Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Europe-États-Unis

Bush attendu de pied ferme en Europe

Le président américain doit se rendre aujourd'hui en Espagne où il entame sa première tournée européenne. L'événement aura valeur de test pour George W. Bush dont l'image est sévèrement ternie par ses prises de position unilatérales sur l'environnement et le bouclier antimissile.
De notre correspondant aux Etats-Unis

Au cours de sa première tournée diplomatique en Europe, George W. Bush risque de rencontrer sa propre caricature. Le chef d'Etat américain y est souvent portraituré comme un cow-boy arrogant, amoureux des armes à feu, du lobby pétrolier, de la peine de mort, de la lutte anti-avortement, de l'Eglise, avec un QI proche des ruminants qu'il affectionne. Que se passerait-il si, comme sa marionnette des «Guignols de l'Info», Bush ne savait pas qui est Jacques Chirac ? Le magazine britannique The Economist compare ironiquement cette tournée à la première exploration américaine sur la lune. Et les conseillers du président américain n'ont qu'une crainte : qu'il commette une de ses gaffes légendaires. Certains ont admis que son objectif numéro un serait de prouver qu'il n'est pas ce bouffon que décrit la presse.

L'exécution de l'auteur de l'attentat meurtrier d'Oklahoma City, Timothy McVeigh, coïncide de façon embarassante avec le voyage prévu de longue date. Les militants anti-peine de mort poursuivront Bush à chaque étape de son voyage. Et l'Europe n'a pas oublié que l'ancien gouverneur du Texas a battu un sinistre record en signant 152 ordres d'exécution en 6 ans. Un grief de plus sur une longue liste : retrait brutal du protocole de Kyoto sur le réchauffement climatique, rejet d'une cour internationale de justice, développement d'un bouclier antimissile, gel des négociations avec la Corée du Nord, nourriture génétiquement modifiée...

Briefing accéléré avec des spécialistes

George W. Bush s'est donc sérieusement préparé à faire face. Ce week-end, selon le quotidien britannique The Observer, il a bachotté ses fiches de politique internationale en compagnie de sa conseillère nationale pour la sécurité Condoleezza Rice. Son papa aurait également remis quelques pendules à l'heure sur la «mentalité européenne». La formation accélérée a été complétée par un briefing pointu de deux heures et demi donné par des spécialistes. Les derniers détails seront réglés dans l'avion.

En Espagne, George W. Bush rencontrera le Premier ministre conservateur José Maria Aznar. Cette première étape a été conçue comme un tour de chauffe : le roi Juan Carlos est un vieil ami de son père, et l'Espagne est proche de l'Amérique latine que Bush connait mieux. Mais il sera également accueilli par des milliers d'opposants à la politique américaine qui ont commencé à défiler hier. Côté peine de mort, l'Espagne est affutée. Un de ses ressortissants a passé des années dans les couloirs de la mort en Floride, avant d'être reconnu innocent la semaine dernière après que sa famille ait dépensé un demi-million de dollars pour s'offrir les services d'avocats compétents.

En Belgique, où les protestataires seront aussi au rendez-vous, Bush doit rencontrer des officiels de l'OTAN, avant de rejoindre les leaders de l'Union européenne en sommet à Göteborg, en Suède. Direction ensuite Varsovie, pour un exposé théorique des relations américano-européennes, puis en Slovénie (pays qu'il a un jour confondu avec la Slovaquie) où il doit rencontrer le président russe Vladimir Poutine. «Nous ne nous attendons pas à un accord majeur, a indiqué Condoleezza Rice. En fait, ce que nous faisons, c'est établir les bases d'une relation personnelle entre ces deux présidents, qui pourra nous aider à promouvoir une relation constructive et réaliste avec la Russie.» De son côté, Bush aurait affirmé : «Je veux le regarder dans les yeux pour voir si je peux lire dans son âme». Au cas où, il s'est également fait briefer par la CIA sur la manière dont l'ancien patron du KGB charme ses interlocuteurs.

«Certains en Europe s'inquiètent que l'Amérique ne devienne isolationniste, a déclaré Bush à The Observer. Je vais les rassurer. Nous sommes un gouvernement internationaliste.» Reste à le prouver. Après avoir prononcé un avis de décès du protocole de Kyoto sur le réchauffement climatique, voilà plusieurs semaines, il a affirmé, à la veille de son départ, prendre la question du réchauffement de la planète très au sérieux. C'est un début.



par Philippe  Bolopion

Article publié le 12/06/2001