Pakistan
Des législatives sur mesure pour Musharraf
Trois ans après son putsch et après s’être lui-même déclaré président pour cinq ans, le général-dictateur Pervez Musharraf va sans doute profiter des élections législatives de ce jeudi 10 octobre pour conforter son image d’allié incontournable des Etats-Unis dans leur lutte contre le terrorisme. Grâce à la fraude, aux intimidations massives et surtout à l’exclusion des principaux leaders politiques: Benazir Bhutto et Nawaz Sharif.
Vu de loin, le scrutin pakistanais ressemble à tous ceux qui l’ont précédé lorsque l’armée n’était pas au pouvoir. Les partis sont au nombre de 72, les candidats plus de 7 000 et le taux d'illettrisme d’environ 57%. D’où la nécessité pour les partis de logos simples et immédiats: un tigre, une bicyclette, une flèche, une rose, un bus ou un hélicoptère. Les quelques 50 millions d’électeurs doivent choisir une assemblée nationale et quatre assemblées provinciales qui toutes avaient été dissoutes par le général Musharraf lors de son coup d’état d’octobre 1999. Mais les principaux leaders politiques ont tous dénoncé les «tricheries pré-électorales», la collusion manifeste entre l’armée au pouvoir et l’appareil d’état ainsi que les critères arbitraires retenus pour écarter ou retenir les candidats (diplômes universitaires, factures d’électricité payées…).
«Au moment du vote les Etats-Unis tourneront la tête ailleurs»
Plus grave, la présence de nombreux observateurs internationaux et notamment du Commonwealth, ne devrait pas permettre à ce scrutin un minimum de transparence. «Ils diront peut-être qu’il y a eu des problèmes, mais rien qui remette en cause le résultat», a dit un analyste politique d’Islamabad. «Le niveau de tricherie requis a déjà été installé. Le régime s’appuie sur une manipulation préalable au vote. Et au moment du vote les Etats-Unis tourneront la tête ailleurs… Le premier soucis des Etats-Unis et de la plupart de leurs alliés, dont la Grande Bretagne, est un Pakistan stable, et ils considèrent que Musharraf est indispensable». Pour cela ils n’ont guère protesté lorsque les anciens premiers ministres Bhutto et Sharif ont été écartés d’avance de la compétition.
Conscient de la popularité de Benazir Bhutto, Musharraf a en effet pris les devants il y a quelques mois, en déclarant que si elle rentrait au pays, elle serait immédiatement emprisonnée, sous prétexte que dans le passé elle a été condamnée pour corruption. Alors que le seul jugement pour corruption dont la fille du très charismatique Zulfiqar Bhutto (pendu par l’armée en 1979) a fait l’objet a été annulé par la Cour suprême en 2 000. Ceci n’a pas empêché la première femme à devenir Premier ministre dans un pays musulman de faire campagne, notamment grâce aux technologies le plus avancées: lundi elle s’est adressée par liaison satellitaire depuis Londres à des milliers de militants de son parti (le PPP, Parti populaire pakistanais) rassemblés à Lahore. «Les généraux ont peur de moi, pour cela ils ne me laissent pas revenir», a-t-elle déclaré. «Nous savons que ce vote est une farce, mais nous avons décidé d’y aller pour ne pas laisser les mains libres aux généraux et à leurs compagnons. Les généraux sont responsables de la catastrophe dans laquelle nous nous trouvons. Leur politique pro-taliban a ruiné notre image, leur politique belliqueuse menace toute la région», a-t-elle ajouté.
Le PPP, qui compte 25 ans d’existence, est considéré comme le principal parti du Pakistan et s’est engagé à rétablir Benazir Bhutto au poste de Premier ministre s’il parvient à constituer une majorité. Il a également annoncé qu’il ferait annuler toutes les modifications de la constitution de 1973 apportées par le général Musharraf. Donné favori - voire majoritaire - dans les rares sondages publiés au Pakistan, il pourrait revenir sur les devants de la scène politique, en dépit des tracasseries en tous genres mises en oeuvre par le régime militaire et l’appareil d’état.
Ceux-ci, en effet, ont visiblement décidé de soutenir presque ouvertement une des principales tendances de la Ligue musulmane pakistanaise (la PML-Q), constituée pour l’essentiel de dissidents du parti de l’ancien premier ministre Nawaz Sharif (la PML-N), qui se retrouve désormais dans une situation de grande faiblesse et ne cesse de décliner. C’est un ancien gouverneur du Pendjab, Mian Azhar, qui dirige actuellement le parti proche de Musharraf (la PML-Q) et pourrait donc devenir le prochain Premier ministre en cas de victoire.
Enfin, six partis fondamentalistes musulmans ont constitué une alliance (MMA) qui comprend notamment les deux factions du parti pro-taliban Jamiat Ulema-e-Islami. Cette alliance pourrait créer la surprise, car elle spécule ouvertement sur les sentiments anti-américains suscités au Pakistan par les opérations militaires occidentales en Afghanistan. Le MMA dénonce également le ralliement du général Musharraf à la coalition anti-terroriste et lui reproche de soutenir trop faiblement la cause des «combattants de la liberté» dans le Cachemire.
Lire également :
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Plus grave, la présence de nombreux observateurs internationaux et notamment du Commonwealth, ne devrait pas permettre à ce scrutin un minimum de transparence. «Ils diront peut-être qu’il y a eu des problèmes, mais rien qui remette en cause le résultat», a dit un analyste politique d’Islamabad. «Le niveau de tricherie requis a déjà été installé. Le régime s’appuie sur une manipulation préalable au vote. Et au moment du vote les Etats-Unis tourneront la tête ailleurs… Le premier soucis des Etats-Unis et de la plupart de leurs alliés, dont la Grande Bretagne, est un Pakistan stable, et ils considèrent que Musharraf est indispensable». Pour cela ils n’ont guère protesté lorsque les anciens premiers ministres Bhutto et Sharif ont été écartés d’avance de la compétition.
Conscient de la popularité de Benazir Bhutto, Musharraf a en effet pris les devants il y a quelques mois, en déclarant que si elle rentrait au pays, elle serait immédiatement emprisonnée, sous prétexte que dans le passé elle a été condamnée pour corruption. Alors que le seul jugement pour corruption dont la fille du très charismatique Zulfiqar Bhutto (pendu par l’armée en 1979) a fait l’objet a été annulé par la Cour suprême en 2 000. Ceci n’a pas empêché la première femme à devenir Premier ministre dans un pays musulman de faire campagne, notamment grâce aux technologies le plus avancées: lundi elle s’est adressée par liaison satellitaire depuis Londres à des milliers de militants de son parti (le PPP, Parti populaire pakistanais) rassemblés à Lahore. «Les généraux ont peur de moi, pour cela ils ne me laissent pas revenir», a-t-elle déclaré. «Nous savons que ce vote est une farce, mais nous avons décidé d’y aller pour ne pas laisser les mains libres aux généraux et à leurs compagnons. Les généraux sont responsables de la catastrophe dans laquelle nous nous trouvons. Leur politique pro-taliban a ruiné notre image, leur politique belliqueuse menace toute la région», a-t-elle ajouté.
Le PPP, qui compte 25 ans d’existence, est considéré comme le principal parti du Pakistan et s’est engagé à rétablir Benazir Bhutto au poste de Premier ministre s’il parvient à constituer une majorité. Il a également annoncé qu’il ferait annuler toutes les modifications de la constitution de 1973 apportées par le général Musharraf. Donné favori - voire majoritaire - dans les rares sondages publiés au Pakistan, il pourrait revenir sur les devants de la scène politique, en dépit des tracasseries en tous genres mises en oeuvre par le régime militaire et l’appareil d’état.
Ceux-ci, en effet, ont visiblement décidé de soutenir presque ouvertement une des principales tendances de la Ligue musulmane pakistanaise (la PML-Q), constituée pour l’essentiel de dissidents du parti de l’ancien premier ministre Nawaz Sharif (la PML-N), qui se retrouve désormais dans une situation de grande faiblesse et ne cesse de décliner. C’est un ancien gouverneur du Pendjab, Mian Azhar, qui dirige actuellement le parti proche de Musharraf (la PML-Q) et pourrait donc devenir le prochain Premier ministre en cas de victoire.
Enfin, six partis fondamentalistes musulmans ont constitué une alliance (MMA) qui comprend notamment les deux factions du parti pro-taliban Jamiat Ulema-e-Islami. Cette alliance pourrait créer la surprise, car elle spécule ouvertement sur les sentiments anti-américains suscités au Pakistan par les opérations militaires occidentales en Afghanistan. Le MMA dénonce également le ralliement du général Musharraf à la coalition anti-terroriste et lui reproche de soutenir trop faiblement la cause des «combattants de la liberté» dans le Cachemire.
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par Elio Comarin
Article publié le 09/10/2002