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Suède

La Suède échappe à la vague bleue

Les sondages annonçaient un scrutin serré. Mais contre toute attente, le Parti social démocrate du très charismatique Premier ministre sortant Goeran Persson a, une nouvelle fois, largement remporté les élections législatives suédoises. Cette victoire des sociaux-démocrates est une exception à la vague bleue qui traverse l’Europe où en quelques mois, La France, les Pays-Bas, le Portugal, le Danemark et la Norvège ont basculé à droite. Elle conforte la position du chef du gouvernement sortant qui peut désormais se passer du soutien des écologistes et appréhender sans trop de crainte l’échéance de l’adhésion de son pays à l’Union économique et monétaire à laquelle ses alliés traditionnels se sont jusqu’à présent systématiquement opposés.
Goeran Persson est un homme heureux. Avec plus de 40% des voix aux législatives de dimanche, le chef de file des sociaux-démocrates suédois a en effet aujourd’hui les mains libres pour conduire une politique qu’il a toujours voulue tournée vers l’Europe. «C’est un succès fantastique», a-t-il notamment affirmé en mettant toutefois en garde contre tout excès d’optimisme. «Il est important, a-t-il souligné, de dire dans un tel instant que nous avons devant nous quatre années difficiles d’exercice des responsabilités et cela exigera beaucoup d’humilité et de travail». Les Suédois ont donc choisi de renouveler leur confiance à l’homme qui avait fait de la défense du «modèle suédois» son cheval de bataille lors de la campagne électorale. Avec ses alliés écologistes (les Verts) et du Parti de gauche (anciens communistes), Goeran Persson a en effet défendu le système de protection sociale suédois de plus en plus contesté par les conservateurs. Mais c’est sans doute le bilan de sa politique économique qui en quatre ans a permis de redresser les finances publiques et ramener l’inflation à 2% qui lui a valu l’adhésion des électeurs. Le chef du gouvernement sortant a par ailleurs fait le tour de force de tenir sa promesse électorale de 1998 en réduisant le chômage de moitié.

L’excellent score des sociaux-démocrates, qui dans le gouvernement sortant devaient compter sur le soutien au Parlement du Parti de gauche mais aussi des Verts, devrait désormais leur permettre de se passer de l’appui de leurs alliés écologistes. Ces derniers, anti-européens convaincus, avaient fait monter les enchères à la veille du scrutin en menaçant de se retirer de la coalition de gauche s’ils n’obtenaient pas un poste ministériel. Goeran Persson, qui avait opposé une fin de non recevoir à cette exigence, peut désormais affronter avec sérénité le referendum sur l’adhésion de la Suède à l’Union économique et monétaire qui doit se tenir l’an prochain. Les sociaux-démocrates et leurs alliés ex-communistes auront à eux seuls 175 députés sur 349, soit la majorité absolue au Parlement.

Revers cinglant pour la droite

Cette victoire de la gauche, avec plus de dix points d’écart sur l’opposition, a signé l’effritement de la droite traditionnelle, la Suède se démarquant ainsi de la plupart de ses voisins européens submergés par une vague bleue. La grande surprise est en effet venue de l’effondrement du Parti conservateur qui n’a recueilli que 15,2% des suffrages exprimés, soit près de 8% de moins qu’aux dernières législatives de 1998. Il se retrouve aujourd’hui pratiquement au même niveau que le parti libéral qui en moins de deux mois est devenu la troisième force politique du pays. En lançant le débat sur l’immigration et en proposant une réforme plus contraignante des conditions d’accueil des étrangers, cette formation a en effet triplé son score par rapport à 1998.

Ce revers cinglant pour la droite –l’ensemble de la gauche a obtenu 191 sièges contre 158 pour le «bloc bourgeois»– n’est pas seulement dû au manque de charisme de son chef de fil Bo Lundgren. L’opposition a en effet choisi de dénoncer au cours de sa campagne électorale les coûts de l’Etat-providence, estimant que la Suède avait en trente ans dégringolé de la quatrième à la dix-septième place des pays les plus riches. La droite a donc axé son programme autour d’une substantielle baisse des impôts, de l’ordre de 14 milliards d’euros, destinée à relancer la croissance. La gauche qui avait au contraire prôné le maintien du taux de fiscalité actuel, l’un des plus élevé du monde, dans le seul but de renforcer l’action de l’Etat dans les domaines de l’éducation et de la santé, a donc plus séduit les électeurs.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 16/09/2002