Mutilations sexuelles
L’asile en France pour éviter l’excision
Une famille malienne, craignant l’excision de sa fille dans son pays, vient d’obtenir le statut de réfugié en France. Après un rejet du dossier par l’OFPRA (Office français de la protection des réfugiés et apatrides), la Commission des recours des réfugiés, en appel, accède à la demande couple Sissoko. Une première.
Se soustraire à la contrainte de l’excision mérite-t-il l’octroi d’un statut de réfugié? La Commission des recours des réfugiés a répondu «oui», le 7 décembre, en confirmant une jurisprudence de juillet 1991 qui reconnaissait l’ablation du clitoris, contre la volonté des victimes, comme une mutilation et une persécution inhumaine. Par cette décision, les magistrats de la Commission des recours des réfugiés viennent d’inscrire l’excision parmi les motifs qui valent protection: la race, la religion, les opinions politiques, la nationalité et l’appartenance à un groupe.
Mossa et Nacira Sissoko, ce couple de Maliens, vivant au Mali, avait refusé de se soumettre à la tradition de l’excision, sur la personne de leur fille née en septembre 1999. Mais dans le village, leur marginalité était mal vécue. Il faut dire que cette pratique au Mali concerne 95% des femmes et la quasi totalité de la région de Kayes, à l’ouest du Mali, d’où sont originaires les époux Sissoko. L’amalgame religion (Islam) et tradition rend cette pratique immuable et condamne tout contrevenant à l’exclusion du tissu social. Les injures envers Nacira, l’épouse, les agressions physiques dont il a même gardé des séquelles, ont poussé Mossa à chercher asile en France. Selon le GAMS, le Groupe des femmes pour l’abolition des mutilations sexuelles, qui a défendu ce dossier, le couple Sissoko, de jour en jour et de mois en mois sentait ses forces de résistance faiblir face au harcèlement de la famille. Pour l’avocate du couple, Christine Martineau, «le poids de la communauté est trop fort et les dangers encourus étaient réels».
Pas de loi condamnant l’excision au Mali
Devant une telle situation le couple Sissoko n’avait obtenu aucun soutien des autorités maliennes. Cette période préélectorale (élection présidentielle au printemps 2002) pousse nombre d’élus à mesurer leurs propos et à se garder d’afficher des positions catégoriques, comme celles des époux Sissoko, contre une pratique aussi fortement ancrée. Contrairement au Sénégal, à la Guinée Conakry et au Burkina faso, le Mali ne dispose d’aucune législation condamnant l’excision. Il a choisi la voie de l’explication à travers des campagnes d’information avant de voter une loi, qui risquerait dans son volet répressif, d’envoyer plus de la moitié de la population en prison. Linda Weil-Curiel, avocate, présidente de la Commission pour l’abolition des mutilations sexuelles, à l’origine de la jurisprudence de 1991, estime pour sa part que «l’Etat malien manque dans cette affaire de volonté politique».
Le travail des associations françaises et africaines sur le terrain commence par porter ses fruits. Selon le GAMS, l’opération «déposer le couteau» a conduit ce mois-ci cinquante villages au Sénégal et trente autres dans la région de Kayes au Mali à renoncer à l’excision. Ce travail d’éducation et d’information est encourageant dans les pays africains où on note un recul de cette pratique, or en France, elle connaîtrait même une certaine évolution. Selon le GAMS, ce phénomène connu est dû au fait que les populations immigrées vivant coupées de leurs origines, ne sont pas impliquées dans les avancées sociales de leur pays, en même temps qu’elles défendent paradoxalement une certaine identité culturelle. C’est sur ce décalage que les associations, en France souhaitent aujourd’hui mettre l’accent.
La décision d’accorder un statut de réfugié aux époux Sissoko est une victoire pour les associations qui militent pour l’abolition de cette pratique. Pour le président de la fédération des Maliens de France «cette décision est bien pour les bénéficiaires, mais je doute fort que ce couple ait vraiment été persécuté au pays». Mais ces associations fières de leur travail rejettent les accusations selon lesquelles elles offriraient des alibis sur des plateaux d’argent à des candidats à l’immigration ou même à des clandestins.
Mossa et Nacira Sissoko, ce couple de Maliens, vivant au Mali, avait refusé de se soumettre à la tradition de l’excision, sur la personne de leur fille née en septembre 1999. Mais dans le village, leur marginalité était mal vécue. Il faut dire que cette pratique au Mali concerne 95% des femmes et la quasi totalité de la région de Kayes, à l’ouest du Mali, d’où sont originaires les époux Sissoko. L’amalgame religion (Islam) et tradition rend cette pratique immuable et condamne tout contrevenant à l’exclusion du tissu social. Les injures envers Nacira, l’épouse, les agressions physiques dont il a même gardé des séquelles, ont poussé Mossa à chercher asile en France. Selon le GAMS, le Groupe des femmes pour l’abolition des mutilations sexuelles, qui a défendu ce dossier, le couple Sissoko, de jour en jour et de mois en mois sentait ses forces de résistance faiblir face au harcèlement de la famille. Pour l’avocate du couple, Christine Martineau, «le poids de la communauté est trop fort et les dangers encourus étaient réels».
Pas de loi condamnant l’excision au Mali
Devant une telle situation le couple Sissoko n’avait obtenu aucun soutien des autorités maliennes. Cette période préélectorale (élection présidentielle au printemps 2002) pousse nombre d’élus à mesurer leurs propos et à se garder d’afficher des positions catégoriques, comme celles des époux Sissoko, contre une pratique aussi fortement ancrée. Contrairement au Sénégal, à la Guinée Conakry et au Burkina faso, le Mali ne dispose d’aucune législation condamnant l’excision. Il a choisi la voie de l’explication à travers des campagnes d’information avant de voter une loi, qui risquerait dans son volet répressif, d’envoyer plus de la moitié de la population en prison. Linda Weil-Curiel, avocate, présidente de la Commission pour l’abolition des mutilations sexuelles, à l’origine de la jurisprudence de 1991, estime pour sa part que «l’Etat malien manque dans cette affaire de volonté politique».
Le travail des associations françaises et africaines sur le terrain commence par porter ses fruits. Selon le GAMS, l’opération «déposer le couteau» a conduit ce mois-ci cinquante villages au Sénégal et trente autres dans la région de Kayes au Mali à renoncer à l’excision. Ce travail d’éducation et d’information est encourageant dans les pays africains où on note un recul de cette pratique, or en France, elle connaîtrait même une certaine évolution. Selon le GAMS, ce phénomène connu est dû au fait que les populations immigrées vivant coupées de leurs origines, ne sont pas impliquées dans les avancées sociales de leur pays, en même temps qu’elles défendent paradoxalement une certaine identité culturelle. C’est sur ce décalage que les associations, en France souhaitent aujourd’hui mettre l’accent.
La décision d’accorder un statut de réfugié aux époux Sissoko est une victoire pour les associations qui militent pour l’abolition de cette pratique. Pour le président de la fédération des Maliens de France «cette décision est bien pour les bénéficiaires, mais je doute fort que ce couple ait vraiment été persécuté au pays». Mais ces associations fières de leur travail rejettent les accusations selon lesquelles elles offriraient des alibis sur des plateaux d’argent à des candidats à l’immigration ou même à des clandestins.
par Didier Samson
Article publié le 11/12/2001