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Laïcité

Vingt sages pour redéfinir une «exception française»

Le président de la République a demandé à une commission de vingt «sages» de se pencher sur l’état de la laïcité en France et de faire des propositions pour, le cas échéant, la redéfinir par la loi. Jacques Chirac a précisé le cadre de leur réflexion : la laïcité, facteur de cohésion sociale, est un devoir, pas seulement un droit.
Le respect de la laïcité et le respect des différentes religions représentées en France sont au centre d’une polémique, axée pour l’essentiel sur le port du foulard islamique dans l’espace public. Longtemps limité à l’école où l’interdiction de le porter côtoie, selon les établissements, une tolérance floue, le port du voile islamique fait désormais problème et parfois procès, dans le milieu du travail et notamment de la fonction publique.

Dans une tentative de ne pas stigmatiser l’islam, devenu la deuxième religion la plus pratiquée en France, le débat s’est étendu à l’ensemble des signes distinctifs, croix chrétienne et kippa juive. Mais, dans l’opinion publique comme dans les prises de positions des responsables politiques ou des intellectuels, c’est bien du carré de tissu couvrant plus ou moins les femmes et jeunes filles musulmanes dont il est question.

Après le tollé soulevé par la bronca dont le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy a été victime à propos de cette question, lors du Rassemblement de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), l’idée de clarifier la situation par la loi a progressé. Toutefois, dans la classe politique française les opinions sont partagées sur ce point, à droite comme à gauche. Le président de la République a donc décidé, avant que la loi sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat de 1905, acte fondateur de cette exception française, fête ses 100 ans, qu’une commission indépendante s’empare du problème.

De même, la France a récemment marqué son attachement à la laïcité en s’opposant à une référence trop explicite au christianisme comme religion intrinsèque de l’Europe dans le préambule à la future constitution de l’Union européenne.

Citoyenneté et lois de la République

La Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité comprend 20 membres et est présidée par Bernard Stasi, ancien ministre centriste et Médiateur de la République. Des universitaires de toutes confessions, ou sans croyance, des politiques de tous bords et des juristes ont jusqu’à la fin de l’année pour remettre leur rapport. Bernard Stasi a manifesté l’intention d’auditionner une centaine de personnalités et de tenir deux réunions par semaine pour parvenir au bout de cette tâche.

Jacques Chirac, installant officiellement la commission, a précisé le cadre dans lequel les sages auront à travailler. Il a souhaité «un débat public aussi large que possible, attentif à tous les courants et à toute la diversité de la société française».Mais il a réaffirmé son attachement à la laïcité, un «ciment» de la cohésion nationale, impliquant «de mettre des limites à l’expression publique de ses propres particularités», et dans le cadre des lois de la République. Car «il n’y a pas en France de règles supérieures», a affirmé le président de la République. La laïcité comporte des droits mais aussi des devoirs et «on ne peut accepter que l’affirmation d’appartenance ethniques ou religieuses soit érigée en acte politique». Face aux risques de dérives identitaires ou communautaristes perceptibles en France, Jacques Chirac a rappelé que «la République ne reconnaît que des citoyens libres et égaux en droit. Elle refuse de reconnaître l’appartenance à une communauté comme une des composantes de la citoyenneté».



par Francine  Quentin

Article publié le 04/07/2003