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Mali

Des prêcheurs pakistanais expulsés

Un ressortissant pakistanais détenteur de faux passeports a été inculpé et écroué. Trente-cinq autres vont faire l'objet d'une expulsion en raison de leur entrée illégale sur le territoire malien. Ils prêchaient dans les quartiers populaires de Bamako.
De notre correspondant au Mali

Sogoniko, Magnanbougou. Quartiers populaires de Bamako. Au saut du lit la police débarque dans trois «concessions». Dans le filet une dizaine de Pakistanais sont interpellés. Deux jours plus tard, même scène dans à Lafiabougou, un autre quartier de Bamako. Au total 36 ressortissants pakistanais seront interpellés. «Nous avons rondement mené l'opération», jubile un policier.

Les premières déclarations de ses «hôtes», aujourd'hui encombrants, sont floues. Certains affirment être en transit vers la Mecque. D'autres clament être venus rendre visite à des amis. «Galéjade !» commente un officiel.

«Presque tous se déclarent commerçants d'étoffes et de bijoux entre le Mali et le Burkina Faso» lit-on dans le procès-verbal transmis jeudi à la justice. Ce qu'il y a de vrai dans cette déclaration, c'est que presque tous les Pakistanais sont venus par la frontière du Burkina Faso. Par la suite la police ira de découverte en découverte.

De faux passeports, ou des passeports vierges canadiens, français et pakistanais sont saisis. Surtout sur un Pakistanais qui tout l'air d'être le chef du groupe. Son nom, Mohamed C. Malick, la quarantaine, regard perçant, moustache d'officier. Croisé dans la cour de la Brigade d'investigation judiciaire (BIJ) de Bamako en compagnie de ses compatriotes, il a refusé de répondre à nos questions par un «no comment».

«Une forte somme d'argent en provenance du Pakistan»

Mais la police les soupçonne d'être des prêcheurs «dangereux», des partisans de Ben Laden, des faussaires ou encore des escrocs. Les 36 Pakistanais ne sont pas commerçants comme ils le prétendent. Quatre d'entre eux : Ahmed Itfika, Jafar Igbal, Fazinit Bagui, et Ghalib Abdoul Gayyul ont reçu une «forte somme d'argent» du Pakistan via le Burkina Faso. Mode de transfert : Western Union. Deux des quatre ont été aperçus dans les locaux bamakois d'une ONG Al Moutaga fortement soupçonnée de «sympathie islamiste».

«Cette ONG (organisation non gouvernementale) fait venir à Bamako des prêcheurs algériens» confie un bon connaisseur du milieu. Direction Magnanbougou, l'un des quartiers où habitaient plusieurs Pakistanais. A côté de leur ancien domicile un garage de réparation d'automobiles. Le patron du garage témoigne : «Ce que je sais, c'est qu'ils ne sont pas tous islamistes. Mais deux d'entre eux ont un jour réuni des jeunes du quartier pour parler de Dieu. Ils cherchaient même des interprètes pour traduire ce qu'ils disaient».
Mohamed Cissé poursuit : «Leur problème c'est qu'ils ne pouvaient pas prêcher dans les mosquées, parce que les prêcheurs algériens et koweïtiens qui venaient au Mali officiellement occupaient le terrain». Un boulanger du quartier raconte: «L'un de ces types m'a chargé de réunir des croyants, surtout des jeunes du quartier. Le jour J, une vingtaine de personnes étaient réunies. Avec un interprète ils ont parlé de Dieu, de Satan» se souvient Djibril qui a été intrigué par le fait qu'à l'aide d'une petite caméra, les Pakistanais aient filmé tout le monde. Peut-être «une preuve de bon travail» effectué qu'il adressent ensuite à leur commanditaire suppose un responsable du ministère malien de la Justice.

La plupart des Pakistanais sont entrés illégalement soit par la frontière terrestre du Niger ou du Burkina. Arrivés dans la capitale malienne par la ville de Gao (environ 900 kilomètres au nord de Bamako), leurs intentions étaient apparemment de quitter un jour le Mali pour se rendre dans un autre pays musulman. Pour trente-cinq d'entre eux ce sera chose faite dans les heures qui viennent. Ils font l'objet d'une mesure d'expulsion administrative vers le Burkina ou le Niger. Quant au responsable présumé de l'organisation, il a été inculpé et écroué pour «faux et usage de faux».



par Serge  Daniel

Article publié le 26/10/2001