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Réfugiés

L'humanitaire, une affaire de professionnels

«On meurt de faim en un mois, de soif en une semaine et de froid en une nuit» : parce qu'elles connaissent cet adage, des organisations humanitaires françaises regroupées en «Urgence solidarité Afghanistan» appellent l'opinion publique à se mobiliser rapidement. Ces organisations, présentes de longue date en Afghanistan, défendent une action humanitaire efficace, hautement qualifiée. En un mot une affaire de professionnels.
D'ici quelques semaines, la température sur les hauts plateaux où de très nombreux afghans se sont réfugiés, descendra, la nuit, jusqu'à -20°, s'ajoutant à la malnutrition et à l'état sanitaire déplorable des populations, explique Jacques Hintzy, président de l'Unicef-France. Cette organisation onusienne a constitué, avec Marc Gentilini président de la Croix-Rouge française et Sylvie Brunel, présidente de l'ONG Action contre la Faim, un collectif baptisé «Urgence solidarité Afghanistan» destiné à recevoir des dons.

Ces trois organisations agissent depuis des années déjà en Afghanistan, pays ravagé par une guerre de vingt ans, une sécheresse longue de trois ans et la baisse du niveau de vie imputable au régime taliban. Elles continuent à faire parvenir des secours dans le pays grâce au personnel local et aux volontaires afghans de ces organisations, 7000 pour la Croix-Rouge, 500 pour ACF, qui assurent de leur mieux la poursuite de l'aide aux populations depuis le départ de tous les étrangers. Les membres non-afghans des organisations humanitaires ont quitté l'Afghanistan par prudence car ils n'ont fait l'objet d'aucune hostilité. Ils se sont installés provisoirement dans les pays limitrophes, prêts à repasser la frontière dès que ce sera possible.

Pour l'instant, les convois de secours sont acheminés jusqu'à la frontière, déchargés, rechargés sur des camions afghans et récupérés par des locaux qui parviennent dans des conditions «à peu près correctes», selon Jacques Hintzy, à les distribuer. Ce circuit ralentit les convois, mais, avant même la fermeture des frontières la faiblesse des moyens de communication établissait des coûts d'intervention en Afghanistan dix fois supérieurs à ce qu'ils sont ailleurs.

«Humanitairement incorrect»

Dans leur appel à la générosité publique en faveur de l'Afghanistan, Jacques Hintzy, Marc Gentilini et Sylvie Brunel défendent leur conception d'une action humanitaire dont l'efficacité soit reconnue et menée par des professionnels exerçant un «vrai métier», doté d' «expertise». Ils sont d'accord pour mettre en garde contre la constitution, sur le coup de l'émotion, d'associations qui s'improvisent dans l'humanitaire et pour lesquelles remplir un camion de vivres à destination d'un pays suffit, sans se préoccuper des conditions de distribution et de suivi des secours. Des bonnes volontés qui font parfois plus de mal que de bien.

En revanche, le jugement sur les parachutages humanitaires américains en Afghanistan, «bombardements humanitaires», dit Sylvie Brunel, diverge quelque peu. S'ils ne sont pas acceptables, pour la présidente d'ACF, c'est qu'ils créent un «risque d'ambiguïté» dans l'esprit de leurs interlocuteurs. En tant qu'organisation non-gouvernementale, ACF rappelle son indépendance et son apolitisme. Pour le président d'Unicef-France, la position est claire, c'est celle de l'ONU dont l'Unicef fait partie. Il n'en demeure pas moins que Jacques Hintzy juge ces parachutages «surréalistes», préférant confier l'humanitaire à ceux dont c'est la spécialité.

Autre son de cloche du côté de la Croix-Rouge. Pour Marc Gentilini, certes ces largages sont «humanitairement incorrects». Mais ils sont le message tangible que les Américains veulent faire passer au peuple afghan : nous ne sommes pas en guerre contre vous. Il convient donc de ne pas condamner trop tôt. D'autant que, ajoute-t-il, les militaires ont fait la preuve à maintes reprises sur le terrain qu'ils sont capables de mener à bien des actions humanitaires. Et même il se déclare «surpris de ceux qui protestent contre les largages humanitaires et pas contre les largages de bombes».

Quelques sites:

Unicef-France
Croix-rouge française
Action contre la faim
Coordination sud pour l'Afghanistan
Médecins du monde



par Francine  Quentin

Article publié le 12/10/2001