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La visite de George Bush en Afrique

Bush en Afrique

Le président George W. Bush effectue une tournée africaine qui le mènera dans cinq pays, du 7 au 12 juillet. Le Sénégal, l’Afrique du Sud, le Botswana, l’Ouganda et le Nigeria ont été choisis pour l’exemple qu’ils offrent dans la lutte contre les maladies, pour les uns, et la stabilité politique pour les autres.

La visite du président des Etats-Unis en Afrique s’inscrit dans «le cadre de l’engagement de l’Administration Bush d’œuvrer pour une Afrique libre, prospère et paisible», communique la Maison Blanche à quelques jours du début de la visite africaine de George Bush. Sa première étape sera le Sénégal, et plus précisément la visite de l’Île de Gorée. L’entretien avec le président Abdoulaye Wade sera bref, ce que déplore déjà les milieux politiques sénégalais. George Bush s’envolera pour l’Afrique du Sud où il passera plusieurs jours. Le Botswana, l’Ouganda et le Nigeria sont aussi des destinations que l’administration Bush a choisies en fonction de ses priorités politiques.

George Bush a profité de sa rencontre avec le Conseil des entreprises sur l’Afrique (Corporate Council on Africa), pour tracer les grandes lignes de sa visite et exposer les raisons profondes qui motivent cette tournée africaine. Le Sénégal a été choisi parce qu’il «représente la plus ancienne démocratie de l’Afrique de l’ouest, le Botswana parce qu’il est une démocratie stable et l’une des économies les plus puissantes de l’Afrique, l’Afrique du Sud est un pilier de la paix régionale et de la stabilité, l’Ouganda où la politique éclairée du gouvernement a débouché sur la chute la plus remarquable au monde du taux d’infection au VIH, et le Nigeria qui est en train de consolider son gouvernement civil et de développer ses vastes ressources», souligne le George Bush. Il a profité de cette rencontre avec les hommes d’affaires pour faire l’éloge du libéralisme économique auquel il invite avec insistance les pays africains.

La visite de George W. Bush se veut être une amorce de consolidation des relations avec l’Afrique mais qui devrait se faire dans une logique d’échanges de bons procédés. Au premier titre des préoccupations américaines on note par exemple la lutte contre le terrorisme, pour laquelle les Etats-Unis sont prêts à consacrer 100 millions de dollars au cours des quinze prochains mois en faveur des pays comme le Kenya, l’Ethiopie ou la Tanzanie. Par ailleurs, l’accroissement des échanges et des investissements avec l’Afrique a connu ces dernières années une nette progression. Les Etats-Unis ont investi en Afrique en 2002 plus de 5,8 milliards de dollars alors que les exportations globales du continent vers les Etats-Unis s’élève pour la même période à plus de 18 milliards de dollars. Dans l’entourage du président Bush, on parle d’inverser la tendance qui fait que l’intérêt des Etats-Unis pour l’Afrique concerne essentiellement des aides directes en matières sanitaires et humanitaires ; 2 milliards de dollars l’année dernière.

Des manifestations à chaque escale

«L’Afrique sub-saharienne, qui héberge 11% de la population mondiale, est responsable de moins de 2% du commerce mondial. Les Etats-Unis sont résolus à mettre le pouvoir transformateur du commerce à la portée de tous les Africains», a déclaré le président George Bush pour situer le sens de son voyage. Le renforcement de l’AGOA (African growth and opportunity act, Loi sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique), même s’il est encouragé ne peut bénéficier qu’aux Etats qui répondront à certains critères nouveaux qui s’ajoutent aux conditions d’éligibilité déjà longues. «Trop souvent, par le passé, l’aide au développement s’est fourvoyée à soutenir des régimes corrompus», a précisé George Bush. Pour remédier à ces erreurs d’approche et d’analyse, le président américain propose la création d’un Compte du millénaire. Il participera à la moralisation de la vie politique africaine pour favoriser un décollage économique. Trois grands principes à respecter permettront aux Etats africains d’en bénéficier, selon l’administration Bush : «gouverner avec justice, investir dans la santé et dans l’éducation des sociétés et appliquer une politique qui encourage la liberté économique».

Ces préoccupations rejoignent celles du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement en Afrique) âprement défendu par les présidents Abdoulaye Wade du Sénégal, Thabo Mbeki d’Afrique du Sud et Olushegun Obasanjo du Nigeria, qui reçoivent prochainement George W. Bush. Coïncidences. Le NEPAD soumet l’aide au développement à l’engagement en faveur de la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption, la démocratie, la bonne gestion de l’économie et la prévention des conflits. Mais les nouvelles relations Etats-Unis –Afrique ne se construisent pas uniquement sur les bases d’une entente cordiale. De nombreux dossiers qui fâchent sont soigneusement évités dans les discours de bonnes intentions de l’administration Bush, telles que les subventions à l’agriculture américaine qui pénalisent certains produits africains sur le marché international ou encore les divergences sur l’opportunité de la création et des compétences de la Cour pénale internationale (CPI). Non seulement les Etats-Unis ne reconnaissent pas la CPI mais engagent des sanctions contre tous les pays qui ne signeraient avec eux des accords d’immunité et de non extradition des Américains qui seraient inculpés par la CPI, chargée de juger les crimes de guerre ou contre l’humanité.

Le Congrès américain avait fixé au 1er juillet 2003 la date limite de la signature de ces accords avec les pays tiers. Les premières mesures de représailles ont été annoncé par l’administration Bush qui a publié une liste de 35 pays qui ne recevront plus son aide militaire dont le solde s’élève à 47,6 millions de dollars. Dix pays africains sont frappés par cette mesures : le Bénin, la Centrafrique, le Lesotho, le Malawi, le Mali, la Namibie, le Niger, l’Afrique du Sud, la Tanzanie et la Zambie. Dès le jeudi 26 juin, Amnesty international et la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO) ont signalé que le Sénégal venait de signer l’accord de non-extradition des ressortissants américains. Ces organisations mobilisent aujourd’hui partis politiques, syndicats et intellectuels pour faire pression sur l’Assemblée nationale sénégalaise qui n’a pas encore ratifié cet accord. Par ailleurs, dans toutes les destinations du président Bush, des organisations humanitaires et de défense des droits de l’homme ont promis de manifester leur opposition à une certaine politique des Etats-Unis.



par Didier  Samson

Article publié le 04/07/2003