ouvert le 16 juin. Mais depuis l'origine, le Salon du Bourget, c'est d'abord et avant tout les démonstrations en vol, le spectacle aérien offert par ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines.
Tuyère rougeoyante, moteur lancé à pleine puissance, le Mirage 2000-5 s'élance sur la piste 03 de l'aéroport du Bourget. A peine en l'air, il amorce un virage sur l'aile et une montée en chandelle sous le regard attentif de Jacques Chirac. Pour le président de la République venu visiter le salon ce mardi, un programme spécial a été organisé. Hélicoptères civils et militaires produits par le consortium franco-allemand Eurocopter (une société du nouveau groupe européen EADS) dansent un étrange ballet, alternant piqués et tonneaux. Puis vient le tour du Rafale, l'appareil de combat nouvelle génération de Dassault qui démontre sa maniabilité sous les yeux du chef de l'Etat.

Son grand rival, le Typhoon (anciennement Eurofighter) attendra le départ du président de la République pour être présenté aux spectateurs. De toute façon, égaux dans les airs, le Rafale et le Typhoon le sont aussi sur les marchés : aucun appareil vendu à l'exportation pour ces avions de combat dernier cri, mais déjà opérationnels depuis quelques années.

Dans une catégorie à la fois plus ancienne et plus puissante, voici le Sukhoï 30, un appareil russe de supériorité aérienne. Avec sa taille impressionnante et sa double dérive, il se place plutôt dans celle où concourt le F-15. Voici deux ans, lors du dernier salon, un Su-30 s'était écrasé sur la piste, le pilote ayant eu juste le temps de s'éjecter. Rien de tel, heureusement, cette fois-ci. Le pilote russe conduit en chandelle sa machine à la verticale, fait onduler sa trajectoire, revient brièvement en palier, puis effectue une nouvelle ressource avant de s'échapper. L'illusion est prodigieuse, c'est la fameuse figure du «Cobra», la marque de fabrique des pilotes russes.

L'A340-600 : une allure de planeur

Dans ce vacarme étourdissant, on a peine à entendre les explications du commentateur retransmises par haut-parleur. Si les avions militaires d'aujourd'hui sont (peut-être) furtifs sur les écrans-radars, au niveau des décibels produits par les réacteurs, les ingénieurs ont encore des marges de progrès. Devant ces exercices de maniabilité dans laquelle excellent tous ces pilotes de démonstration, on se prend à imaginer un combat tournoyant entre ces monstres d'acier et de composite qui crachent le feu : qui en sortirait vainqueur ? Mais dans la guerre aérienne d'aujourd'hui, le «dog fight» d'antan n'est plus qu'un lointain souvenir : désormais, les pilotes tirent des missiles sur des cibles éloignées de plusieurs dizaines de kilomètres. «Personne ne voit plus personne», commente, désabusé, un spécialiste de l'aéronautique militaire.

Bien différente est la prestation de l'un des derniers-nés d'Airbus, l'A340-600. Etonnamment silencieux en dépit de ses quatre réacteurs, l'A340-600, avec le long fuselage destiné à recevoir près de 400 passagers et l'envergure exceptionnelle de sa voilure, évoque davantage un planeur qu'un avion de ligne. Décollage à forte pente et virage serré ne lui font pas peur, mais c'est surtout dans le vol lent qu'il se révèle. Cabré, à la limite du décrochage, le dernier-né d'Airbus ne faiblit pas : il tient son altitude. Des applaudissements spontanés saluent la performance, là où les évolutions désormais bien connues des appareils de combat rencontrent une approbation blasée.

Autre vedette (à l'applaudimètre) de ce meeting aérien : le petit Sukhoi 26, un monomoteur de voltige. Son pilote le fait décoller en quelques mètres, le fait monter à la verticale. De longues minutes, l'avion jaune et rouge paraît comme suspendu à son hélice, avant de glisser latéralement et de se retourner dans un entrelacs de figure qui paraissent comme autant de défis aux lois de l'aérodynamique. A l'heure des Airbus géant et des chasseurs-bombardiers bourrés d'électronique, il est rassurant de voir que le pilotage pur continue d'avoir ses afficionados.

Du reste, plus d'un siècle après la victoire des «plus lourd que l'air» sur les «plus léger que l'air», l'heure de la revanche a peut-être sonné pour ces derniers : trois dirigeables évoluent paresseusement au-dessus de l'aérodrome du Bourget. Le dirigeable pourrait être la technologie la plus adaptée pour le transport de charges pondéreuses sur des terrains dépourvus d'infrastructureà ou pour le tourisme aérien. L'un d'eux est peint aux couleurs de Boeing. Perfide, un responsable d'Airbus murmure à un autre : «c'est donc cela, le Sonic Cruiser de Boeing», allusion au projet d'avion du futur du grand concurrent. Même dans la démonstration aérienne, la rivalité commerciale ne perd pas ses droits !



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du salon du Bourget:
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par Olivier  Da Lage

Article publié le 19/06/2001