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Entreprises

A l'écoute du consommateur africain

En dépit de la mondialisation qui favorise la circulation des biens et des services les modes de vie et de consommation sont loin d'être uniformes sur l'ensemble de la planète. Les entreprises qui veulent vendre leurs produits en Afrique prennent conscience qu'il existe bien un consommateur africain, par certains aspects très différents du consommateur européen, américain ou asiatique.
Comment séduire le consommateur africain? Cette question, posée par le Centre français du commerce extérieur, est essentielle pour les entreprises étrangères en Afrique. En effet, «il ne suffit pas de débarquer avec ses produits de Paris, Rome ou Francfort et de les présenter tels quels sur un marché africain pour les vendre» explique Albert Taïeb, consultant et expert international. Sur un continent marqué par le faible pouvoir d'achat de la majorité de la population, chaque achat est prévu et le budget à y consacrer fixé à l'avance. Le «consommateur africain», les entreprises doivent le savoir, n'est guère enclin à l'achat «coup de coeur» ou de curiosité. Introduire des nouveautés «ce n'est pas gagné d'avance», ajoute Albert Taïeb. D'autant que ce consommateur préfèrera se passer d'un produit plutôt que d'acheter un produit de qualité insatisfaisante, là où un Français pourrait accepter un produit de bas de gamme, s'il est vraiment moins cher.

Autre caractéristique africaine: la ménagère, sur ce continent comme ailleurs cµest elle qui est habituellement chargée des achats, ne constitue pas de stock. C'est pourquoi dans l'agro-alimentaire, par exemple, les marques ont adapté les conditionnements, raconte François Jay, directeur général d'Afrique Initiatives. Les quantités sont fractionnées par rapport aux standards européens, car un produit est consommé très rapidement après avoir été acheté.

S'il est un secteur où l'adaptation des produits à la «cible» commerciale est évidente, c'est bien celui des cosmétiques. Christian Lafaix, de la firme Crisver, exporte en Afrique des produits de beauté dédiés aux femmes noires. Les conditions de la réussite sont, selon lui, la prise en compte des souhaits des femmes, un teint lumineux et mat mais aussi des cosmétiques résistants sans se dégrader à des températures plus élevées, à des prix abordables mais de qualité. Plutôt fidèles à leurs produits de beauté habituels, les femmes africaines font l'objet d'un marketing spécifique et se voient fréquemment proposer des échantillons «pour essayer».

Produits d'assurance spécifiques

Des caractéristiques sociales typiquement africaines ont présidé à l'élaboration de produits d'assurance spécifiques par la compagnie AGF-Afrique. Ce secteur des services est encore relativement nouveau sur le continent et jusqu'ici n'allait pas de soi. L'assurance automobile par exemple n'est entrée dans les m£urs que d'un automobiliste sur deux. Inutile donc de proposer un contrat du genre «tous risques» avec des tarifs élevés. AGF-Afrique, explique Claire Hamonic, responsable du développement en Afrique, propose des contrats permettant de couvrir un conducteur non responsable d'un accident mais dont le responsable n'est ni assuré ni solvable. Un contrat couvrant les petits dommages n'est guère recherché non plus, on lui a substitué la garantie en cas de perte totale du véhicule.

Quant au produit-phare de l'assurance en France, l'assurance-vie, il n'a connu aucun succès en Afrique, pas plus que l'assurance couvrant les frais d'obsèques sur un continent où les solidarités familiales et de voisinage perdurent. En revanche la rente-éducation, permettant aux enfants de terminer leurs études en cas de décès du chef de famille est bien accueilli car il est au c£ur des préoccupations des parents.

Dernière étape de l'adaptation au marché africain, la création de produits qui n'ont de raison d'être que dans ces pays. C'est l'objectif de Madagascar composite, entreprise qui conçoit des automobiles répondant aux besoins particuliers du continent. Les fabricants américains, européens ou japonais vendent, depuis le début des années 80, des automobiles de plus en plus chères et sophistiquées. De plus en plus fragiles aussi quand il s'agit de faire rouler en Afrique des voitures à boite de vitesse robotisée et électronique embarquée. Beaucoup d'équipements, parfois peu indispensables sur les autoroutes d'Europe, s'avèrent franchement inutiles sur les pistes africaines. La voiture africaine telle que ses concepteurs la voient est donc légère, durable, sûre et adaptée aux usages multiples.
Mais les Africains ne sont pas plus figés dans leurs habitudes de consommation que leurs homologues des autres continents. La preuve en est dans l'explosion de la restauration livrée à domicile dans les capitales comme Dakar, liée à l'urbanisation. En 2000 , un Africain sur trois vivait en ville, en 2020, ils seront deux sur trois.





par Francine  Quentin

Article publié le 10/11/2001